ZIMBABWÉ - Violente vague de répression : des milliers d’expulsions forcées et d’arrestations

Index AI : AFR 46/012/2005

« Quand je suis arrivé, j’ai pleuré. Ils étaient tous dehors [...] devant leurs maisons détruites [...] les enfants criaient, des malades agonisaient. »
Récit d’un témoin décrivant la scène à la suite d’une vague d’expulsions au Zimbabwe

À l’heure où l’envoyé spécial des Nations Unies, James Morris, est en visite au Zimbabwe pour y parler des graves pénuries de nourriture qui frappent le pays, Amnesty International a appelé le gouvernement zimbabwéen à mettre immédiatement un terme à la vague d’expulsions forcées qui a laissé des populations entières sans logement et a détruit les moyens de subsistance de milliers de familles.

Au cours de ces deux dernières semaines, le gouvernement zimbabwéen a organisé l’expulsion forcée de milliers de vendeurs à la sauvette et de familles vivant dans des logements de fortune dans tout le pays, dans le cadre d’une vaste opération de répression dénommée « Opération Murambatsvina » - ce qui est généralement traduit par « élimination des déchets », même si la police parle d’une « opération de restauration de l’ordre ».

Ces expulsions sont réalisées sans avertissement préalable et sans décision judiciaire, en violation flagrante de la procédure légale et des principes du droit. En outre, les policiers et les autres membres des forces de sécurité recourent abusivement à la force, brûlant des maisons, détruisant des biens et malmenant les habitants.

Dans la nuit du jeudi 26 mai 2005, plus de 10 000 personnes ont ainsi été chassées de leurs maisons de fortune installées dans le quartier de Hatcliffe Extention, au nord de Harare. La police aurait détruit les maisons, laissant ces familles totalement démunies et contraintes de dormir dehors au cœur de l’hiver zimbabwéen. Beaucoup des personnes expulsées avaient été installées à Hatcliffe Extension par le gouvernement.

« On nous a décrit des scènes déchirantes de gens pleurant dans la rue, totalement incrédules devant leur maison et leurs moyens de subsistance entièrement détruits », a déclaré Kolawole Olaniyan, directeur du programme Afrique d’Amnesty International. « On nous a même raconté que les policiers avaient forcé certaines personnes à détruire elles-mêmes leur propre maison. »

« Amnesty International est consternée par cette violation flagrante des droits humains internationalement reconnus. Les expulsions forcées - sans procédure légale, protection juridique, réparation ni mesures appropriées de relogement - sont totalement contraires au droit international relatif aux droits humains. »

Des milliers de personnes - principalement des vendeurs à la sauvette - ont été arrêtées dans le cadre de cette répression, au motif qu’elles exerçaient un commerce illégal. Leurs marchandises ont été détruites ou saisies - même si beaucoup avaient semble-t-il une autorisation d’exercer. Des avocats des droits humains engagent maintenant des actions en justice au nom de ces vendeurs, dont la plupart ont dû payer des amendes pour être libérés.

« La fermeture forcée des commerces informels - seul moyen de subsistance possible pour beaucoup de Zimbabwéens dans ce pays à l’économie détruite - a entraîné des milliers de personnes dans une situation de vulnérabilité croissante, ce qui est particulièrement inquiétant compte tenu de l’ampleur de la pauvreté et des pénuries alimentaires qui frappent déjà le Zimbabwe. »

« Le gouvernement zimbabwéen agit en violation flagrante des droits civils, politiques, économiques et sociaux garantis par la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples - et d’autres personnes risquent d’être blessées ou de se retrouver sans logement si les expulsions forcées se poursuivent », a déclaré Kolawole Olaniyan.

« Nous appelons le gouvernement à mettre un terme immédiatement aux expulsions forcées. Ceux qui ont été expulsés de force et dont les biens ont été détruits devraient bénéficier d’une protection juridique exhaustive, recevoir réparation et être indemnisés », a-t-il ajouté. « Le gouvernement doit aussi veiller de toute urgence à ce que toutes les personnes expulsées disposent d’un abri, de nourriture et d’eau potable. »

Complément d’information

En septembre 2004, Amnesty International a dénoncé la tentative d’expulser de force plusieurs milliers de personnes de Porta Farm, quartier composé d’habitations de fortune à la périphérie de Harare. Lors de cette opération, la police, qui agissait au mépris d’une décision de justice interdisant ces expulsions, aurait fait un usage abusif du gaz lacrymogène contre les habitants.

Selon des témoins, les policiers ont envoyé du gaz lacrymogène directement à l’intérieur des maisons de Porta Farm. Au moins 11 personnes sont mortes dans les semaines qui ont suivi. Amnesty International n’a cessé de demander l’ouverture d’une enquête exhaustive sur ces événements et sur les décès qui ont suivi, mais, à sa connaissance, aucune enquête n’a été menée.

Amnesty International craint fortement que le quartier de Porta Farm ne soit de nouveau visé dans le cadre de l’opération de « nettoyage » qui est en cours.

Pour plus d’informations, voir les documents d’Amnesty International sur le Zimbabwe :
http://web.amnesty.org/library/fra-zwe/index.

Pour obtenir de plus amples informations, veuillez contacter le Service de presse d’Amnesty International, au 02 543 79 04, ou consulter les sites http://www.amnesty.be et http://www.amnesty.org.

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