Viêt-Nam : Il faut enquêter sur les informations faisant état de violences dans une carrière

Les autorités vietnamiennes doivent ordonner une enquête approfondie sur les allégations selon lesquelles des gardes assurant la protection d’une carrière dans la province de Yen Bai, dans la commune de Lâm Thượng, ont agressé physiquement des membres locaux de la population autochtone Tay, rassemblés pour protester contre des opérations minières et leurs impacts négatifs sur l’environnement.

Le 27 septembre, des centaines de personnes de cette commune du nord du Viêt-Nam se sont rassemblées pour protester contre la carrière de marbre de RK Viet Nam qui, selon eux, pollue leur seule source d’eau potable pour les cultures et l’usage domestique, et serait responsable de la mort d’un grand nombre de volailles et de poissons.

Les villageois se sont dits inquiets quant au déplacement de gros rochers au cours des opérations, une menace pour les villages de la communauté Tay situés juste au-dessous de la carrière, car le déplacement de rochers plus petits a déjà causé des dommages. En outre, le peuple Tay considère depuis fort longtemps la montagne de laquelle est extrait le marbre comme un gardien spirituel de la région et de ses populations.

En réaction, les gardiens de sécurité employés par une entreprise privée travaillant pour le compte de la société indienne RK Vietnam ont agressé les manifestants pacifiques à coups de fusils, de matraques et d’aiguillons à électrochocs. Selon les médias, au moins 11 habitants Tay – des hommes, des femmes et des enfants – ont été blessés. Une vidéo de cette attaque témoigne de la présence de policiers de la brigade d’intervention rapide, ce qui pose la question de savoir pourquoi ils ne sont pas intervenus pour mettre fin aux violences.

Les gardiens de sécurité employés par une entreprise privée travaillant pour le compte de la société indienne RK Vietnam ont agressé les manifestants pacifiques à coups de fusils, de matraques et d’aiguillons à électrochocs. Selon les médias, au moins 11 habitants Tay – des hommes, des femmes et des enfants – ont été blessés.

Au cours des semaines qui ont suivi, les autorités locales du district de Lục Yên ont ordonné à la compagnie minière de suspendre ses opérations et d’entamer des négociations avec la population. Des militants locaux ont signalé avoir reçu chez eux la visite de policiers, qui ont exigé qu’ils suppriment leurs posts sur les réseaux sociaux publiés durant et après l’événement. Le 4 octobre, le président de district Bùi Văn Thịnh a publié une déclaration officielle ordonnant à la police locale de recueillir des informations sur ceux qui ont publié sur Facebook des posts sur l’événement.
Des vidéos et des photos prises par des personnes présentes sur les lieux et fournies aux organisations locales de défense des droits humains et à Amnesty International semblent corroborer les informations sur les violences du 27 septembre.

Au regard de ces affirmations crédibles, les autorités compétentes doivent ouvrir une enquête sur cette attaque présumée contre des civils afin d’établir sans délai les faits dans cette affaire. Le gouvernent vietnamien doit aussi prendre des mesures concrètes afin d’évaluer et de prendre dûment en compte les impacts de la mine et de la carrière sur l’environnement et les droits humains, et de fournir des réparations ou, lorsque cela n’est pas possible, une compensation juste et équitable pour les terres et l’héritage culturel accaparés ou endommagés sans le consentement libre, préalable et éclairé de la population autochtone Tay.

ComplÉment d’information

Les catastrophes environnementales et les autres impacts écologiques négatifs préoccupent de plus en plus la population au Viêt-Nam, les actions militantes prenant désormais des proportions inédites, à la fois en termes de fréquence et de nombre de personnes impliquées. C’est en avril 2016 qu’a eu lieu la pire catastrophe écologique au Viêt-Nam : les rejets toxiques provoqués par Formosa. Des rejets massifs de l’aciérie taïwanaise ont en effet dévasté les provinces côtières du centre du pays, à savoir les provinces de Nghệ An, Hà Tĩnh, Quảng Bình, Quảng Trị et Thừa Thiên-Huế, tuant quelque 115 tonnes de poissons et détruisant les moyens de subsistance d’environ 270 000 pêcheurs et employés du secteur touristique dans les provinces du centre.

L’enquête menée par le gouvernement a confirmé qu’une aciérie de l’entreprise taïwanaise Formosa Plastics Group, située dans la province de Hà Tĩnh, avait rejeté des déchets toxiques dans les eaux côtières. Fin juin 2016, Formosa s’est excusée publiquement et a annoncé qu’elle verserait 500 millions de dollars américains à titre d’indemnisation. Cependant, les personnes affectées par la catastrophe estiment que cette somme est insuffisante au vu de l’impact subi et de la perte de leurs moyens de subsistance.

Alors que les manifestations et les appels à la transparence et à l’obligation de rendre des comptes sur les questions écologiques se poursuivent au-delà de la catastrophe de Formosa, les autorités répondent par des menaces, des actes de harcèlement, des poursuites, des actes d’intimidation et des violences physiques à l’encontre des personnes qui participent à des manifestations et à la coordination et au dépôt des plaintes. Les défenseurs des droits humains et les militants engagés dans l’organisation des manifestations sont de plus en plus souvent pris pour cibles. Hoàng Đức Bình, leader local de la province de Nghe An, a été arrêté, poursuivi, inculpé et condamné à 14 ans de prison parce qu’il a aidé des habitants à formuler auprès des autorités locales des revendications pacifiques pour qu’elles enquêtent de manière responsable sur la catastrophe et soutiennent les communautés touchées.

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