Communiqué de presse

Ukraine. Le référendum controversé en Crimée a été précédé d’affrontements et d’enlèvements

Des observateurs internationaux des droits humains doivent immédiatement être déployés à travers l’Ukraine, certaines informations faisant état d’une multiplication des actes de violence et des disparitions avant le référendum impromptu de dimanche 16 mars, qui pourrait déboucher sur la sécession de la Crimée, dans le sud du pays, a déclaré Amnesty International.

« Certaines zones du pays connaissent des tensions et basculent dans la violence. Le référendum est imminent, il n’y a donc pas de temps à perdre », a déclaré John Dalhuisen, directeur du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

« Compte tenu des tensions croissantes que connaît le pays et des violences désormais meurtrières qui opposent groupes pro-Ukraine et pro-Russie, il est crucial de lancer une mission robuste de suivi des droits humains et d’autoriser les observateurs à se rendre librement dans toute l’Ukraine, y compris en Crimée. »

L’appel lancé par Amnesty International survient après la mort d’au moins un manifestant lors des violents affrontements entre pro-Russie et pro-Ukraine à Donetsk, dans l’est du pays, et à la suite d’informations faisant état de nouvelles « disparitions » de militants en Crimée.

Cette région, la plus au sud du pays, se coupe peu à peu du reste du monde après que la Russie ait pris le contrôle de la péninsule sur le plan militaire il y a deux semaines.

Des militants « disparaissent » en Crimée

Trois militants ont « disparu » pendant la nuit de jeudi 13 mars à Simféropol, la capitale de la Crimée. Vendredi 14 mars, Amnesty International a parlé au père d’Oleksi Gritsenko, membre du mouvement Automaïdan, qui a « disparu » au même moment que deux autres militants, Natalia Loukiantchenko et Sergui Souproun. Ils se trouvaient tous les trois dans la région depuis la semaine précédente.

Le père d’Oleksi Gritsenko a confirmé à Amnesty International qu’ils n’avaient pas donné de nouvelles depuis jeudi 13 mars à 23 heures, lorsque Natalia Loukiantchenko a téléphoné à d’autres militants pour leur dire que leur voiture était prise en chasse par plusieurs véhicules et qu’ils avaient été visés par des coups de feu.

La géolocalisation a permis de déterminer que les téléphones portables de deux de ces militants se trouvaient à proximité du commissariat militaire de Simférapol, où des soldats en uniforme banalisé tiennent la garde. Les soldats nient détenir ces trois personnes. La voiture des militants n’a pas non plus reparu.

Amnesty International demande aux autorités de Crimée de retrouver immédiatement Oleksi Gritsenko, Natalia Loukiantchenko et Sergui Souproun, et de veiller à ce qu’ils soient libérés immédiatement et sans condition.

« Les informations faisant état d’actes de harcèlement et d’intimidation infligés à des militants et à des journalistes par les forces militaires de facto de la Crimée sont extrêmement inquiétantes, car cela signifie que les violations des droits humains sont déjà monnaie courante », a déclaré John Dalhuisen.

« Nous demandons une nouvelle fois aux autorités de Crimée et à celles qui contrôlent de fait la région sur le plan militaire d’autoriser ceux qui le souhaitent à exercer pacifiquement leurs droits fondamentaux sans avoir à craindre d’actes d’intimidation ni de menaces de violence. »

Non respect de la loi et violences de masse

Pendant que les regards sont braqués sur la Crimée, des violations des droits humains continuent à être commises ailleurs en Ukraine. Amnesty International est également préoccupée par le fait que la police manque à son devoir consistant à protéger de manière adéquate les personnes exerçant pacifiquement leurs droits à la liberté de réunion et d’expression.

Dans la nuit de jeudi 13 mars, au moins un manifestant a été tué et de nombreux autres ont été blessés lorsque des violences ont éclaté entre manifestants pro-Russie et pro-Ukraine à Donetsk, une ville industrielle de l’est du pays.

Quelques jours plus tôt à peine, un délégué d’Amnesty International se trouvait à Donetsk pour observer une autre manifestation et avait noté que si les opérations de maintien de l’ordre ne s’amélioraient pas considérablement, des gens risqueraient d’être blessés voire tués dans le futur.

Un participant au rassemblement de jeudi a déclaré à Amnesty International : « Je ne pense pas que les policiers étaient prêts ou disposés à nous protéger. Après le départ de la plupart des participants, nous avons été agressés. »

Des séquences vidéo filmées à Donetsk jeudi 13 dans la nuit montrent qu’un cordon de policiers séparait les deux camps au début, jusqu’à ce qu’un groupe d’hommes armés de bâtons, de tubes de métal et de couteaux ne forcent ce cordon et ne s’en prennent aux manifestants pro-Ukraine.

La source d’Amnesty International a ajouté que des policiers ont alors dit aux manifestants qui étaient pris pour cible de monter à bord d’un bus de la police, en faisant alors essentiellement des cibles faciles, le bus étant dépourvu de chauffeur et bloqué par deux voitures.

« Les fenêtres [du bus] ont été brisées et beaucoup d’entre nous ont été blessés. Il y avait une vingtaine de policiers à proximité du bus, et des centaines plus loin, et pas un n’est intervenu. Les agresseurs hurlaient " mettez-vous à genoux, à genoux ! " Un des militants gisait par terre, en sang. Trois policiers qui se tenaient à proximité le regardaient et n’ont rien fait pendant un très long moment. »

« Ce qui avait commencé comme une manifestation pacifique à Donetsk a sombré dans la pire violence observée depuis que les affrontements de Maïdan ont mené à un changement de gouvernement à Kiev. Les tensions restent vives, et la police doit respecter et protéger le droit de tous de manifester de manière pacifique », a déclaré John Dalhuisen.

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