#BelgianArms : Il faut une Commission d’enquête parlementaire

Suite à la parution dans divers médias des résultats d’une enquête révélant l’utilisation d’armes belges par l’Arabie saoudite dans le conflit au Yémen, Amnesty International demande que toute la lumière soit faite et dénonce l’irresponsabilité de la Région wallonne dans ses exportations d’armes à des pays qui commettent des crimes de guerre, en violation flagrante de ses engagements internationaux et de sa propre législation.

Selon cette enquête, des armes et de l’équipement militaire wallons, comme des fusils d’assaut FN F2000 fabriqués par la FN-Herstal, des tours d’artillerie conçues par CMI Defence et des munitions M678 HE-T produites par l’entreprise Mecar, sont en effet utilisés au Yémen où l’organisation a documenté de nombreux crimes de guerre.

« Outre la présence de ces armes, l’information selon laquelle les soldats de la Garde nationale seraient actifs sur le terrain yéménite avec de l’équipement militaire wallon nous inquiète particulièrement. En effet, Willy Borsus a toujours garanti que ces derniers ne menaient aucune opération militaire en dehors de l’Arabie saoudite et qu’il n’y avait dès lors aucun risque de voir les armes wallonnes se retourner contre les populations au Yémen », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.

Étant donné la gravité des faits, l’organisation de défense des droits humains appelle à la mise en place d’une Commission d’enquête parlementaire pour que toute la lumière soit faite, notamment sur les avis qui ont été rendus par la Commission qui a permis que des licences d’exportations d’armes vers l’Arabie saoudite soient octroyées par le ministre-président qui en a la compétence exclusive.

« À plusieurs reprises, nous avons alerté les différents gouvernements wallons qui octroient depuis plusieurs années des licences d’exportation d’armes à destination de l’Arabie saoudite sur les risques de les voir utilisées pour commettre des violations du droit international humanitaire au Yémen, et de se mettre ainsi en contradiction flagrante avec le Traité sur le commerce des armes, qui impose notamment le principe de précaution », indique Philippe Hensmans.

« Outre la présence de ces armes, l’information selon laquelle les soldats de la Garde nationale seraient actifs sur le terrain yéménite avec de l’équipement militaire wallon nous inquiète particulièrement »

Amnesty International a en outre régulièrement rappelé aux autorités wallonnes les obligations découlant du Décret wallon de 2012 relatif à l’importation, au transit et au transfert d’armes civiles et de produits liés à la défense, qui lui impose de ne pas exporter des armes « s’il existe un risque manifeste que la technologie ou les équipements militaires dont l’exportation est envisagée servent à la répression interne ou s’il existe suffisamment d’indications à l’égard d’un pays destinataire donné que l’exportation y contribuera à une violation flagrante des droits de l’homme ».

« Nous avons par ailleurs dénoncé à plusieurs reprises l’opacité de la procédure d’octroi des licences d’exportation d’armes wallonnes caractérisée par le manque d’implication du Parlement, qui échoue à contrebalancer le pouvoir discrétionnaire du gouvernement, uniquement guidé par une commission d’avis dont il règle lui-même le fonctionnement. Le rôle de la sous-commission « armes » du Parlement wallon est réduit à celui d’une banale chambre d’enregistrement des décisions prises par le gouvernement », explique encore Philippe Hensmans.

Parallèlement, la section belge francophone d’Amnesty International soutient la plainte pénale introduite par la Coordination nationale d’action pour la paix et la démocratie (CNAPD) et la Ligue des Droits Humains (LDH) contre les entreprises qui ont illégalement exporté du matériel militaire à destination de l’Arabie saoudite et la demande d’information auprès des douanes et du Ministre fédéral.

Complément d’information

En février dernier, Amnesty International a publié les résultats d’une enquête révélant que des mitrailleuses Minimi, fabriquées par la FN Herstal, avaient été utilisées lors de l’offensive contre al Hodeïda par les « Brigades des Géants », une milice yéménite soutenue et financée par les Émirats arabes unis, pays membre de la coalition menée par l’Arabie saoudite.

L’Arabie saoudite, à qui la Région wallonne continue de transférer des armes, est responsable de graves violations des droits humains sur son propre territoire et de crimes de guerre au Yémen, où la coalition qu’elle dirige prend pour cible des infrastructures civiles, telles que des écoles, des mosquées, des hôpitaux, etc. Elle a par ailleurs imposé au pays un blocus maritime et aérien restreignant l’accès à l’aide humanitaire ainsi que l’importation de biens de première nécessité.

Malgré le vote d’un embargo sur les ventes d’armes à l’Arabie saoudite au Parlement fédéral, le Ministre-président de la Région wallonne a pris la décision en octobre 2017 d’octroyer 28 nouvelles licences en faveur de Riyad. En conséquence, en décembre de la même année, un recours en suspension et en annulation contre les licences accordées en 2017 à l’Arabie saoudite a été déposé au Conseil d’État par la Ligue des droits de l’homme et la Coordination nationale d’action pour la paix et la démocratie, soutenues par Amnesty International.

En juin 2018, le Conseil d’État a donné raison aux requérants en suspendant les licences pour les armes n’ayant pas encore été expédiées en Arabie saoudite, démontrant que la Région wallonne avait manqué à ses obligations quant au respect de plusieurs critères du Décret wallon.

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