Communiqué de presse

Tchad. Sept victimes de disparition forcée sont libérées mais on reste sans nouvelles de dizaines d’autres

Sept personnes ont été remises en liberté le 13 mars 2011 après avoir été soumises par les autorités tchadiennes à une disparition forcée pendant plus de trois ans.

Ces sept hommes ont été arrêtés par les forces de sécurité tchadiennes à Guéréda, dans le département du Dar Tama (nord-est du Tchad), puis détenus au secret à compter du 8 décembre 2007 au centre de détention de haute sécurité de Korotoro. Des informations relatives à leur possible incarcération à Korotoro ont commencé à circuler en 2010 mais n’ont pas été confirmées par les autorités tchadiennes en dépit des demandes de renseignements de leurs proches, d’Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains. Ces sept hommes sont :

Abdelkerim Mahamat Ahmat Taowraye
• Abdelazizi Moussa Souleyman
• Yacoub Oumar Adam
• Youssouf Abdelkerim Abdoulaye
• Ibrahim Idriss Ibrahim
• Ali Abdelkerim Mahamat
, également connu sous le nom de Kauiguit
Daoud Ibrahim Abdoulaye

Ils n’avaient été inculpés d’aucune infraction pénale ; ils n’ont pas comparu devant un juge et auraient été torturés au cours de leur détention.

Amnesty International se réjouit de leur libération et demande aux autorités tchadiennes de veiller à ce que des enquêtes rigoureuses et impartiales soient menées dans les meilleurs délais sur les violations des droits fondamentaux dont ces sept personnes ont été victimes, en particulier sur leur disparition forcée et sur les allégations de torture, et de faire en sorte que les responsables soient traduits en justice dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales d’équité des procès. Les autorités doivent accorder des réparations, et notamment une indemnisation, à ces sept personnes et faire le nécessaire pour qu’elles reçoivent un soutien médical et psychosocial adapté.

Certains de ces sept hommes étaient membres du Front Uni pour le Changement Démocratique (FUCD), un ancien groupe d’opposition armé. Ils ont été arrêtés le 30 novembre 2007 pendant ou peu après une réunion avec le président Idriss Deby Itno à Guéréda, durant laquelle devait être évoquée la question du désarmement d’anciens éléments du FUCD basés dans la région.

Les sept hommes appartiennent au groupe ethnique tama. Le FUCD était principalement constitué de Tamas et dirigé par l’ancien ministre tchadien de la Défense, Mahamat Nour, qui a été limogé par le président tchadien le jour de l’arrestation des sept hommes. Les hommes ont été appréhendés en même temps qu’Haroun Mahamat Abdoulaye, sultan du Dar Tama. Haroun Mahamat Abdoulaye a été libéré en mai 2008 mais a été placé en résidence surveillée à son domicile de N’Djamena jusqu’à sa seconde arrestation, le 20 juillet 2008, puis démis de ses fonctions le 21 juillet 2008. Il a ensuite été libéré sans avoir jamais été inculpé.

Amnesty International continue à s’inquiéter pour de nombreuses autres personnes arrêtées au Tchad et portées disparues depuis lors. L’organisation est particulièrement préoccupée par le cas de plus de 14 soldats et civils qui auraient été appréhendés par des agents du gouvernement dans la capitale, N’Djamena, entre avril et août 2006. Plus de cinq ans après leur arrestation, le sort réservé à ces soldats et civils reste inconnu. Ces hommes auraient été interpellés, puis maintenus en détention parce qu’ils étaient soupçonnés d’avoir pris part à l’attaque perpétrée contre la capitale, N’Djamena, par un groupe armé à la mi-avril 2006. En dépit des appels persistants et répétés des familles et d’organisations de défense des droits humains, les autorités ont refusé de révéler le sort qui leur avait été réservé et le lieu où ils se trouvaient. Les hommes suivants étaient au nombre des personnes arrêtées :

• le colonel Abakar Gawi, commandant de la gendarmerie, légion de Batha, arrêté le 14 avril 2006 ;
• le colonel Khamis Doukoune, 3e adjoint au chef d’état-major, commandant de bataillon ;
Adil Ousman, directeur-adjoint de l’administration et des finances de l’armée tchadienne, arrêté le 18 avril 2006 ;
• le colonel Ahmat Haroun, responsable du bureau B2 du chef d’état-major, arrêté le 11 avril 2006 (deux jours avant l’attaque contre la capitale) ;
• le colonel Abdoulaye, directeur des communications de la gendarmerie, arrêté le 13 avril 2006 ;
Yousouf Seid, chef d’état-major de la gendarmerie et ;
Ramat Ahoula, Michelim Ahmad Oumar, Ahmat Mahamat, Ali Ousman, Guy Békam et Mahamat Saleh Idriss.

Amnesty International s’inquiète aussi du sort réservé aux personnes arrêtées par les services de sécurité tchadiens entre les 2 et 3 août 2008 après qu’une coalition de groupes armés d’opposition eut attaqué N’Djamena. Figurent parmi ceux-ci le dirigeant Ibni Oumar Mahamat Saleh, arrêté à son domicile à N’Djamena le 3 août 2008 et que l’on craint mort.

Il est crucial que les autorités révèlent ce qu’il est advenu de l’ensemble des personnes soumises à une disparition forcée au Tchad ainsi que le lieu où elles se trouvent, et en informent les familles et avocats de celles-ci. Dans les cas de personnes mortes en détention, des enquêtes rigoureuses et impartiales doivent être menées dans les meilleurs délais sur les circonstances du décès, les responsables présumés doivent être identifiés et traduits en justice dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales d’équité en la matière, et les familles doivent recevoir des réparations, et notamment une indemnisation. Les personnes maintenues en détention doivent pouvoir s’entretenir immédiatement avec leur famille et leur avocat, et bénéficier de tous les soins médicaux dont elles ont besoin. Elles doivent être soit libérées, soit inculpées d’infractions prévues par la loi et jugées dans les meilleurs délais dans le cadre d’une procédure respectant les normes internationales d’équité en la matière, sans que la peine de mort ne soit requise.

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