Ces militants rejoignent ainsi les centaines de personnes qui ont été harcelées ou emprisonnées simplement pour avoir protesté pacifiquement contre le gouvernement militaire ou ses politiques ces trois dernières années. Pas plus tard qu’hier, les autorités ont annoncé leur intention d’inculper sept autres militants de sédition pour avoir organisé des manifestations en faveur de la démocratie.
« Non seulement les dirigeants militaires thaïlandais continuent à engager de longues procédures pénales contre des centaines de critiques réels ou supposés, mais ils ont intensifié la répression de la dissidence pacifique ces derniers mois. Les autorités doivent honorer leurs promesses et lever les restrictions absurdes et injustifiées qu’elles imposent maintenant depuis près de quatre ans, prétendument au nom de la sécurité nationale », a déclaré James Gomez, directeur pour l’Asie du Sud-Est et le Pacifique à Amnesty International.
La cour d’appel rendra aujourd’hui sa décision dans l’affaire Apichart Pongsakul, étudiant en droit et membre du conseil d’administration d’Amnesty International Thaïlande, qui encourt six mois d’emprisonnement et une amende pour avoir enfreint l’interdiction générale des rassemblements « politiques » de cinq personnes ou plus décrétée par la junte. Apichart Pongsakul a été arrêté le 23 mai 2014 - le lendemain du coup d’État militaire - pour avoir tenu, dans le centre de Bangkok, une pancarte sur laquelle on pouvait lire : « Je n’accepterai pas un pouvoir barbare ».
Huit défenseurs des droits sociaux doivent également se présenter à la police de Bangkok pour savoir s’ils seront ou non poursuivis pour non-respect de cette même interdiction de manifester pacifiquement. Ces huit militants ont participé à une marche pacifique organisée pour défendre une série de droits économiques, sociaux et civils, qui a débuté à Bangkok le 18 janvier.
« Apichart Pongsakul est devenu un symbole de la résistance pacifique contre le régime militaire. Cet homme et les autres personnes poursuivies pour avoir manifesté pacifiquement n’ont rien fait de mal - toutes les procédures pénales à leur encontre doivent être abandonnées immédiatement et les condamnations prononcées doivent être annulées. Il est tragiquement symbolique qu’il comparaisse devant le tribunal le jour même où huit autres militants risquent d’être inculpés pour avoir enfreint cette même interdiction répressive », a déclaré James Gomez.
Depuis qu’il a pris le pouvoir en mai 2014, le gouvernement dirigé par l’armée thaïlandaise a interdit les rassemblements pacifiques « politiques » et a utilisé des dispositions législatives formulées de façon vague pour cibler l’opposition politique, les médias, les universitaires et les étudiants qui critiquent pacifiquement les autorités.
Le 30 janvier, les autorités ont annoncé qu’elles allaient engager des poursuites pour sédition - au titre d’une loi prévoyant une peine maximale de sept ans d’emprisonnement - et pour rassemblement illégal contre des militants et un avocat défenseur des droits humains. Ils avaient tous protesté contre le report à février 2019 des élections législatives annoncé par le gouvernement militaire.
« Depuis son arrivée au pouvoir, l’armée thaïlandaise a promis à maintes reprises de respecter les droits humains et d’autoriser la critique pacifique, mais elle n’a absolument pas traduit ces promesses dans les faits. La communauté internationale doit engager les autorités à prendre des mesures concrètes pour mettre fin à ces violations persistantes », a déclaré James Gomez.