Communiqué de presse

TOGO : LES AUTORITÉS CENSURENT UN RAPPORT DÉNONÇANT LA TORTURE

Amnesty International condamne les intimidations exercées à l’encontre de membres de la Commission nationale des droits de l’homme du Togo (CNDH) et appelle les autorités à ne pas entraver la diffusion d’un rapport rédigé par la CNDH qui dénonce le recours à la torture par des membres des forces de sécurité.

Amnesty International a appris aujourd’hui que ce rapport a été censuré par les autorités togolaises qui ont publié, à la place, un rapport exonérant les forces de l’ordre de toute responsabilité.

Protestant contre cette censure, la CNDH a rendu public, aujourd’hui, le rapport original et a affirmé à propos du texte publié par le gouvernement : « Ce rapport, maquillé et détourné par les autorités qui ne souhaitent pas le voir publier, dément les contenus initiaux du rapport et exonère de toutes charges les forces de sécurité ».

Le Président de la CNDH, Monsieur Koffi Kounté, qui a reçu récemment des menaces de la part de l’entourage du Chef de l’État liées à la publication de ce rapport, a publiquement précisé qu’il souhaitait que « le rapport initial, attestant de l’existence d’actes de torture faites par les forces de sécurités et fournissant des témoignages des victimes, soit connu de tous ».

Amnesty International s’inquiète de ces manœuvres d’intimidation qui visent des membres de la CNDH et craint que la sécurité des membres de la CNDH et de leurs familles pourrait être menacée en cas de représailles. L’organisation rappelle au gouvernement togolais qu’il doit veiller à ce que les défenseurs des droits humains puissent mener leur action en toute sécurité sans craindre ni menaces ni intimidations.

La CNDH avait ouvert, à la demande du ministre de la Justice, une enquête sur les allégations graves de tortures commises par des membres de l’Agence nationale de renseignement (ANR) qui sont placées sous l’autorité du Chef de l’État. Des enquêteurs de la CNDH ont auditionné une vingtaine de détenus ainsi que des membres de l’ANR et ont conclu que : « Il a été commis sur les détenus des actes de violence physique et morale à caractère inhumain et dégradant ». La CNDH a appelé à ce que les auteurs de ces actes soient sanctionnés de manière exemplaire et que les victimes bénéficient d’une juste réparation et d’un suivi médical approprié.

Les détenus qui ont affirmé avoir été torturées faisaient partie d’un groupe de personnes, pour la plupart des militaires, arrêtées en avril 2009 et accusées d’atteinte à la sûreté de l’État et de rébellion. Parmi elles se trouvaient deux demi-frères du président Faure Gnassingbé, notamment Kpatcha Gnassingbé, ex-ministre de la Défense. Ces personnes ont été jugées en septembre 2011 et certaines d’entre elles ont été condamnées à de lourdes peines de prison sur la base d’« aveux » qui auraient été extorqués sous la torture.

Ce recours à la torture a été publiquement dénoncé par Amnesty International, lors du procès des ces accusés, en septembre 2011 et l’organisation avait demandé l’ouverture d’une enquête indépendante et impartiale. Quelques jours plus tard, le ministre togolais de la Justice confiait cette enquête à la CNDH en affirmant la volonté des autorités de faire la lumière sur ces faits.

Si la CNDH a pu mener son enquête en toute liberté, la décision des autorités de censurer les conclusions accablantes de ce rapport montre bien que l’engagement pris par les autorités de lutter contre la torture et l’impunité ne sont que des promesses en l’air.

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