Communiqué de presse

Soudan du Sud. Toujours pas de justice pour les manifestants tués

Les autorités de l’État du Soudan du Sud n’ont pas mené d’enquête adéquate sur les homicides dont ont été victimes en décembre 2012 huit manifestants pacifiques aux mains des forces de sécurité gouvernementales, ont déclaré vendredi 24 mai Human Rights Watch et Amnesty International.

Le 9 décembre 2012, les forces de sécurité ont ouvert le feu sur une manifestation pacifique, tuant six personnes sur place. Deux autres manifestants sont morts plus tard à l’ hôpital. La manifestation faisait suite à la mort de deux hommes, lors d’une flambée de violence entre jeunes et forces de sécurité le jour précédent.

« Huit manifestants pacifiques sont morts aux mains des forces de sécurité et, apparemment, personne n’a encore été inculpé ni poursuivi cinq mois plus tard, a déclaré Daniel Bekele, directeur du programme Afrique de Human Rights Watch. L’affaire crée un précédent fâcheux pour ce nouveau pays, et sape la liberté d’expression et de réunion pacifique. »

La manifestation du 9 décembre 2012 et l’homicide dont ont été victimes deux hommes lors d’une flambée de violence la veille ont eu lieu pendant une période de troubles civils à Wau, capitale de l’État du Bahr el Ghazal occidental, faisant suite d’une décision visant à déplacer un siège administratif à l’extérieur de la ville.

Amnesty International s’est rendue à Wau, et a publié un rapport sur ces violences en février 2013. Human Rights Watch a pour sa part envoyé une mission à Wau en février et en mai 2013.

Le gouverneur du Bahr el Ghazal occidental, Rizig Zakaria Hassan, a déclaré à Human Rights Watch en mai que la police avait tiré sur les manifestants alors qu’elle défendait la Banque du Soudan du Sud, située à proximité, contre les « émeutiers ». Toutefois, des témoins oculaires ont indiqué à Human Rights Watch et à Amnesty International que les manifestants défilaient pacifiquement devant la banque. Des séquences vidéo corroborent ces informations.

« Ils ont commencé à tirer dès qu’ils nous ont vus, a déclaré à Human Rights Watch un homme de dix-huit ans, blessé par balle aux deux jambes lors du mouvement de protestation. Tous les jeunes étaient devant. J’ai vu trois d’entre eux tomber au sol, morts. »

Un médecin, après examen des corps, a observé que les huit personnes tuées avaient reçu des balles à la tête ou à la poitrine. L’identité des agents responsables de ces homicides reste floue.


« Les autorités doivent diligenter des enquêtes approfondies, efficaces et impartiales et engager des poursuites contre les personnes soupçonnées d’être responsables de ces homicides, commis il y a plus de cinq mois, et d’un certain nombre d’autres morts survenues pendant les troubles civils de Wau »
, ont déclaré Human Rights Watch et Amnesty International.

La Constitution de transition du Soudan du Sud garantit le droit de réunion pacifique et d’association, ainsi que le droit à la liberté d’expression. Selon les normes internationales, et afin de protéger le droit de toute personne à la vie et à la sécurité, les responsables de l’application des lois doivent, autant que possible, utiliser des moyens non violents.

Les armes à feu ne constituent qu’un dernier recours, quand elles sont strictement nécessaires à l’autodéfense ou à la défense de tiers contre une menace imminente de mort ou de blessure grave. L’usage volontairement létal des armes à feu n’est admis que lorsqu’il est absolument inévitable pour protéger des vies.

Selon les informations recueillies par Amnesty International et Human Rights Watch, les forces de sécurité n’ont pas cherché à contrôler ou à disperser la foule par des moyens non violents ou non meurtriers avant d’ouvrir le feu sur les manifestants. Elles n’ont donné aucun avertissement de leur intention d’utiliser des armes à feu, ni tenté d’éviter ou de limiter les morts ou les blessés.


« Les forces de sécurité ont pour mission de protéger les vies humaines et de faire respecter la loi. Il est donc tout à fait inacceptable pour ces forces d’utiliser des balles réelles contre des manifestants pacifiques »
, a déclaré Netsanet Belay, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

Selon les normes internationales, tout usage, même prétendument accidentel, de la force létale dans les opérations de maintien de l’ordre doit faire l’objet d’une enquête indépendante et impartiale.

Aucune enquête sérieuse n’a été menée et l’identité des agents des forces de sécurité responsables de ces homicides reste indéterminée.

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