TURQUIE - Justice refusée à deux adolescentes torturées et violées durant leur détention

Index AI : EUR 44/018/2005

Vendredi 22 avril 2005

Amnesty International a appelé la Cour d’appel de Turquie, ce vendredi 22 avril, à réexaminer de toute urgence l’affaire des quatre policiers accusés d’avoir torturé et violé deux adolescentes et qui viennent d’être acquittés, à l’issue d’un procès et d’une enquête remplis d’insuffisances manifestes et retardés à de nombreuses reprises.

« Ce procès dure déjà depuis plus de quatre ans ; il a été repoussé plus d’une trentaine de fois, a déclaré James Logan, chargé de recherche sur la Turquie auprès d’Amnesty International. Qu’il se termine par un non-lieu à ce stade, sur la base d’un argument de droit entièrement fabriqué, est abominable. Justice n’a pas été rendue. »

Les policiers étaient accusés d’avoir fait subir à Nazime Ceren Salmanoglu, alors âgée de seize ans et à Fatma Deniz Polattas, alors âgée de dix-neuf ans, des sévices ; les jeunes filles auraient notamment été violées avec des objets dentelés, frappées, suspendues par les bras et soumises à des « tests de virginité » début mars 1999. Elles auraient été privées de nourriture et de boisson, empêchées de dormir et de se rendre aux toilettes, les policiers les auraient forcées à se déshabiller et à rester nues dans une pièce froide. Les aveux concernant leur appartenance au Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), obtenus sous la torture, ont servi à condamner les deux jeunes femmes à de lourdes peines d’emprisonnement. Nazime Ceren Salmanoglu a été remise en liberté à la fin de l’année dernière en raison de changements intervenus dans le code pénal turc. Fatma Deniz Polattas est toujours en prison.

Le tribunal a prononcé ce vendredi 22 avril un non-lieu dans l’affaire en raison de « preuves insuffisantes », les rapports psychiatriques soumis ne constituant pas des preuves valables selon l’évaluation du Conseil général de l’Institut médico-légal. Ceci est inacceptable pour plusieurs raisons : d’abord et avant tout parce qu’au moins un des médecins du Conseil a déjà été sanctionné pour avoir couvert des actes de torture. En outre, de nombreux membres du Conseil ne sont pas des spécialistes pour ce type d’affaires et, de plus, un comité d’experts de l’Institut avait précédemment déterminé que ces preuves étaient recevables.

La procédure judiciaire a été marquée dès le départ par d’extraordinaires retards et ce n’est qu’après que des expertises psychiatriques poussées eurent corroboré les allégations de torture que le procès a finalement débuté le 14 avril 2000. Il a encore fallu vingt-huit mois pour que soient transmis au tribunal les rapports de l’Institut médico-légal de Turquie.

Amnesty International demande à la Cour d’appel d’infirmer cette décision afin de permettre d’ouvrir une enquête, d’engager des poursuites et de traduire devant la justice les auteurs présumés de ces violences.

« La justice turque a une nouvelle fois failli à son devoir de protection des victimes d’atteintes aux droits humains, a déclaré James Logan. Si la Cour permet que cette décision soit maintenue, elle enverra le message le plus clair jamais émis que l’État cautionne les actes de violence et de brutalité perpétrés par des policiers et membres des forces de sécurité. »

Pour plus d’informations sur le sujet, voir les communiqués de presse suivants :

Turkey : Kurdish girls raped and sexually abused in police custody, du 19 novembre 1999, index AI  : EUR 44/001/1999 (en anglais seulement)
http://web.amnesty.org/library/index/ENGEUR440011999

Turquie - Torture et homicides : une réponse judiciaire insuffisante et inadéquate, du 16 novembre 2004, index AI EUR 44/037/2004
http://web.amnesty.org/library/index/FRAEUR440372004

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