Singapour. Les récentes exécutions vont à l’encontre de la tendance mondiale

DÉCLARATION PUBLIQUE

Index AI : ASA 36/002/2009 -
ÉFAI

Singapour, l’un des États où le taux d’exécutions est semble-t-il le plus élevé au monde, doit cesser de recourir à la peine de mort et se joindre aux 138 pays de la planète qui ont aboli la peine capitale en droit ou en pratique.

La ville-État, qui compte 4,6 millions d’habitants, a exécuté au moins 420 personnes depuis 1991. Depuis le 18 décembre dernier, jour où l’Assemblée générale des Nations unies s’est massivement prononcée en faveur d’un moratoire mondial sur le recours à la peine capitale, Singapour, qui a vivement critiqué la résolution, a prononcé trois condamnations à mort et exécuté deux personnes, peut-être davantage.

La presse a fait état de l’exécution, le 19 décembre, du Singapourien Mohammed Ali Johari. Il avait été condamné pour meurtre, de même que son compatriote Tan Chor Jin, qui a été pendu le 9 janvier. Le 30 décembre, la Haute Cour a prononcé la peine capitale contre Chijioke Stephen Obioha, un Ghanéen de vingt ans déclaré coupable de trafic de cannabis. On craint que sa complice présumée, une Zambienne dont le cas n’a pas été évoqué récemment dans les médias, soit elle aussi condamnée à mort, les infractions liées au trafic de stupéfiants étant obligatoirement punies de mort à Singapour.

Amnesty International reconnaît la gravité de ces crimes et soutient tous les appels en faveur de la justice. L’organisation est toutefois opposée en toutes circonstances à la peine de mort, qui constitue une violation de l’un des droits les plus fondamentaux : le droit à la vie. Il s’agit du châtiment le plus cruel, le plus inhumain et le plus dégradant qui soit. En outre, le risque d’erreur judiciaire existe toujours, et la peine capitale peut conduire à l’exécution d’une personne innocente.

La plupart des peines capitales prononcées à Singapour concernent des affaires de trafic de drogue. Au moins 20 infractions sont obligatoirement punies de mort aux termes de la Loi sur l’usage illicite de stupéfiants. Ce texte contient par ailleurs une série de présomptions qui font reposer la charge de la preuve sur la défense, et non sur l’accusation.

Le rapporteur spécial des Nations unies sur les exécutions extrajudiciaires, sommaires ou arbitraires a demandé l’abolition de la peine capitale pour les infractions relatives aux stupéfiants, soulignant que le caractère obligatoire de l’application de ce châtiment constituait une violation du droit international.

Les politiques et les pratiques de Singapour vont à l’encontre de la tendance abolitionniste mondiale, forte et présente depuis longtemps. En 1948, au moment de l’adoption de la Déclaration universelle des droits de l’homme, seuls huit pays avaient aboli la peine de mort dans leur législation ou dans la pratique. Soixante ans plus tard, leur nombre s’élève à 138. Singapour est l’un des neuf pays de la région Asie et Pacifique qui n’a pas encore aboli la peine de mort en droit ou en pratique. Vingt-sept autres États de la région ont supprimé ce châtiment de leur législation ou appliquent un moratoire de facto.

Toutes les condamnations et les exécutions ne sont pas rendues publiques, aussi est-il possible qu’il y ait eu d’autres cas ces dernières semaines. Amnesty International a demandé au gouvernement de Singapour de communiquer des informations exhaustives sur l’application de la peine de mort dans le pays. Singapour n’a toujours pas rendu publiques les statistiques annuelles qui lui ont été demandées pour la période s’étendant de 1993 à aujourd’hui.

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