Syrie. Un défenseur des droits humains emprisonné agressé et sanctionné par les autorités pénitentiaires Une enquête indépendante et effective doit être menée sur cette agression

Déclaration publique

Index AI : MDE 24/027/2010 (Public)

ÉFAI

4 novembre 2010

(Londres, 4 novembre 2010) – Huit importantes organisations de défense des droits humains ont appelé ce jeudi 4 novembre le gouvernement syrien à garantir la sécurité de Muhannad al Hassani, défenseur des droits humains, condamné à une peine de trois années d’emprisonnement et agressé la semaine dernière dans la prison d’Adhra, à Damas où il est incarcéré.

Les huit organisations – Amnesty International, Human Rights Watch, la Commission internationale des juristes, l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT), la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH), l’Institut du Caire pour l’étude des droits humains (CIHRS), le Réseau euro-méditerranéen pour les droits humains (REMDH) et Front Line – demandent instamment au gouvernement syrien d’enquêter sur l’agression dont a été victime Muhannad al Hassani et de le protéger de nouveaux actes de brutalité ou mauvais traitements.

Muhannad al Hassani, avocat et défenseur des droits humains de renommée internationale, a été physiquement agressé en prison le 28 octobre par un prisonnier de droit commun détenu dans la même cellule que lui à la prison d’Adhra. L’agression s’est produite deux semaines après la date de la cérémonie qui s’est tenue à Genève, au cours de laquelle l’avocat emprisonné aurait dû recevoir le prestigieux Prix Martin Ennals qui récompense les défenseurs des droits humains.

Muhannad al Hassani est resté dans la même cellule que son agresseur pendant cinq jours après son agression, il aurait à présent été transféré dans une cellule minuscule où il est maintenu à l’isolement. Il a entamé, avec d’autres prisonniers politiques de la prison d’Adhra, une grève de la faim pour protester contre cette mise à l’isolement. Le prisonnier qui a attaqué Muhannad al Hassani n’avait été que récemment transféré dans la même cellule, semble-t-il ; il portait un lourd anneau de métal à un doigt, bien que les prisonniers n’aient habituellement pas le droit de garder de tels objets sur eux et s’en serait servi pour frapper.

Muhannad al Hassani a notamment reçu une blessure au front qui a nécessité dix points de suture, il avait un œil tuméfié, la joue enflée et présentait des hématomes sur tout le corps.

Après cette algarade, la police a pris les dépositions des autres prisonniers témoins de la scène et interrogé Muhannad al Hassani en présence de son agresseur, mais n’aurait rien tenté pour mettre fin aux menaces et accusations d’anti-patriotisme que celui-ci aurait continué de proférer, ne prenant même pas note des menaces ; Muhannad al Hassani a ensuite conduit à la clinique gouvernementale de Douma, localité située entre Adhra et Damas, pour y être vu par un médecin qui a rédigé un rapport sur les blessures constatées le 1er novembre.

L’affaire a été portée devant un tribunal de Douma, sans que les avocats de Muhannad al Hassani en aient été informés et sans qu’ils puissent être présents à l’audience.

Les huit organisations appellent les autorités syriennes à ouvrir dans les meilleurs délais une enquête approfondie, transparente et indépendante sur l’agression dont a été victime Muhannad al Hassani et les circonstances qui ont conduit à ce qu’il soit exposé à un tel risque. En particulier, elles devront déterminer si les autorités pénitentiaires de la prison d’Adhra ont été complices de l’agression, si elles ont volontairement transféré le prisonnier qui s’en est pris à Muhannad al Hassani dans la même cellule pour lui faciliter la tâche et pourquoi elles ont laissé les deux hommes dans la même cellule pendant cinq jours après les faits.

Les conclusions de cette enquête devront être rendus publiques et les responsables présumés de l’agression traduits en justice.

Les huit organisations demandent également avec force que soit mis fin immédiatement à la détention à l’isolement de Muhannad al Hassani et que des garanties soient données concernant sa sécurité en prison.

Amnesty International et les autres organisations considèrent Muhannad al Hassani comme un prisonnier d’opinion, qui doit être libéré immédiatement sans condition.

Il purge actuellement une peine de trois années d’emprisonnement, prononcée en juin 2010 à l’issue d’un procès inéquitable devant le tribunal pénal de Damas.

Complément d’information

Muhannad al Hassani est avocat et co-fondateur de l’organisation syrienne des droits de l’homme (Sawasiyah). Il a été régulièrement pris pour cible par les autorités syriennes en raison de son action en faveur de la défense des droits humains. Il a été condamné à une peine d’emprisonnement de trois années en juin 2010, après avoir été reconnu coupable, par le tribunal pénal de Damas, « d’affaiblissement du sentiment national » et de « diffusion de fausses nouvelles ». Ces accusations, couramment utilisées contre les opposants au gouvernement ont été formulées après publication, par Muhannad al Hassani, d’informations sur les procès inéquitables de prisonniers politiques et la torture en Syrie et après ses rencontres avec des représentants d’ambassades étrangères avec lesquels il avait abordé le sujet des droits humains.

Muhannad al Hassani est membre de la Commission internationale des juristes ; il a reçu en 2010 le prestigieux Prix Martin Ennals en récompense de son action en faveur des droits humains.

Le président du jury l’a décrit comme un homme «  d’un courage exceptionnel, détenu de façon arbitraire dans des conditions inacceptables pour avoir défendu l’état de droit et le droit fonder une organisation de défense des droits humains. »

En octobre 2010, il a reçu lePrix du barreau d’Amsterdam, en hommage à son travail en tant qu’avocat au service des droits humains.
D’autres opposants au gouvernement auraient été agressés par des prisonniers de droit commun, ainsi que par des membres du personnel pénitentiaire dans la prison d’Adhra.

En décembre 2006, par exemple, Anwar al Bunni, autre avocat défenseur des droits humains, a été poussé du haut d’un escalier par un détenu de droit commun et frappé à la tête en présence de gardiens qui ne sont pas intervenus.

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