Thaïlande. L’amnistie proposée doit être conforme aux obligations internationales du pays

L’amnistie qui pourrait être accordée pour des infractions commises depuis le début de la crise politique actuelle en Thaïlande ne doit pas se traduire par une impunité pour de graves violations des droits humains, a déclaré Amnesty International.

La Commission parlementaire thaïlandaise de réconciliation nationale examine pendant trois jours un rapport qui propose d’amnistier les dirigeants et sympathisants de tous les mouvements politiques, les responsables politiques, les représentants du gouvernement et les membres des forces de sécurité pour des infractions remontant au moins jusqu’au coup d’État de septembre 2006.

Ce rapport, rédigé par l’Institut du roi Prajadhipok (KPI), recommande que cette amnistie ne s’applique pas aux infractions relatives à la monarchie.
« Le droit international interdit d’amnistier les auteurs de graves violations des droits humains », a rappelé Benjamin Zawacki, chercheur sur la Thaïlande à Amnesty International.  ?« La Thaïlande doit enquêter sur toutes les allégations de violations – quelle que soit l’appartenance politique de leurs auteurs – et poursuivre les personnes soupçonnées d’en être pénalement responsables. »

Amnesty International s’est aussi inquiétée de la manière dont cette amnistie serait appliquée aux prisonniers d’opinion.
Depuis le début de la crise politique dans le pays en 2005, de nombreux prisonniers d’opinion thaïlandais ont en effet été inculpés en vertu de la législation sur le crime de lèse-majesté (article 112 du Code pénal) ou de la Loi relative aux infractions liées à l’informatique, par l’intermédiaire de laquelle des inculpations pour crime de lèse-majesté sont prononcées.

La législation sur le crime de lèse-majesté en Thaïlande dispose que « toute personne qui tient des propos diffamatoires, insultants ou menaçants envers le roi, la reine, le prince héritier ou le régent est passible d’une peine d’emprisonnement de trois à 15 ans ».

Ces dispositions sont contraires aux obligations juridiques internationales de la Thaïlande en matière de liberté d’expression.

« Les poursuites engagées au titre de ces dispositions législatives contre des personnes ayant simplement exprimé pacifiquement leurs opinions politiques doivent être abandonnées », a déclaré Benjamin Zawacki. « Celles de ces personnes qui sont emprisonnées doivent – comme tous les prisonniers d’opinion – être libérées immédiatement et sans condition. »

Amnesty International continue d’exhorter les autorités thaïlandaises à amender la législation sur le crime de lèse-majesté et la Loi relative aux infractions liées à l’informatique afin de les mettre en conformité avec les normes internationales relatives à la liberté d’expression, ou à les abolir.
La Thaïlande est partie au Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), en vertu duquel les États ont l’obligation d’enquêter sur les allégations de violations, d’engager des poursuites le cas échéant, et de protéger la liberté d’expression.

D’après le troisième rapport intermédiaire (mars 2012) de la Commission thaïlandaise vérité et réconciliation, créée à la suite de la vague de violence politique d’avril-mai 2010, 261 enquêtes menées par les services de police, concernant 650 personnes, sont en cours ou terminées. Elles ont abouti pour l’instant à 290 arrestations. En ce qui concerne les 93 personnes tuées pendant cet épisode de violence, la responsabilité des forces gouvernementales semble engagée dans au moins 16 cas.

Par ailleurs, dans ce rapport, la Commission recommande de nouveau un amendement significatif de la législation sur le crime de lèse-majesté.
 ?« En Thaïlande, l’obligation de rendre des comptes doit prévaloir sur l’amnistie lorsque des violences ont été commises, et les prisonniers d’opinion doivent être libérés », a souligné Benjamin Zawacki.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit