Soudan - Violations des droits humains autour du référendum sur le Sud-Soudan


SYNTHÈSE DESTINÉE AUX MÉDIAS

ÉFAI

7 janvier 2011

De très fortes pressions sont exercées sur les autorités soudanaises, tant sur le plan national qu’international, afin de l’inciter à faire en sorte que le
référendum sur l’indépendance du Sud se déroule dans le calme et à empêcher un retour vers des décennies de violence, d’insécurité et de violations des droits humains. Amnesty International estime que le respect, la protection et la promotion des droits humains sont essentiels au succès de ce vote historique.

Principaux motifs de préoccupation d’Amnesty international :

· L’escalade des offensives militaires - et des violations des droits humains qui en découlent - du gouvernement soudanais contre le Darfour pendant que l’attention de la communauté internationale se porte sur le référendum

En décembre, plus de 20 000 personnes ont été déplacées par des
attaques menées par le gouvernement, qui ont notamment visé les camps de déplacés de Dar Al Salam, Shangil Tobaya et Khor Abeche, dans le nord et le sud du Darfour. Des groupes armés ont ensuite réinvesti ces zones. Les attaques en question ont en grande partie été passées sous silence et Amnesty International craint que la communauté internationale ne se désintéresse des atteintes aux droits fondamentaux dont sont victimes les civils au Darfour à l’heure où les regards se tournent vers le référendum.
En 2004 et en 2005, les attaques, déplacements et autres crimes commis au Darfour ont été éclipsés, sur le plan international, par les négociations
en relation avec la signature de l’Accord de paix global entre le nord et le sud du Soudan. Il ne faut pas que cela se reproduise.

· Les violations des droits humains commises par la police et les forces de
sécurité dans le nord

La Loi de 2010 relative à la sécurité nationale continue à accorder au Service national de la sûreté et du renseignement des pouvoirs très
étendus en matière d’arrestation, de détention, de perquisition et de
confiscation, ainsi que l’immunité pour les violations des droits humains
perpétrées par ses agents dans le cadre de leurs fonctions. Amnesty International a recueilli de nombreuses informations indiquant que le Service national de la sûreté et du renseignement prend aussi bien pour cible des Darfouriens que des personnes originaires du sud. En novembre 2010, au moins 11 militants et journalistes du Darfour ont été arrêtés à Khartoum ; ils sont désormais maintenus en détention sans inculpation depuis plus de deux mois. Ils attendent toujours de comparaître. Amnesty International estime qu’il est possible que la persécution des minorités ethniques s’intensifie dans le nord pendant et après le référendum. Les femmes continuent à subir des traitements cruels, inhumains et dégradants en vertu du régime d’ordre public en vigueur dans le nord ; elles peuvent ainsi être arrêtées et flagellées en raison de leur style vestimentaire et de leur comportement en public.

· Les violations des droits humains commises par la police et les forces de
sécurité dans le sud

Amnesty International a recueilli des renseignements sur les violations des droits humains perpétrées par les forces de sécurité et des membres de
l’Armée populaire de libération du Soudan (APLS) durant les élections
d’avril 2010. Dans le sud, mais aussi dans le nord, des journalistes ont été
victimes d’arrestations arbitraires et de man ?uvres de harcèlement pour avoir signalé des fraudes électorales. Des électeurs et des membres de
l’opposition ont également été harcelés et menacés dans
certaines zones du sud du pays. Si les préparatifs du référendum se sont déroulés dans un calme relatif, il est crucial que les autorités délivrent à tous les policiers et membres des forces armées des instructions claires selon lesquelles il convient de respecter et protéger les droits fondamentaux de tous, et de veiller à ce que les auteurs de violations
des droits fondamentaux rendent des comptes.

Il a été signalé ces dernières années que des membres de l’APLS se sont rendus coupables de violations dans le sud du Soudan, dont des agressions visant la population locale. Il est possible que le risque d’explosion de violence restreigne la liberté de mouvement dans certaines zones. Amnesty International demande à tous les organes responsables de l’application des lois, et en particulier aux membres de l’APLS, de respecter le droit de tous les citoyens de circuler librement.

 ? Les menaces pesant sur la liberté d’expression, d’association et de
réunion pacifique

Celles-ci incluent la dispersion violente de manifestations et d’actions de protestations pacifiques, ainsi que l’arrestation arbitraire et l’incarcération de journalistes et d’observateurs. Ces violations ont été signalées par des
témoins et recensées pendant l’élection présidentielle d’avril 2010 ; des actes de répression systématiques ont déjà été constatés à l’approche du référendum.

Dans le nord du Soudan, des manifestants favorables et hostiles à la sécession se sont affrontés, et la police a violemment dispersé des partisans de l’indépendance en octobre. Un journal favorable au gouvernement a été contraint par le Service national de la sûreté et du renseignement à cesser ses activités pour avoir publié un article sur la sécession potentielle du Sud-Soudan.

 ? La possible discrimination contre les personnes originaires du sud du pays qui vivent dans le nord, et l’incertitude sur la question de la citoyenneté si le sud fait sécession

Aucun accord n’a encore été conclu sur les droits des personnes originaires du nord vivant dans le sud et des personnes originaires du sud vivant dans le nord (dont le nombre s’élève à plus d’un million et demi en tout). En particulier, les personnes originaires du sud vivant dans le nord connaissent déjà la persécution et la marginalisation - la plupart vivent dans des camps de déplacés sans aucune sécurité d’occupation, et beaucoup sont harcelées par les forces de sécurité. Faute d’accord sur la citoyenneté et les droits de
résidence qui garantirait les droits des minorités, il est possible que cette situation débouche sur des déplacements de masse et donne lieu à diverses violations des droits humains et à la séparation de familles tant dans le nord que dans le sud.


Amnesty International demande :

· Qu’il soit immédiatement mis fin aux attaques visant les civils et les camps de déplacés au Darfour, et que les autorités s’engagent à respecter
le droit humanitaire et les droits humains consacrés par le droit international avant, pendant et après le référendum.

· Des messages clairs de la part du gouvernement d’unité nationale, du
gouvernement du Sud-Soudan, ainsi que de la Commission du référendum sur le Sud-Soudan, messages selon lesquels les atteintes aux droits humains et les violences ne seront pas tolérées.

 ? Un système efficace d’enregistrement et de traitement des plaintes portant sur les restrictions à la liberté de voter.

 ? Des procédures de plainte efficaces en cas de man ?uvres d’intimidation ou d’autres violences, et des éclaircissements sur la manière de signaler ces violations, avec la garantie que le grand public sera suffisamment informé de ces procédures.

 ? Des instructions claires à l’intention des policiers émises par leur direction et la mise en place de mécanismes afin que personne ne soit victime d’actes d’intimidation ou de harcèlement pour avoir exercé de manière pacifique son droit à la liberté d’opinion et d’expression et d’autres droits de même nature.

· Que les gouvernements du nord et du sud du Soudan fassent le nécessaire pour qu’une autorité indépendante et impartiale mène dans les meilleurs délais des enquêtes dignes de ce nom sur toutes les allégations de violations des droits humains, et pour que les auteurs présumés rendent des comptes.

· Si les personnes concernées ne sont pas autorisées à conserver la
nationalité ou la citoyenneté des deux pays, elles doivent pouvoir déterminer elles-mêmes laquelle des deux elles adopteront. Les conditions d’obtention de la nationalité ou de la citoyenneté, ainsi que de la transmission de celles-ci à ses enfants, ne doivent pas introduire de discrimination sur la base de la naissance, de l’origine ethnique, de la religion, du genre, du statut marital ou d’autres facteurs similaires. Il sera en outre nécessaire d’adopter de véritables dispositions pour protéger le
droit à la vie de famille dans les cas où les membres d’une même famille
n’ont pas la même nationalité ou citoyenneté.

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