Tchad. Garantir la sécurité et le respect des droits humains dans la région du Dar Tama après la mort de deux militaires

Déclaration publique

Index AI : AFR 20/013/2010

ÉFAI

2 novembre 2010

À la suite de violents affrontements et de la mort, le 21 octobre 2010, de deux officiers de l’Armée nationale tchadienne, respectivement membres des ethnies zaghawa et tama, Amnesty International a appelé les autorités du Tchad à veiller à la sécurité et au respect des droits humains. L’organisation est inquiète de la montée des tensions entre les deux groupes ethniques moins de deux mois avant que la Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) ne se retire totalement du pays. Elle réitère son appel aux autorités tchadiennes pour qu’elles assurent la continuité de la sécurité et de la protection de la population dans l’est du Tchad après le retrait de la MINURCAT, qui doit s’achever le 31 décembre 2010.

Selon les informations reçues par Amnesty International, ces événements ont eu lieu après que le colonel Dongui, membre de l’ethnie zaghawa et chef des services de renseignement militaires de la région du Dar Tama, basés à Guéréda, a arrêté le 19 octobre 2010 un agriculteur de l’ethnie tama soupçonné de détention d’armes à feu dans le village de Sounout (canton d’Ouré Kouré), près de Guéréda. L’agriculteur aurait été torturé et il est mort en détention des suites des mauvais traitements qui lui ont été infligés. Par la suite, Ismaël Mahamat Sossal, commandant de la région militaire et membre de l’ethnie tama, s’est disputé avec le colonel Dongui. Ce dernier a ouvert le feu et l’a tué, et il a blessé deux autres militaires tamas, Issakha Ramadane et Abdallah Taouil. Les gardes du corps du commandant Sossal ont alors abattu le colonel Dongui.

Le préfet de la région du Wadi Fira s’est rendu à Guéréda et des renforts militaires y ont été envoyés depuis les bases militaires de Tiné, Am Djaras et Abéché. Un certain nombre de personnes, dont les deux militaires tamas qui ont été blessés par le colonel Dongui, ont été arrêtées et certaines ont été transférées dans des lieux indéterminés. La situation reste tendue à la base militaire de Guéréda et dans cette ville. Amnesty International craint que les personnes arrêtées ne subissent des mauvais traitements.

L’organisation engage les autorités tchadiennes à ouvrir une enquête indépendante et impartiale sur la mort en détention de l’agriculteur tama. Elle leur demande également de révéler sans attendre ce qu’il est advenu des personnes arrêtées à Guéréda depuis l’échange de tirs et le lieu où elles se trouvent, d’en informer sans délai leurs proches et de permettre immédiatement à ces détenus de consulter leurs avocats, de contacter leurs familles et de recevoir des soins médicaux.

Complément d’information

Les tensions entre les ethnies zaghawa et tama existent depuis plusieurs années. Les Zaghawas, dont fait partie le président Idriss Déby Itno, ont accusé les Tamas de soutenir les groupes armés d’opposition contre le gouvernement tchadien. Ainsi, le 30 novembre 2007, le sultan du Dar Tama, Haroun Mahamat Abdoulaye, a été arrêté à Guéréda avec sept autres hommes, dont des militaires membres de l’ethnie tama. Les hommes arrêtés avec lui étaient les colonels Youssouf Abdelkerim Abdoulaye, Yacoub Oumar et Ibrahim Idriss Ibrahim, Abdel Aziz Moussa, Abdelkarim Mahamat Toraye, alors préfet du département du Dar Tama, et Ali Kaikit. À part le sultan Abdoulaye, qui a été libéré après plus de six mois de détention, tous demeurent emprisonnés au centre de détention de Korotoro. Ils sont accusés par les autorités tchadiennes d’être impliqués dans le Front uni pour le changement démocratique (FUCD), un ancien groupe armé d’opposition. Cependant, ils n’ont été inculpés d’aucune infraction prévue par la loi. Haroun Mahamat Abdoulaye a été libéré en mai 2008, mais il a été placé en résidence surveillée à son domicile de N’Djamena jusqu’à sa seconde arrestation, le 20 juillet 2009. Il a ensuite été libéré sans inculpation après plusieurs semaines de détention.

La Mission des Nations unies en République centrafricaine et au Tchad (MINURCAT) a fermé ses bureaux et s’est retirée de Guéréda en juillet 2010, laissant les fonctions de sécurité aux soins du Détachement intégré de sécurité (DIS). Le 25 mai 2010, le Conseil de sécurité des Nations unies a décidé de mettre fin à la MINURCAT le 31 décembre 2010, faisant suite à la demande du gouvernement tchadien, qui avait affirmé qu’il assumerait l’entière responsabilité de la protection des civils sur son territoire.

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