Shell est accusé d’avoir publié des chiffres mensongers sur les déversements de pétrole au Nigeria


Communiqué de presse

Amnesty International et Les Amis de la Terre ont porté plainte en bonne et due forme mardi 25 janvier contre le géant pétrolier Shell pour violation des Principes directeurs pour un comportement responsable des entreprises édictés par l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).

Les deux organisations affirment qu’en publiant des informations discréditées et trompeuses visant à attribuer la responsabilité de la majeure partie de la pollution à ceux qui sabotent ses opérations dans le delta du Niger, Shell bafoue les Principes directeurs de l’OCDE à l’intention des entreprises multinationales. La plainte a été déposée auprès des points de contact nationaux de l’OCDE au Royaume-Uni et aux Pays-Bas.

Mercredi 26 janvier, Shell devra répondre aux questions des parlementaires néerlandais quant à son impact sur l’environnement et les droits humains au cours d’une session consacrée aux activités de l’entreprise au Nigeria.

Au milieu des années 1990, Shell a reconnu qu’une grande partie de la pollution pétrolière dans le delta du Niger était due à ses propres défaillances. Aujourd’hui, l’entreprise montre du doigt les actes de sabotage imputables aux populations et aux criminels, citant des chiffres trompeurs qui entendent démontrer que pas moins de 98 % des déversements pétroliers sont dus à des actes de sabotage.

Si le sabotage constitue un réel problème dans le delta du Niger, Amnesty International et Les Amis de la Terre remettent régulièrement en cause l’utilisation par Shell de ces chiffres, vivement critiqués par les groupes de défense de l’environnement et les habitants. Aux termes du droit nigérian, lorsque des déversements entrent dans la catégorie des fuites causées par sabotage, Shell n’est pas tenu pour responsable et, par conséquent, n’a pas à verser d’indemnités pour les dommages causés aux personnes ou à leurs moyens de subsistance.

« Les chiffres avancés par Shell ne sont absolument pas crédibles, a indiqué Audrey Gaughran d’Amnesty International. La pollution par les hydrocarbures à grande échelle est un grave problème causé par l’industrie pétrolière dans le delta du Niger, mais le système d’enquêtes relatif aux déversements est tout sauf indépendant. »

Les Amis de la Terre comme Amnesty International ont constaté que les compagnies pétrolières ont souvent une influence non négligeable sur la détermination des causes officielles d’un déversement.

Nnimmo Bassey, directeur général des Amis de la Terre Nigeria et président des Amis de la Terre International, a déclaré : « Nous surveillons régulièrement les déversements et nos observations contredisent souvent les informations livrées par Shell. Plusieurs études désignent comme principales responsables des déversements pétroliers dans le delta du Niger les compagnies pétrolières, et plus particulièrement Shell. Shell doit assumer ses responsabilités et nettoyer les zones qu’elle a polluées dans notre pays. »

En dépit de demandes répétées, Shell n’a jusqu’ici pas précisé sur quoi se fondent les chiffres publiés ni comment l’entreprise a recueilli les données. En outre, Amnesty International et Les Amis de la Terre ont recensé des exemples de cas dans lesquels Shell a prétendu que la cause du déversement était le sabotage, mais où cette affirmation a par la suite été remise en question par d’autres enquêtes ou par les tribunaux.

En 2009, Shell a été contraint de rectifier des informations mensongères sur la cause des déversements de pétrole. Après avoir affirmé à maintes reprises que 85 % de ces déversements en 2008 étaient dus au sabotage, il a annoncé que la réalité était plus proche des 50 %. Ces 85 % pas plus que les 50 % n’ont été dûment explicités. En outre, Shell n’a pratiquement rien fait pour corriger l’impression erronée créée par sa très large utilisation de ce pourcentage très élevé.

Depuis plus d’un demi-siècle d’opérations menées par Shell dans le delta du Niger, des milliers de déversements d’hydrocarbures ont causé des dommages environnementaux épouvantables. L’eau dont la population a besoin pour boire et pêcher est polluée, tandis que les terres agricoles et les récoltes sont anéanties.

L’utilisation abusive des données sur l’origine des pollutions d’hydrocarbures et le manque de détermination de Shell et du gouvernement à mener des investigations équitables et crédibles perpétuent les atteintes aux droits humains, en privant les populations concernées de justice et d’indemnisations.

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