La création récente du Bureau du Procureur spécialisé dans les féminicides à San Luis Potosí est une victoire pour les familles des victimes de féminicides. Grâce à leur ténacité et à leur organisation, elles ont obtenu ce grand succès dans leur lutte ardue pour l’accès à la vérité, à la justice et à la réparation intégrale, pour elles et pour toutes les femmes victimes de féminicides dans cet État.
L’annonce de la création de ce Bureau spécialisé du Procureur a été faite par la publication de l’accord 002/2023 au Journal officiel de l’État le vendredi 13 janvier 2023. Pour rappel, la proposition de création de ce bureau avait été formulée par les familles des victimes de féminicides, après que le Bureau du Procureur général de l’État de San Luis Potosi (FGESLP) ait décidé de la fermeture de l’Unité spécialisée multidisciplinaire et itinérante sur le genre (Unidad Especializada, Multidisciplinaria e Itinerante en Materia de Género, en la Investigación y Persecución, Litigación y Concentración de Asuntos Relacionados con Muertes Violentas de Mujeres y Feminicidios, UEMI).
Dans le cadre du processus de suivi de la création du Bureau spécialisé du Procureur, la Fondation pour la justice (FJEDD), Amnesty International et les familles des victimes de féminicides ont demandé une réunion avec le Procureur général de l’État de San Luis Potosi ainsi qu’avec le chef du Bureau du Procureur spécialisé dans les féminicides, afin de discuter des aspects de fond ayant contribué à la consolidation de ce nouveau bureau, tout en suivant les expériences ayant donné de bons résultats dans d’autres cas.
"Il est essentiel de reconnaître l’important travail de plaidoyer réalisé au Congrès de l’Etat par les familles des victimes de féminicides, ainsi que le soutien des femmes législatrices du Congrès, pour promouvoir la création du Bureau du Procureur spécialisé dans les féminicides. Nous devons continuer à travailler ensemble pour que ce bureau dispose d’une structure fonctionnelle lui permettant d’enquêter efficacement sur les féminicides et de rendre justice aux victimes et à leurs familles", a déclaré Edith Olivares Ferreto, directrice d’Amnesty International Mexique.
"La sensibilité du Procureur général à cette demande urgente et nécessaire des familles de victimes de féminicides, avec la publication de l’accord 002/2023, doit être consolidée afin que ce Bureau spécialisé du Procureur dans le féminicide fasse partie de la loi organique du Ministère public lui-même et ait la possibilité de survivre indépendamment du titulaire", a déclaré Yesenia Valdez, coordinatrice des litiges stratégiques de la Fondation pour la Justice (FJEDD).
"Le Bureau spécialisé du Procureur a besoin de la capacité, de l’autonomie et de la structure nécessaires pour répondre aux exigences du contexte actuel dans lequel se trouvent les affaires (dossiers d’enquête stagnants, enquête insuffisante sans perspective de genre, manque de personnel technique spécialisé, etc...). Nous ne voulons pas d’un Bureau sur papier et vide de faits, mais une entité qui ait des griffes, des dents et un cerveau pour combattre réellement l’impunité qui prévaut à San Luis Potosí dans les cas de morts violentes de femmes", a déclaré Yesenia Valdez.
Questions en attente à l’ordre du jour
Parmi les questions qui seront abordées lors de la réunion demandée au Procureur général de l’État figure un plan visant à garantir et à renforcer la participation des familles des victimes dans la consolidation du nouveau Bureau du Procureur, ainsi que la bonne mise en œuvre des protocoles d’enquête sur les morts violentes de femmes.
En outre, pour rendre effectif le message de tolérance zéro face aux féminicides et la lutte frontale contre l’impunité de ce crime, le responsable de ce Bureau spécialisé doit avoir la formation et l’expérience nécessaires concernant les enquêtes sur les morts violentes de femmes, et surtout, avec une perspective de genre.
Un autre facteur essentiel pour lutter efficacement contre le féminicide est que le Bureau spécialisé du Procureur doit avoir une structure adéquate, avec des ressources humaines et matérielles suffisantes afin de répondre aux besoins réels de l’État en matière de justice pour les victimes de féminicide. Pour cela, il est nécessaire que le ministère public génère des processus de dialogue prenant en compte les citoyen·nes afin d’élaborer un diagnostic sur la situation actuelle de la violence contre les femmes dans l’État de San Luis Potosí. Les collectivités, les familles, le monde universitaire et la société civile organisée doivent participer à la construction d’une politique publique efficace en matière d’accès à la mémoire, à la vérité et à la justice pour toute la société de Potosí.
De plus, il faut garantir la sécurité juridique du Bureau du Procureur, en reconnaissant sa création dans la Loi Organique du FGESLP, afin que sa permanence ne dépende pas seulement de l’Accord susmentionné et encore moins des changements d’administration.
Il est important de mentionner que, selon les données du Secrétariat Exécutif du Système National de Sécurité Publique (SESNSP), au cours de la période janvier-décembre 2022, 50 femmes ont été assassinées à San Luis Potosí (14 victimes présumées de féminicides et 36 victimes présumées d’homicides intentionnels), tandis que le nombre d’appels reçus au numéro d’urgence 911, pour des incidents de violence contre les femmes, était de 3 053.