Turquie. La Cour constitutionnelle se prononce en faveur de la dissolution du Parti démocrate de Turquie, pro-kurde


Déclaration publique

Index AI : EUR 44/007/2009 -
ÉFAI - 14 décembre 2009

Amnesty International a fait part de ses vives préoccupations concernant la dissolution du Parti démocrate de Turquie (DTP) en vertu de lois qui ne respectent pas les normes internationales.

Le 11 décembre 2009, les 11 juges de la Cour constitutionnelle ont statué à l’unanimité en faveur de la fermeture de ce parti, au motif qu’il est le point de convergence d’activités portant atteinte à l’indépendance de l’État et à son intégrité indivisible du point de vue du territoire et de la nation. En outre, la Cour a statué que 37 membres de ce parti devaient être interdits de politique pendant cinq ans. Parmi eux figurent deux membres élus du Parlement, le député Ahmet Türk, co-président du DTP, et Aysel Tuðluk, député de Diyarbak ?r, ainsi que quatre maires élus et d’autres responsables et membres du DTP.

L’affaire a été lancée le 16 novembre 2007, lorsque le procureur général de la Cour suprême de cassation a engagé une procédure devant la Cour constitutionnelle. En juillet 2008, le Parti de la justice et du développement (AKP), au pouvoir, avait frôlé la dissolution, au motif qu’il était un point de convergence d’activités antilaïques. Cette plainte n’avait toutefois pas reçu le soutien de la majorité requise des juges. En Turquie, les partis politiques sont fréquemment dissous en application de décisions de la Cour constitutionnelle, et en particulier les partis qui promeuvent l’identité kurde.

En mars 2009, la Commission de Venise du Conseil de l’Europe a émis un avis, selon lequel les dispositions constitutionnelles et législatives relatives à l’interdiction de partis politiques en Turquie ne respectaient pas les normes minimales garanties par l’article 11 de la Convention européenne des droits de l’homme (liberté d’assemblée et d’association). Dans son avis, la Commission notait que ces dispositions législatives autorisent à introduire des requêtes visant à dissoudre presque tous les partis dont le programme prône des modifications du modèle constitutionnel, que ce soit par la menace de la violence ou par des moyens démocratiques pacifiques. La Cour européenne des droits de l’homme a précédemment rendu plusieurs arrêts indiquant que la Turquie avait violé la Convention dans le cadre de dissolutions de partis politiques.

Complément d’information

Le Parti démocrate de Turquie (DTP) a été fondé en 2005 après qu’une requête de dissolution a été présentée contre le Parti démocratique du peuple (DEHAP). Le DTP compte actuellement 21 membres au Parlement national, depuis les élections de 2007, et de nombreux élus locaux.

Les poursuites se fondent sur une infraction aux règles édictées pour les partis politiques dans l’article 68-4 de la Constitution, qui dispose :

« Les statuts, les programmes et les activités des partis politiques ne peuvent aller à l’encontre de l’indépendance de l’État, de son intégrité indivisible du point de vue du territoire et de la nation, des droits de l’homme, des principes de l’égalité et de l’État de droit, de la souveraineté de la nation, ni des principes de la République démocratique et laïque ; ils ne peuvent avoir pour but de préconiser ou d’instaurer la dictature d’une classe ou d’un groupe ni une forme quelconque de dictature ; ils ne peuvent inciter à commettre une infraction. »

La Commission européenne pour la démocratie par le droit, plus connue sous le nom de Commission de Venise, est l’organe consultatif du Conseil de l’Europe sur les questions constitutionnelles. Elle a adopté son Avis sur les dispositions constitutionnelles et législatives relatives à l’interdiction des partis politiques en Turquie lors de sa 78e Session plénière en mars 2009.

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