Communiqué de presse

Turquie. Qu’est-il advenu des manifestants d’Istanbul arrêtés par la police ?

Après les arrestations massives survenues dans la nuit à Istanbul, la police turque refuse de reconnaître qu’elle détient des manifestants, a dénoncé Amnesty International dimanche 16 juin 2013.

Plus d’une centaine de manifestants auraient été arrêtés dans la nuit du 15 juin dans le quartier de la place Taksim, où se concentraient les manifestations, ainsi que dans les quartiers voisins de Mecidiyekoy et Harbiye.

On ignore le nombre exact d’arrestations, mais il est probable qu’il dépasse largement la centaine.

L’Ordre des avocats d’Istanbul a dit à Amnesty International avoir connaissance d’environ 70 noms de personnes qui ont été vues aux mains de policiers mais dont le sort ne peut être confirmé pour l’instant.

« Après une nuit de violences policières effroyables, les autorités refusent maintenant aux manifestants arrêtés les garanties d’une procédure régulière. La police doit libérer ces personnes immédiatement ou révéler où elles se trouvent et leur permettre de prendre contact avec leurs familles et leurs avocats », a déclaré Andrew Gardner, chercheur d’Amnesty International sur la Turquie, qui se trouve actuellement à Istanbul.

Amnesty International a reçu des informations concordantes et crédibles selon lesquelles, dans le contexte des manifestations qui se déroulent depuis près de trois semaines à Istanbul, des manifestants auraient été frappés par des policiers pendant leur arrestation et leur transfert en garde à vue, et privés de nourriture, d’eau et de toilettes jusqu’à 12 heures d’affilée.
Le fait que l’on ignore où se trouvent les manifestants arrêtés renforce les craintes qu’ils ne soient maltraités par la police.

À partir d’environ 20 h 30 heure locale samedi 15 juin, la police est intervenue avec des gaz lacrymogènes, des canons à eau et des grenades incapacitantes contre les manifestants pacifiques de la place Taksim. Andrew Gardner, qui se trouvait sur la place au moment de l’intervention de la police, a confirmé que les manifestants étaient pacifiques et la violence de l’intervention policière injustifiée.

« Les manifestations sont très largement pacifiques et il n’existe aucune raison légitime d’empêcher une quelconque forme de manifestation dans cette zone », a-t-il déclaré.

« Des petits groupes de manifestants scandaient des slogans en différents points de la place Taksim. Les policiers d’abord ont lancé un avertissement, ordonnant aux gens de quitter la place, plus ils ont attaqué les manifestants à au moins deux endroits avec des gaz lacrymogènes, des canons à eau et des grenades incapacitantes pour les contraindre à partir. Les manifestants étaient pacifiques, ils se contentaient de scander des slogans. »

« J’ai vu les policiers utiliser des gaz lacrymogènes et des canons à eau pour évacuer le parc Gezi. Des témoins racontent également que la police a utilisé des balles en plastique et arrêté des médecins qui soignaient les blessés dans les hôpitaux improvisés installés sur place. »

« Toute la nuit, j’ai observé les manifestations place Taksim et dans le quartier voisin de Cihangir, et je n’ai vu aucun acte de violence contre la police de la part des manifestants. En revanche, pendant tout ce temps, les policiers n’ont cessé d’attaquer les manifestants avec des gaz lacrymogènes et des canons à eau. »

On ignore combien de personnes ont été blessées pendant la violente intervention policière de la nuit dans différents quartiers d’Istanbul, mais elles se comptent probablement par centaines. À un moment, les policiers ont tiré des gaz lacrymogènes directement dans un hôpital improvisé installé devant l’hôtel Divan, à Harbiye, où de nombreuses personnes se faisaient soigner.

Le dimanche 16 juin, alors que les violences policières se poursuivaient de façon sporadique dans différents quartiers de la ville, des témoins ont vu des policiers arrêter des médecins qui soignaient des manifestants blessés dans un hôpital improvisé à l’hôtel Ramada, à Osmanbay, près de la place Taksim. Le ministre de la Santé avait auparavant déclaré que ces hôpitaux étaient illégaux et que les médecins qui y exerçaient risquaient des poursuites.

« Il est absolument inacceptable que des médecins soient menacés de poursuites pour avoir soigné des personnes qui en avaient besoin. Ces médecins doivent être libérés immédiatement et toute menace de poursuites à leur encontre doit être levée », a souligné Andrew Gardner.

Ces événements ont fait suite à un immense rassemblement samedi à Ankara, au cours duquel le Premier ministre Recep Tayyip Erdo ?an s’est adressé à ses sympathisants, attaquant les manifestants du parc Gezi et menaçant de recourir à la force pour les évacuer. Un rassemblement similaire est prévu le 16 juin dans l’après-midi à Istanbul. Les manifestants appellent leurs sympathisants à continuer de se rendre sur la place Taksim ce même jour.

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