SOMALIE ET SOMALILAND : Des militants d’organisations de défense des droits humains publient une déclaration

Index AI : AFR 52/002/2003

Au moment où la Conférence de réconciliation et de paix pour la Somalie,
entamée il y a quatre mois, reprend au Kenya dans un nouveau lieu et sous
l’égide d’un nouveau président, des militants somaliens d’organisations de
défense des droits humains signent une déclaration importante, élaborée à
partir de leur expérience au long de nombreuses années d’action en grande
partie méconnue et risquée en faveur de la défense des droits humains.

Les défenseurs somaliens des droits humains de vingt-trois organisations
réunis à Hargeisa du 10 au 18 février 2002, ont déclaré vouloir « accentuer
leur lutte contre les atteintes aux droits humains (homicides arbitraires,
actes de torture, détention arbitraire, enlèvements) et travailler à
l’égalité des droits pour tous, en veillant à la protection particulière de
groupes vulnérables de la population tels que les femmes et les minorités. »

Ils ont affirmé leur soutien aux femmes œuvrant en faveur de la défense des
droits humains et menant campagne pour l’éradication de la violence contre
les femmes et en faveur d’une pleine participation des femmes à la vie
politique et à la construction d’un système de gouvernement démocratique.

En outre, ils ont appelé l’ensemble des autorités politiques somaliennes à « 
reconnaître publiquement le rôle légitime des défenseurs des droits humains
dans la protection et la promotion de ces droits tels qu’ils ont été définis
dans la Déclaration des Nations unies sur les défenseurs des droits de
l’homme » et à s’engager à ce que « les défenseurs des droits humains ne
fassent pas l’objet de représailles. »

Ils ont également appelé l’ensemble de la communauté internationale à
protéger les défenseurs des droits humains en danger et à les aider à
renforcer les capacités de leurs organisations. La déclaration a été adoptée
en présence du Dr Ghanim Alnajjar, expert indépendant des Nations unies pour
la Somalie.

Les défenseurs des droits humains dans les régions déchirées par les
conflits du centre et du sud de la Somalie sont quotidiennement en danger
d’être tués ou détenus arbitrairement par les milices des différentes
factions ou enlevés par des bandits armés à la solde de chefs de faction qui
ont peu voire rien fait pour remettre de l’ordre dans les zones qu’ils
prétendent contrôler.

À Puntland, les organisations de la société civile qui se penchent sur ces
exactions sont mal tolérées par les autorités politiques et se trouvent en
danger en raison de la non-résolution du conflit armé. Dans le Somaliland
par contraste, où règne la paix depuis longtemps, où les droits humains sont
respectés, où l’on trouve une presse en grande partie indépendante et où de
nombreux partis participent aux élections, les militants sont surtout
préoccupés par le système judiciaire rudimentaire et par une représentation
politique des femmes et des minorités en diminution.

En novembre 2002, Amnesty International a soutenu, dans une lettre ouverte à
la Conférence de paix pour la Somalie, les exigences de groupes de la
société civile participant à la conférence qui réclamaient qu’une plus
grande priorité soit accordée aux droits humains et refusaient que cette
conférence ne soit qu’un partage du pouvoir acquis par la violence et une
répartition des gains entre dirigeants des différentes factions armées. La
déclaration des défenseurs des droits humains somaliens reprend les
préoccupations d’autres militants somaliens lors des pourparlers de paix et
répète que « aucune impunité ne devrait être accordée aux auteurs de crimes
de guerre et de crimes contre l’humanité… qui pourraient commettre à nouveau
de tels crimes s’ils étaient autorisés à occuper des postes au gouvernement.
 »

« L’issue des pourparlers de paix ne devrait pas être la formation d’un
gouvernement de dirigeants de factions armées s’octroyant une impunité
totale pour leurs atteintes flagrantes aux droits humains, déclarait Amnesty
International. Les dirigeants politiques somaliens qui croient en la paix et
sont pour le respect des droits humains doivent s’unir maintenant pour faire
cesser les violations du cessez-le-feu, les homicides arbitraires, les
viols, enlèvements et autres extorsions financières. » Jusqu’à maintenant
très peu de signes laissent à penser que les dirigeants des factions armées
sont prêts à s’engager pour sauver la Somalie de la crise apparemment sans
fin qui menace la paix et la sécurité régionale.

« Les initiateurs régionaux et internationaux des pourparlers de paix
doivent s’efforcer d’obtenir des garanties sur ce point et considérer cet
engagement comme condition préalable à tout nouveau gouvernement de
transition » était-il encore dit.

Complément d’information
Parmi les participants au séminaire organisé par Amnesty International,
Novib et International Cooperation for Development au Somaliland, dans la
seule zone sûre depuis la désagrégation de l’ancien État de Somalie en 1991,
on comptait des défenseurs des droits humains de Mogadiscio, comme le Peace
and Human Rights Network, des organisations de femmes militantes,
l’organisation de défense des droits humains du Dr Ismail Jumale, le Centre
pour les droits humains de Dulmidiid de l’État régional du Puntland,
l’organisation de défense des droits humains Isha de Baidoa, l’organisation
Kisima de défense des droits humains et pour la paix de Kismayu, la
Coalition des femmes de Nagaad, Hornwatch et plusieurs autres organisations
du Somaliland.
Le gouvernement du Somaliland en place depuis douze ans n’est toujours pas
reconnu internationalement. Le gouvernement national transitoire (TNG,
Transitional National Government) soutenu par les Nations unies a peu
d’autorité, même dans Mogadiscio, au terme de son dernier mandat de trois
ans. Deux coalitions rivales comprenant plus d’une douzaine de factions
armées qui s’appuient sur les liens de clans - l’une liée au gouvernement
national de transition et l’autre soutenue par l’Éthiopie - continuent à se
battre pour le pouvoir. Les violations du cessez-le-feu d’octobre 2002 se
poursuivent sans qu’il y ait sanction.
Le texte complet de la Déclaration peut être consulté sur le site d’Amnesty
International, avec des liens vers le texte en somali.
Le texte de la lettre ouverte d’Amnesty International à la conférence de
paix pour la Somalie peut être consulté à l’adresse suivante :
http://web.amnesty.org/ai.nsf/Index/AFR520022002?OpenDocument&of=COUNTRIES\SOMALIA.

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