ZIMBABWE. Alors que la police censure des expositions d’art, le Zimbabwe doit ouvrir le débat sur les atteintes aux droits humains passées

COMMUNIQUÉ DE PRESSE
ÉFAI-30 mars 2010

Amnesty International a demandé au gouvernement du Zimbabwe ce mardi 30 mars 2010 de mettre fin à la répression qui vise le débat public sur les violations des droits humains passées et présentes, alors qu’un artiste reconnu a été placé en détention en raison de son travail dépeignant les atrocités commises dans les années 1980.

Owen Maseko a été interpellé le 26 mars après avoir participé à une exposition à la National Art Gallery de Bulawayo, qui dépeignait les atrocités, désignées sous le nom de Gukuruhundi, commises dans la région du Matabeleland dans l’ouest du Zimbabwe durant les années 1980, qui ont fait des milliers de victimes, principalement imputables aux forces de sécurité de l’État.

L’artiste, inculpé en vertu de la Loi relative à l’ordre public et à la sécurité d’« atteinte à l’autorité du président », d’« incitation à la violence publique » et d’« insulte aux personnes appartenant à une tribu, une race ou une religion particulières », a été libéré sous caution mardi 30 mars 2010. Il doit se présenter à un poste de police tous les vendredis.

« Le président Robert Mugabe et le Premier ministre Morgan Tsvangirai doivent afficher leur volonté de mettre fin aux atteintes aux droits humains au Zimbabwe en condamnant publiquement les actions policières visant à museler les militants. Toutes les charges retenues contre Owen Maseko doivent être abandonnées immédiatement et sans condition, a estimé Erwin van der Borght, directeur du programme Afrique d’Amnesty International.

« Les arrestations arbitraires, les détentions illégales et les mesures de harcèlement et d’intimidation restreignent les activités des militants qui exercent leur droit à la liberté d’expression et contribuent au processus de réconciliation nationale, comme le prévoit l’Accord politique global. »

Cet accord, signé par les trois principaux partis politiques du Zimbabwe en septembre 2008, reconnaît qu’il faut mettre en œuvre la « réconciliation nationale, la cohésion et l’unité dans le respect des victimes des conflits politiques antérieurs et postérieurs à l’indépendance » et créer « un environnement empreint de tolérance et de respect parmi les Zimbabwéens ».

Par ailleurs, le harcèlement permanent qu’infligent les policiers zimbabwéens aux défenseurs des droits humains a contraint deux éminents militants, dont une syndicaliste, à quitter le pays.

Okay Machisa, directeur national de l’association des droits de l’homme au Zimbabwe (ZimRights), a fui le pays après avoir été détenu par la police le 23 mars pour son rôle dans la coordination d’une exposition à la galerie Delta, à Harare, qui a été annulée en raison du harcèlement répété infligé par les policiers.

La police a saisi pas moins de 65 photographies, dont certaines présentaient des victimes de la violence politique au Zimbabwe en 2008. Ces photographies ont dû être restituées sur décision de la Haute cour.

Les délégués d’Amnesty International ont vu les policiers revenir à la galerie après l’inauguration. Ils ne sont partis qu’après avoir renoncé à trouver Okay Machisa, qui s’était réfugié dans la clandestinité.

Trois camions de policiers seraient ensuite revenus et certains seraient restés toute la nuit, tandis qu’un groupe tentait de pénétrer dans les locaux de ZimRights.

Une autre militante des droits humains de renom, Gertrude Hambira, secrétaire générale du Syndicat général des travailleurs agricoles et des plantations du Zimbabwe (GAPWUZ), a été contrainte de se cacher pour la deuxième fois en six mois, la police ayant effectué une descente dans les locaux de son syndicat le 24 février 2010.

Le harcèlement qu’infligent en permanence les policiers au personnel de GAPWUZ a contraint la syndicaliste à se réfugier hors du pays.

« Nous sommes extrêmement préoccupés par le fait qu’en l’espace de quelques mois deux éminents défenseurs des droits humains ont été forcés de quitter le Zimbabwe parce qu’ils ont voulu débattre des atteintes aux droits humains passées et présentes, a indiqué Erwin van der Borght.

« Les récentes mesures policières ciblant des militants des droits humains mine la crédibilité du gouvernement d’union nationale sur la scène internationale et perpétue la crainte de voir se renouveler les violations des droits fondamentaux commises par le passé. »

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