« Aujourd’hui, la plus haute juridiction de l’Union européenne (UE) a confirmé ce que nous disions depuis longtemps, à savoir que le gouvernement polonais a violé le droit de l’UE en tentant de contraindre un tiers au moins des juges de la Cour suprême à partir à la retraite, et de contrôler le pouvoir judiciaire. » a déclaré, Eve Geddie, directrice du Bureau d’Amnesty International auprès des institutions européennes.
La modification de la Loi relative à la Cour suprême fait partie d’une vaste « réforme » du système judiciaire en Pologne. Amnesty International estime que ces modifications ont pour effet de politiser le système judiciaire et de saper son indépendance.
« Malgré les nombreuses procédures engagées pour contester cette "réforme", les autorités polonaises continuent de harceler et sanctionner des juges qui selon elles ne soutiennent pas leur cause. Elles doivent impérativement faire le nécessaire pour respecter le droit de l’UE. L’arrêt qui a été rendu aujourd’hui est très important non seulement pour la Pologne, mais aussi pour les autres pays de l’UE qui pensent pouvoir violer les droits humains en toute impunité.
« Nous demandons aux États membres d’agir en conséquence et d’appeler clairement les autorités polonaises à changer de cap et à rétablir pleinement l’indépendance du pouvoir judiciaire. »
Complément d’information
Amnesty International rassemble des informations sur la situation du système judiciaire en Pologne depuis le lancement, en 2016, de cette « réforme ». Le 4 juillet 2019, l’organisation rendra public un rapport intitulé Poland : Free Courts, Free People, qui expose les effets de ces modifications sur les droits humains.
La Loi relative à la Cour suprême, qui est entrée en vigueur le 3 avril 2018, abaisse l’âge du départ à la retraite des juges siégeant à la Cour, le ramenant de 70 à 65 ans ; un tiers environ des juges de la Cour suprême seraient ainsi contraints de partir à la retraite, y compris la première présidente, dont le mandat n’expire qu’en 2020 au titre de la Constitution polonaise.
Le 24 septembre 2018, la Commission européenne a saisi la CJUE au motif que la loi relative à la Cour suprême en Pologne est incompatible avec le droit de l’Union, car elle sape le principe d’indépendance de la justice, notamment le principe de l’inamovibilité des juges. En octobre 2018, la CJUE a accordé les mesures provisoires demandées par la Commission européenne, et ainsi demandé à la Pologne de rétablir la composition de la Cour suprême d’avant le 3 avril 2018.
En décembre 2017, la Commission européenne a lancé la procédure prévue à l’article 7(1) du Traité sur l’Union européenne à l’encontre de la Pologne, déclenchant une procédure pouvant conduire à des sanctions, notamment à la perte des droits de vote au sein de l’UE. La Commission européenne a engagé une procédure d’infraction concernant le nouveau régime disciplinaire pour les juges. Un autre recours introduit par la Commission européenne, concernant les tribunaux de droit commun, ainsi que plusieurs demandes de décisions préliminaires formulées par la Pologne, sont actuellement en instance devant la CJUE. Jusqu’à présent, les autorités polonaises se sont montrées réticentes à faire marche arrière sur les réformes contestées de la justice, malgré les demandes appuyées de la Commission européenne, de dirigeants européens, de la Commission de Venise et de divers organismes et organisations nationaux et internationaux.