« Les autorités tanzaniennes doivent libérer immédiatement et sans condition Tundu Lissu, dont l’arrestation et la détention arbitraires s’inscrivent dans un contexte de répression croissante à l’égard des dirigeant·e·s de l’opposition, à l’approche des élections générales d’octobre 2025, a déclaré Tigere Chagutah, directeur régional pour l’Afrique de l’Est et l’Afrique australe à Amnesty International.
« La disparition forcée de quatre personnes ayant critiqué le gouvernement, et l’homicide illégal d’une autre en 2024 sont survenus dans le cadre de la campagne répressive menée par les autorités. La police a également empêché des membres de l’opposition de tenir des réunions et d’autres rassemblements politiques, les soumettant à des arrestations de masse, à des détentions arbitraires et à un recours illégal à la force.
« Au lieu d’utiliser ces tactiques brutales pour faire taire les opposants, les autorités tanzaniennes devraient s’attacher à faire respecter les droits fondamentaux dans le pays, notamment le droit à la liberté d’expression et à la liberté de réunion pacifique. »
Complément d’information
Tundu Lissu a été arrêté le 9 avril 2025 après avoir organisé un rassemblement politique dans la ville de Mbinga, dans le sud-ouest de la Tanzanie. Il a ensuite été transféré à Dar es Salaam, à plus de 1 000 kilomètres de là, par la route, pendant la nuit. La police a fait un usage excessif de la force, notamment en tirant des grenades lacrymogènes et en faisant feu en l’air pour disperser ses partisans qui s’étaient approchés lors de l’arrestation.
Le 10 avril 2025, la police l’a accusé de trahison, une infraction excluant toute possibilité de libération sous caution, en raison de messages qu’il avait diffusés sur les réseaux sociaux le 3 avril 2025, afin d’appeler les Tanzanien·ne·s à boycotter les prochaines élections, en évoquant la possibilité d’une fraude.
L’État l’a également inculpé de trois infractions liées à la « publication de fausses informations » en vertu des lois nationales relatives à la cybercriminalité. Le 3 avril 2025 sur YouTube, Tundu Lissu a par ailleurs déclaré que la police tanzanienne avait participé à des malversations électorales présumées qui, selon lui, avaient été ordonnées par le président après les élections locales de novembre 2024. Il a aussi affirmé que les juges du pays n’étaient pas indépendants et qu’ils étaient soumis aux pressions du parti au pouvoir.
Dioniz Kipanya, un responsable du parti Chadema, a disparu le 26 juillet 2024 lorsqu’il a quitté son domicile à la suite d’une conversation téléphonique avec une personne non identifiée. Le 18 août 2024, Deusdedith Soka et Jacob Godwin Mlay, tous deux jeunes militants du Chadema, et Frank Mbise, chauffeur de moto-taxi, ont été enlevés par un groupe d’hommes soupçonnés d’être des policiers.
Le corps d’Ali Mohamed Kibao, un cadre du Chadema, a été retrouvé le 8 septembre 2024. Des agents de sécurité présumés l’avaient enlevé dans un bus le 6 septembre 2024 alors qu’il rentrait chez lui à Tanga en provenance de Dar es Salaam. Selon une autopsie, son corps avait été trempé dans de l’acide et portait des traces de coups.
Tundu Lissu comparaîtra devant le tribunal de première instance de Kisitu, à Dar es Salaam, le 24 avril 2025.