SOUDAN:Le gouvernement doit mettre fin au désastre humanitaire et aux violations des droits humains dans le Darfour

Index AI : AFR 54/044/2004
ÉFAI

Vendredi 30 avril 2004

DÉCLARATION PUBLIQUE

Seule une action immédiate pourrait empêcher que ne soient tuées ou contraintes à des déplacements forcés des milliers de personnes supplémentaires au Soudan, a déclaré Amnesty International, alors que se multiplient les violations de l’accord de cessez-le-feu.

Depuis l’entrée en vigueur, le 12 avril, du cessez-le-feu signé entre le gouvernement et les groupes d’opposition armés de l’Armée de libération du Soudan (ALS) et du Mouvement pour la Justice et l’Égalité (MJE), les civils continuent de subir des exactions et se trouvent dans une situation humanitaire désespérée.

« Les attaques de villages se poursuivent ; les homicides délibérés et commis sans discrimination sur la personne de civils se poursuivent ; les pillages et les viols se poursuivent. Les détenus emprisonnés du fait de la guerre n’ont pour la plupart pas été remis en liberté. Les observateurs de l’Union africaine chargés d’enquêter sur les violations du cessez-le-feu ne sont toujours pas en poste », a déclaré Amnesty International.

La plupart des villages du Darfour ont maintenant été détruits et la population ose à peine quitter les camps de personnes déplacées. Les Janjawid (milice soutenue par le gouvernement) bloquent les routes et pénètrent parfois dans les camps. Selon certaines informations, les Janjawid entreraient librement dans le camp de personnes déplacées d’Ardamata près de la ville d’Al Jeneina, pour y choisir les femmes qui sont ensuite violées.

En outre, le conflit menace de s’étendre. Le 28 avril, des avions soudanais ont bombardé le village de Kolbus au Tchad et les Janjawid ont attaqué des réfugiés et des civils tchadiens de l’autre côté de la frontière.

« Ce n’est pas un conflit ethnique inévitable. C’est une tragédie, créée de toutes pièces par le soutien du gouvernement aux Janjawid et entretenue par une impunité totale pour les graves violations des droits humains qui se produisent, a déclaré Amnesty International.

« Deux bombes à retardement sont en marche au Soudan, dans un compte à rebours final vers le désastre : la saison des pluies qui approche et qui signifie que d’ici le mois de juin de nombreuses régions pourraient se trouver coupées de toute aide alimentaire ou médicale venue de l’extérieur ; et le danger d’un effondrement total des accords de cessez-le-feu conduisant à une escalade des violations, a déclaré Amnesty International.

« Si la communauté internationale n’accentue pas sa pression pour que les milices soutenues par le gouvernement soient désarmées et retirées de la région, le conflit risque de s’aggraver et de s’étendre. Au-delà des garanties prévues pour la protection des civils dans l’accord de cessez-le-feu, la communauté internationale doit insister pour que soient déployés des observateurs chargés de veiller au respect des droits humains. »

Amnesty International a demandé à ce que soient rapidement déployés en nombre suffisant des observateurs chargés de veiller au respect du cessez-le-feu et au respect des droits humains et à ce que les milices des Janjawid soient désarmées et renvoyées dans des zones où elles ne pourront commettre d’exactions sur la population civile.

Complément d’information

Au cours de ces dernières années, des milliers de civils de la région du Darfour, à l’ouest du Soudan, ont été tués ou blessés par des groupes nomades armés. Leurs maisons ont été détruites et leurs troupeaux volés. L’Armée de libération du Soudan (ALS) et le Mouvement pour la Justice et l’Égalité (MJE) ont pris les armes contre le gouvernement en février 2003, en réaction à ce qui était perçu comme un manque de protection de leurs communautés de la part du gouvernement et à la marginalisation et au sous-développement de la région.

Depuis, le gouvernement soudanais semble avoir donné carte blanche aux milices nomades connues sous l’appellation de Janjawid qui tuent et enlèvent des civils, essentiellement des membres d’ethnies vivant de l’agriculture, et détruisent leurs biens. Plus de 800 000 personnes ont fui leurs villages incendiés ; la plupart ont trouvé refuge dans des villes du Darfour, mais plus de 120 000 ont traversé la frontière pour se réfugier au Tchad. Plus de 10 000 personnes ont été tuées lors des différentes attaques.

Le 8 avril 2004, le gouvernement du Soudan, l’ALS et le MJE ont signé un accord de cessez-le-feu, qui devait entrer en vigueur le 12 avril. Signé pour quarante-cinq jours, il est renouvelable pour quarante-cinq autres jours à condition que la notification se fasse au plus tard vingt et un jours avant la date d’expiration. Au titre de l’article 2 de l’accord, chaque partie doit :

 s’abstenir d’engager quelque opération de recrutement que ce soit ;

 s’abstenir de toute action militaire ou opération de reconnaissance ;

 s’abstenir de tout acte de violence et de toute exaction à l’égard de la population civile ;

 se désengager et s’abstenir de tout déploiement, mouvement ou action qui pourrait s’étendre en-dehors du territoire sous son contrôle ou qui pourrait conduire à une reprise des hostilités ;

 veiller à ce que les organisations humanitaires aient accès à la région.

Une commission de surveillance du cessez-le-feu doit être établie ; tous les prisonniers de guerre et « toutes les autres personnes détenues du fait du conflit armé dans le Darfour » devront être libérés ; « les parties au conflit devront s’assurer que tous les groupes armés sous leur contrôle se plient aux termes de cet accord. Les forces de l’opposition armée devront être regroupées dans des sites clairement identifiés. Le gouvernement soudanais doit s’engager à neutraliser les milices armées. »

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