Un procès intenté par le président Kadyrov met en lumière les dangers auxquels s’exposent les défenseurs des droits humains

7 octobre 2009

Le procès intenté au défenseur des droits humains Oleg Orlov par le président tchétchène, Ramzan Kadyrov, a permis de mettre en évidence les dangers auxquels s’exposent les militants des droits fondamentaux qui travaillent sur la Tchétchénie, a déclaré Amnesty International ce mercredi 7 octobre.

« En refusant de respecter le travail des organisations indépendantes de défense des droits humains et de reconnaître qu’elles sont essentielles au bon fonctionnement de la société, les autorités ont mis la vie des militants des droits fondamentaux en danger et ont créé un climat de peur », a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

Mardi 6 octobre, à Moscou, un tribunal de district a donné gain de cause au président Kadyrov dans le cadre de l’action en diffamation qu’il avait entamée contre Oleg P. Orlov, président de l’organisation de défense des droits humains Mémorial. Oleg Orlov avait fait une déclaration dans laquelle il accusait Ramzan Kadyrov d’être « responsable » de l’assassinat de la défenseure tchétchène des droits humains Natalia Estemirova. Dans cette déclaration, publiée sur le site web de Mémorial le jour de la mort de cette militante, le 15 juillet, Oleg Orlov avait indiqué : « Nous ne savons pas s’il [Kadyrov] a donné l’ordre lui-même ou si ce sont ses collaborateurs qui l’ont fait pour plaire à leur chef. »

Le tribunal a condamné Oleg Orlov et Mémorial à verser des dommages et intérêts au président Kadyrov et à publier un démenti sur le site web de l’organisation.

Les témoins entendus au cours du procès ont fait part de préoccupations déjà exprimées par Amnesty International et par d’autres organisations non gouvernementales (ONG) de défense des droits humains, qui s’étaient inquiétées du fait que les autorités russes ne prenaient pas assez de mesures pour mettre un terme aux actes de harcèlement et aux agressions violentes visant des militants des droits fondamentaux en Russie et dans le Caucase du Nord.

Les corps de Zarema Sadoulaïeva, défenseure des droits humains, et de son époux, Alik (Oumar) Djabraïlov, ont été retrouvés dans le coffre d’une voiture en août dans la capitale tchétchène, Grozny. Ils avaient tous deux été tués par balle.

Ces homicides ont suivi l’assassinat, le 15 juillet, de Natalia Estemirova, un des membres dirigeants de l’ONG Mémorial. Cette femme a été enlevée à Grozny alors qu’elle se rendait à son travail. Son corps a été retrouvé le jour même en Ingouchie, une république voisine ; il présentait des blessures par balle.

Le travail de Natalia Estemirova, essentiel, consistait à faire état des violations des droits humains – telles que la torture et les autres formes de mauvais traitements, les homicides illégaux et les disparitions forcées – perpétrées dans la région depuis le début du second conflit en Tchétchénie, en 2000. Elle se consacrait également à porter assistance aux personnes déplacées et à d’autres groupes défavorisés.

Le 19 janvier, l’avocat spécialiste des droits humains Stanislav Markelov et la journaliste Anastassia Babourova ont été tués en plein jour dans le centre de Moscou.

Natalia Estemirova et Stanislav Markelov étaient de proches amis d’Anna Politkovskaïa, journaliste et militante des droits humains, elle-même assassinée le 7 octobre 2006 à Moscou. Elle avait fait l’objet de manœuvres d’intimidation et de harcèlement de la part des autorités russes, y compris celles qui exerçaient le pouvoir en Tchétchénie, parce qu’elle critiquait franchement leur politique et leurs agissements.

Après avoir écrit ses premiers articles sur le conflit armé en Tchétchénie et dans le Caucase du Nord en 1999, Anna Politkovskaïa avait été arrêtée et menacée de graves représailles, et même de mort, à plusieurs reprises.

Pour commémorer le troisième anniversaire de la mort d’Anna Politkovskaïa, des actions sont organisées dans de grandes villes d’Europe – Moscou, Saint-Pétersbourg, Londres et Paris.

« Les autorités russes n’ayant toujours pas traduit en justice les auteurs présumés du meurtre d’Anna Politkovskaïa à ce jour, il est indispensable pour la crédibilité de leurs engagements internationaux qu’elles veillent à ce que les investigations sur les homicides de défenseurs des droits humains soient approfondies et impartiales. », a déclaré Nicola Duckworth.

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