Zimbabwe. Les victimes des violences ne peuvent plus se permettre d’attendre une solution politique

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI

(Johannesburg) Amnesty International rend publics ce vendredi 31 octobre un rapport et des images vidéo qui montrent de façon saisissante les souffrances qu’endure la population zimbabwéenne tandis que les trois principaux politiques bataillent pour former un gouvernement de coalition.

Chaque nouvelle journée qui s’écoule sans qu’une solution politique n’ait été trouvée voit les conditions de vie des citoyens de ce pays devenir de plus en plus désespérées , a déclaré depuis Johannesburg Simeon Mawanza, spécialiste du Zimbabwe à Amnesty International.

Le rapport d’Amnesty International Zimbabwe – Time for Accountability examine l’impact sur la population des violences qui ont suivi les élections, et contient des recommandations à tous les partis participant aux négociations politiques en cours pour mettre fin à l’impunité qui mine le pays depuis des décennies.

Nous sommes préoccupés par le fait que les droits humains n’ont pas été au cœur du processus de négociation. Les pourparlers devraient porter avant tout sur la justice et les secours à apporter à ceux qui en ont besoin. La population vit dans une situation précaire et ne peut pas se permettre d’attendre la fin des querelles politiques.

Pendant que les partis continuent de négocier des détails politiques, la population la plus vulnérable est de plus en plus confrontée à la famine. De nombreux Zimbabwéens ne survivent désormais qu’en mangeant des fruits sauvages.

La saison des pluies s’annonce et des dizaines de milliers de fermiers victimes des récentes violations des droits humains cautionnées par l’État risquent de nouveau de mauvaises récoltes.

La communauté internationale, et en particulier les dirigeants de l’Afrique australe, ne peut pas rester les bras croisés en regardant les Zimbabwéens sombrer de plus en plus dans la pauvreté et le désespoir tandis que leurs dirigeants politiques se querellent.

La création d’un gouvernement de coalition est l’occasion de mettre fin l’impunité qui règne de longue date dans le pays pour les violations des droits humains, et de faire entrer le respect des droits humains dans la culture nationale , a ajouté Simeon Mawanza.

La plupart des victimes de la violence politique dans les zones rurales étaient des paysans pratiquant une agriculture de subsistance qui leur permettait de nourrir leur famille. Ils ont eu les bras et les jambes brisés par les coups et la torture ; incapables de faire les travaux agricoles pour la saison à venir, ils vont dépendre de l’aide alimentaire, peut-être jusqu’à la fin de leurs jours.

La situation alimentaire au Zimbabwe est mauvaise aujourd’hui, mais elle sera pire encore à la fin de l’année quand la moitié de la population risque d’avoir besoin d’aide , a déclaré Simeon Mawanza.

Lyn, paysanne âgée de 86 ans, nourrissait toute sa famille en cultivant ses champs. Elle a été agressée en juillet parce qu’elle n’avait pas assisté aux réunions de la ZANU-PF. Des vétérans l’ont blessée au dos et lui ont cassé un bras. Maintenant, je suis handicapée, a-t-elle dit à Amnesty International. Je ne peux plus travailler dans les champs. Je veux recevoir une compensation pour ces blessures. Je veux que [ceux qui m’ont attaquée] soient traduits en justice.

Alors que les agresseurs étaient identifiables, personne n’a eu à rendre des comptes pour les violations flagrantes des droits humains – y compris des coups et des actes de torture – qui ont été commises au moment des élections.

La grande majorité des victimes interrogées par Amnesty International ont dit connaître le nom de leurs agresseurs, dont la plupart étaient des membres des forces de sécurité, des vétérans ou des militants locaux de la ZANU-PF. Le fait que leurs agresseurs n’aient pas essayé de dissimuler leur identité montre à quel point ils étaient sûrs de ne jamais avoir à rendre de comptes.

Les violences qui ont eu lieu à la suite des élections de mars étaient cautionnées par l’État, et l’identité de ceux qui les ont commises est bien connue. Un grand nombre des auteurs de ces violations faisaient partie des forces de sécurité et n’ont rien fait pour s’en cacher. Ils se déplaçaient souvent dans des véhicules du gouvernement.

Depuis 2000, le gouvernement issu de la ZANU-PF ne tient aucun compte des violations commises, exonérant de toute obligation de rendre des comptes les auteurs de ces violences, qui sont convaincus de ce fait qu’ils peuvent continuer à se comporter de la sorte, a déclaré Simeon Mawanza. La priorité du nouveau gouvernement devra être de mettre fin à ces violations.

En reconnaissant le droit à réparation des victimes, qui doivent pouvoir bénéficier d’indemnités, connaître la vérité et voir les auteurs des violations déférés à la justice, les autorités montreront que désormais les différends politiques ne seront plus résolus par les coups ou la torture au Zimbabwe.

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