L’organisation appelle aussi les responsables de l’application des lois à respecter, protéger et faciliter le droit à la liberté de réunion pacifique et à s’abstenir de recourir à la force contre des manifestant·e·s pacifiques. Certains syndicats et autres organisations de la société civile ont promis de se rassembler sur la place Taksim malgré les préparatifs destinés à restreindre la place au moyen de barrières métalliques et les messages publiés ces derniers jours sur les réseaux sociaux [1] par le gouverneur d’Istanbul Davut Gül, qui a déclaré que la zone demeure interdite d’accès. Les 29 et 30 avril, des dizaines de personnes ont été arrêtées chez elles à la veille du 1er mai, dans le cadre d’une action préventive car elles prévoyaient de se rassembler place Taksim.
« Les restrictions imposées aux célébrations du 1er mai sur la place Taksim s’appuient sur des motifs de sécurité et d’ordre public totalement fallacieux et vont à l’encontre de la décision rendue en 2023 par la Cour constitutionnelle. Ces restrictions doivent être levées sans délai, a déclaré Dinushika Dissanayake, directrice régionale adjointe pour l’Europe à Amnesty International.
« La place Taksim revêt une signification symbolique très forte pour les syndicats et les mouvements ouvriers turcs, entre autres, qui s’y rassemblent pour manifester et célébrer. Depuis plus de 10 ans, les autorités turques restreignent illégalement le droit de se réunir pacifiquement et criminalisent les manifestations pacifiques qui se déroulent sur cette place. Il est essentiel que cette année, les célébrations du 1er mai puissent avoir lieu. »
L’interdiction des rassemblements du Premier mai place Taksim remonte à 2013 lorsqu’à plusieurs reprises, la police a empêché avec violence les syndicats, leurs sympathisants et d’autres organisations de se rassembler.
En décembre 2023, la Cour constitutionnelle turque a statué que le droit de réunion pacifique de la Confédération syndicale des ouvriers révolutionnaires (DİSK) avait été bafoué, lors des célébrations du 1er mai place Taksim en 2014 et 2015, par les interdictions et les dispersions énergiques des manifestant·e·s par les forces de l’ordre. En 2013, un arrêt de la Cour européenne des droits de l’homme avait également conclu à une violation par l’État du droit de se réunir pacifiquement du fait des restrictions imposées au rassemblement du 1er mai sur la place Taksim en 2008.
« Les autorités doivent respecter les arrêts contraignants de la Cour constitutionnelle et de la Cour européenne des droits de l’homme, a déclaré Dinushika Dissanayake.
« Les autorités turques, y compris les forces de l’ordre, doivent veiller à s’acquitter de leur obligation s’agissant de permettre la tenue de rassemblements pacifiques. Elles doivent aussi prendre toutes les mesures nécessaires afin de protéger l’exercice de leurs droits par les participant·e·s. »
Complément d’information
Le 20 avril 2025, le gouverneur d’Istanbul Davut Gül a déclaré sur la plateforme de réseaux sociaux X : « Dans un avenir proche, aucune action collective n’est autorisée sur la place Taksim ni sur l’avenue Istiklal pour des raisons de sécurité. »
En 2024, les autorités ont tenté de justifier l’interdiction en affirmant que la localisation de Taksim et la forte circulation rendraient difficile la protection des droits et des libertés, évoquant également des risques d’« attentats terroristes ».
En 2009, le gouvernement a déclaré le 1er mai jour férié officiel et, pour la première fois en 32 ans, des travailleurs et leurs organisations ont pu se réunir pacifiquement sur la place Taksim. La zone a de nouveau été fermée aux manifestations en 2013, soi-disant pour des raisons de sécurité.
En 2023, la Cour constitutionnelle a statué que le fait d’empêcher les célébrations du 1er mai place Taksim constituait une violation du droit constitutionnel d’organiser des réunions et des manifestations publiques, que garantit l’article 34 de la Constitution.
Le 14 mai, Amnesty International publiera ses conclusions sur le recours injustifié et excessif à la force contre les manifestant·e·s pacifiques lors des rassemblements qui ont fait suite à l’arrestation du maire d’Istanbul en mars 2025.