L’élimination de la pratique du torchage du gaz est l’une des mesures les plus immédiates et les plus essentielles qui doivent être prises pour faire face à la crise climatique qui touche le plus durement les communautés historiquement marginalisées des zones sacrifiées, déclare Amnesty International dans un nouveau rapport rendu public le 12 août.
Ce rapport, intitulé “Arde la Amazonía, arde el futuro” Jóvenes activistas que defienden la Amazonía ecuatoriana de los mecheros que amenazan los derechos en el presente y el futuro révèle que l’État équatorien manque à son devoir de réduire les émissions de gaz à effet de serre en autorisant le torchage en Amazonie. Bien qu’une décision de justice rendue en 2021 à la suite d’une action engagée par neuf très jeunes militantes climatiques des communautés de Sucumbíos et Orellana, avec le soutien de l’Union des personnes touchées par les activités de Texaco (UDAPT), ait ordonné l’élimination des torchères, l’État équatorien continue de permettre cette pratique nuisible de l’industrie des combustibles fossiles. Cette activité est également directement liée au réchauffement de la planète et à l’émission de super-polluants tels que le méthane, ce qui met en danger l’exercice et la protection des droits humains aujourd’hui et dans le futur.
Amnesty International a constaté que l’État équatorien n’a pas pleinement respecté la décision rendue dans l’affaire des « Mecheros » (torchères) le 29 juillet 2021 par la Cour provinciale de justice de Sucumbíos. Cette décision dispose que les torchères, exploitées par l’entreprise publique et aussi par des entreprises privées, doivent être progressivement éliminées, la priorité étant donnée à la suppression de celles qui se trouvent à proximité de sites habités.
« Le respect de cette décision constituerait un acte de justice climatique, environnementale et raciale »
Cependant, les témoignages recueillis, les documents analysés et la vérification des informations sur le terrain, présentés dans le rapport, révèlent que l’État équatorien et ses institutions compétentes en matière d’énergie n’ont jusqu’à présent pris que des mesures qui favorisent le maintien de la production pétrolière à tout prix, évitant d’entreprendre des démarches concrètes et ambitieuses visant à l’élimination des torchères et à créer les conditions d’une transition énergétique rapide et juste.
« Les autorités équatoriennes ont l’obligation d’agir immédiatement et de manière énergique pour mettre en œuvre de toute urgence la décision rendue dans l’affaire des torchères à la suite de l’action en justice intentée par les neuf jeunes requérantes et par l’UDAPT. Le respect de cette décision constituerait un acte de justice climatique, environnementale et raciale. L’État équatorien doit éliminer la pratique du brûlage habituel du gaz naturel dans les torchères, pratique qui met actuellement en danger l’Amazonie, le reste du monde et l’avenir des enfants qui hériteront de la terre », a déclaré Ana Piquer, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
Les répercussions négatives du torchage du gaz sur les droits humains et sur l’environnement, et la contribution de cette pratique au réchauffement climatique ont été largement reconnues par la communauté internationale et la communauté scientifique.
« En éliminant les torchères et en s’engageant à passer à une économie qui ne dépendrait plus des combustibles fossiles, l’Équateur peut devenir un pays porte-flambeau de la justice climatique »
En conséquence, des initiatives ont été prises de par le monde pour éliminer les torchères et certains pays ont interdit et réglementé cette pratique. Cependant, sur le continent américain, des pays tels que l’Équateur, les États-Unis, le Mexique, l’Argentine, le Brésil et le Venezuela utilisent régulièrement les torchères pour l’extraction du pétrole. De manière générale, les entreprises publiques et privées utilisent les torchères afin de réduire les coûts d’exploitation dans les zones socialement et environnementalement vulnérables, connues sous le nom de « zones sacrifiées », où la marginalisation et la pauvreté s’ajoutent à la dégradation de l’environnement résultant de l’activité extractive.
« En éliminant les torchères et en s’engageant à passer à une économie qui ne dépendrait plus des combustibles fossiles, l’Équateur peut devenir un pays porte-flambeau de la justice climatique et environnementale pour le plus grand bien de la planète présentement et à l’avenir. La « richesse » apportée par le pétrole n’a jamais bénéficié à l’Amazonie équatorienne qui est en revanche une grande zone sacrifiée sur l’autel du pétrole et où les jeunes, comme les jeunes filles de l’affaire des torchères, représentent l’une des populations les plus vulnérables » – Ana Piquer, directrice pour les Amériques à Amnesty International.
Selon la Banque mondiale, l’Équateur fait partie des 30 pays au monde qui utilisent le plus le brûlage du gaz dans les torchères, et en les maintenant allumées, il perpétue une terrible pratique qui met en danger la vie, la santé et d’autres droits encore des populations les plus pauvres du pays.
Amnesty International a constaté qu’au moins 52 torchères se trouvent à moins de cinq kilomètres de zones habités, ce qui est potentiellement dangereux pour les populations locales et l’environnement.
L’Équateur est un pays dont l’économie a été historiquement fondée sur l’extraction de pétrole
En maintenant et en protégeant l’activité des torchères et en ne mettant pas en œuvre les solutions de remplacement existantes, en plus de ne pas respecter une décision de justice, l’État équatorien manque à ses engagements internationaux concernant la réduction des émissions de gaz à effet de serre et crée des conditions permettant l’émission de super-polluants tels que le méthane, qui contribuent à l’aggravation du réchauffement de la planète.
L’Équateur est un pays dont l’économie a été historiquement fondée sur l’extraction de pétrole. Il a donc dans la région la responsabilité et une opportunité importante de réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par ce secteur et de jeter les bases d’une transition énergétique rapide et juste, afin de ne pas continuer à contribuer à l’aggravation des dommages causés au système climatique mondial.
Étant donné que les dommages anthropiques causés au système climatique mondial par les émissions de gaz à effet de serre sont cumulatifs, la poursuite de pratiques inutiles et pernicieuses telles que le brûlage systématique du gaz dans des torchères implique pour l’Équateur un manquement à son devoir d’atténuer les dommages et de protéger les droits humains dans le contexte du changement climatique, qui met en danger les personnes et l’avenir de l’humanité.
« Les courageuses jeunes plaignantes de l’affaire des torchères, maintenant appelées les « combattantes pour l’Amazonie », nous montrent que les enfants et les jeunes à travers le monde exigent la justice climatique, raciale et de genre de toute urgence, ainsi que des changements radicaux en faveur des droits humains et de la nature » – Ana Piquer, directrice pour les Amériques à Amnesty International.