SOUDAN - La nouvelle constitution prévoit une immunité d’ensemble pour les responsables de haut niveau

Index AI : AFR 54/066/2005

La nouvelle constitution de transition du Soudan, ratifiée ce mercredi 6 juillet 2005, offre une immunité d’ensemble aux responsables gouvernementaux soudanais du plus haut niveau, ce qui démontre que le gouvernement n’a aucune intention sérieuse de lutter contre l’impunité, a déclaré Amnesty International.

Selon l’organisation, ces dispositions prouvent une fois encore que le gouvernement soudanais ne doit pas écarter la Cour pénale internationale au bénéfice de poursuites engagées à l’échelle nationale contre d’éventuels crimes de guerre commis lors du conflit armé au Darfour.

Pour Kolawole Olaniyan, directeur du programme Afrique d’Amnesty International, « il est extrêmement préoccupant que dans le contexte de l’un des plus graves conflits de la planète, au cours duquel des dizaines de milliers de Soudanais ont été victimes de violations flagrantes des droits humains, une nouvelle constitution de transition puisse être approuvée alors qu’elle ne reconnaît pas des crimes définis par le droit international comme des crimes de guerre et des crimes contre l’humanité ne bénéficiant d’aucune immunité quel que soit le niveau de responsabilité gouvernementale occupé par l’auteur présumé de ces crimes. »

« Nous nous félicitons de certaines dispositions relatives aux droits humains dans cette nouvelle constitution, en particulier l’importance plus grande accordée aux droits des femmes et des enfants, mais nous constatons avec inquiétude que cette constitution accorde une immunité de haut niveau pour la plupart des infractions au droit. »

L’article 60 de la constitution de transition accorde l’exemption de poursuites judiciaires au président et au premier vice-président de la République soudanaise pour toutes les infractions sauf celles de haute trahison, grave manquement dans les affaires d’État, et graves violations de la constitution. Dans ces cas, les responsables présumés ne peuvent être poursuivis qu’avec l’accord des trois quarts des membres du corps législatif national. L’article 92 accorde une immunité similaire aux membres du pouvoir législatif. Aucun de ces articles ne fait allusion aux normes juridiques internationales limitant l’immunité.

« Même si aucun nom de haut responsable n’a été cité en relation avec les infractions au droit international commises au Darfour, les dispositions de la nouvelle constitution remettent considérablement en question les déclarations du gouvernement soudanais selon lesquelles les tribunaux spéciaux nationaux formés récemment pour traiter les infractions commises au Darfour pouvaient être considérés comme des substituts permanents et acceptables à la Cour pénale internationale », a souligné Kolawole Olaniyan.

« En n’excluant pas du champ de l’immunité les infractions au droit international, la constitution de transition risque de perpétuer l’impunité des hauts responsables gouvernementaux. Cette impunité aura comme seule limite les crimes que le gouvernement décidera d’exclure de l’exemption de poursuites. »

Amnesty International a également condamné la limitation de l’article 33 de la constitution, qui comportait une interdiction des traitements cruels, inhumains ou dégradants, mais pas des peines du même type. Des versions précédentes avaient interdit les « peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants », dans le respect des normes internationales. La suppression du mot « peine » de la version finale de la constitution ouvre la porte aux peines comme la flagellation ou l’amputation, qui demeurent légales en droit soudanais. Cette omission constitue un grave manquement aux obligations du Soudan définies par l’article 7 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel le Soudan est partie.

Amnesty International a également exprimé son inquiétude devant le refus d’abolir la peine de mort au Soudan, en particulier lorsqu’elle est appliquée aux mineurs. Pour l’organisation, ce refus est incompatible avec les obligations juridiques du Soudan définies par la Convention relative aux droits de l’enfant, le PIDCP et la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant.

Complément d’information

Amnesty International a publié en mai 2005 des Observations à l’attention de la Commission nationale de révision de la Constitution (index AI : AFR 54/049/2005), dans lesquelles figurent ses recommandations sur le projet de constitution de transition.

Pour obtenir de plus amples informations, veuillez contacter le Service Presse d’Amnesty International au 02 543 79 04 ou consulter les sites http://www.amnesty.be et http://www.amnesty.org

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