L’alerte diffusée par la police zimbabwéenne à la télévision d’État, selon laquelle l’éminente défenseure des droits humains Jestina Mukoko était en cavale pour échapper à la justice est un nouveau pas franchi dans le cadre de la répression qui vise la dissidence, a déclaré Amnesty International.
Dans la soirée du jeudi 7 mars, la télévision officielle du Zimbabwe a diffusé deux annonces insinuant que Jestina Mukoko, directrice du Projet de paix pour le Zimbabwe (ZPP), avait pris la fuite et exhortant toute personne susceptible de savoir où elle se trouvait à contacter la police.
Jestina Mukoko, qui se trouvait chez elle au moment de la diffusion de ces annonces, s’est rendue de son plein gré, le 8 mars au matin, au poste de police central de Harare. Elle a été inculpée de plusieurs chefs, avant d’être relâchée sous la garde de ses avocats.
« Il est consternant qu’en cette période critique, où le Zimbabwe est en passe d’adopter une nouvelle Constitution plus vigoureuse en ce qui concerne la défense des droits humains, ceux qui défendent ces droits fassent l’objet d’attaques systématiques, a indiqué Noel Kututwa, directeur pour l’Afrique australe à Amnesty International.
« L’utilisation des médias étatiques pour présenter Jestina Mukoko comme une sorte de fugitive est un nouvel acte fort regrettable du gouvernement. »
Jestina Mukoko a été inculpée de plusieurs chefs, notamment de diriger une association privée qui n’est pas enregistrée au titre de la Loi relative aux organisations bénévoles privées. Le Projet de paix pour le Zimbabwe (ZPP) est enregistré auprès de la Haute Cour par un acte de fiducie, comme la plupart des organisations de défense des droits humains au Zimbabwe.
Début février, des policiers ont pris d’assaut les bureaux de ZPP en présentant un document les autorisant à perquisitionner les lieux, à la recherche « de documents subversifs et de migrants en situation irrégulière ». Ils ont confisqué du matériel et des documents relatifs au projet, quatre smartphones et 80 récepteurs radio à énergie solaire ou à manivelle.
Le 19 février, la police a annoncé l’interdiction des radios à ondes courtes au Zimbabwe. On ignore sur quel texte de loi repose cette interdiction et comment elle sera appliquée.
Cependant, à la suite de cette mesure, la police a fouillé les locaux de Radio Dialogue à Bulawayo, saisi 180 postes et inculpé Zenzele Ndebele, le directeur de la radio, en vertu de la section 182 de la loi relative aux douanes.
L’interdiction portant sur les postes radios à ondes courtes est considérée comme une manœuvre de la police visant à restreindre l’accès à des sources d’information diversifiées, alors que le pays s’apprête à se rendre aux urnes lors du référendum constitutionnel du 16 mars et lors d’une possible élection au mois de juillet.
« Il est temps d’en finir avec les comportements répressifs des forces de sécurité au Zimbabwe et avec les méthodes sournoises visant à incriminer les défenseurs des droits humains, a estimé Noel Kututwa.
« Le référendum prévu le 16 mars et les élections qui suivront doivent se dérouler dans un climat respectueux des droits humains et des libertés fondamentales. »