République Tchèque : un espoir pour les enfants roms

L’entrée en vigueur d’une nouvelle modification apportée à Loi relative à l’enseignement scolaire, en République tchèque, permet d’espérer que les enfants roms ne seront plus soumis à une discrimination.

En 2014, Amnesty International Belgique Francophone avait pris part à la campagne en faveur des enfants roms en lançant une pétition ensuite remise à l’ambassade de la République Tchèque à Bruxelles.

En effet, la discrimination et la ségrégation que subissent les enfants roms dans le système éducatif tchèque sont un problème de longue date et systématique.

  Des enfants roms sont de façon disproportionnée placés dans des écoles destinées aux élèves atteints de handicaps mentaux légers.

  Dans le système scolaire classique, ils font l’objet d’une ségrégation qui se traduit souvent par des classes ou des écoles réservées aux Roms.

  Quand ils sont intégrés dans des classes classiques, souvent les enseignants et les autres élèves n’ont pas avec eux le même comportement qu’avec les autres, et ils signalent fréquemment des brimades racistes et des préjugés.

En 2007, la Cour européenne des droits de l’homme a estimé que la République tchèque violait le droit de ces enfants de ne pas subir une discrimination concernant leur accès à l’éducation.

Durant la plus grande partie de la décennie, les autorités nationales n’ont pris que des mesures timorées et au coup par coup pour lutter contre ces violations des droits humains.

Mais en 2014, un événement sans précédent a contraint le gouvernement à réagir : la Commission européenne a introduit une procédure d’infraction contre la République tchèque, pour non-respect de la législation de l’Union européenne en matière de lutte contre la discrimination (la directive sur l’égalité raciale).

La procédure d’infraction a représenté un coup de semonce fort utile, et les autorités tchèques se sont engagées à mettre en place de plus larges réformes. Le 1er septembre 2016, au début de la nouvelle année scolaire, une modification de la Loi relative à l’enseignement scolaire introduisant un certain nombre de réformes entrera en vigueur.

Pour la première fois, un enseignement ouvert à tous les enfants semble réellement possible en République tchèque, à condition que le gouvernement respecte ses engagements.

Yulek, demandeur dans l’affaire D.H. et autres c. République tchèque, en 2007 : « Je ne veux pas que mes enfants subissent ce que j’ai subi : passer d’une école classique à une école spécialisée, et inversement [...] avec des enseignants qui vous disent des choses du style “… tais-toi, de toute façon tu n’as aucun avenir devant toi”. »

Plusieurs décennies de discrimination

  2000 : 18 demandeurs roms d’Ostrava ont déposé une plainte auprès de la Cour européenne des droits de l’homme, au motif qu’ils faisaient l’objet de la part de la République tchèque d’une discrimination concernant l’exercice du droit à l’éducation.

  2007 : La Cour européenne des droits de l’homme a estimé que le placement d’un nombre disproportionné d’enfants roms dans des écoles spécialisées pour enfants atteints d’un handicap mental constituait une discrimination concernant leur accès à l’éducation.

  2008-2014 : Le Comité des ministres du Conseil de l’Europe a demandé à plusieurs reprises au gouvernement de lui faire part des progrès réalisés dans la mise en œuvre de cette décision.

  2014 : La Commission européenne a engagé une procédure d’infraction contre la République tchèque pour atteintes à la législation communautaire contre la discrimination.

  2015  : 38 334 personnes dans 94 pays ont participé à la campagne d’Amnesty International intitulée Learn the lesson (Faites vos devoirs), demandant au Premier ministre tchèque de mettre fin à la discrimination contre les enfants roms dans les écoles.

  2016 : Entrée en vigueur, le 1er septembre 2016, d’une nouvelle modification de la Loi relative à l’enseignement scolaire. Nouvel espoir de voir prendre fin la discrimination exercée contre les enfants roms dans le système éducatif.

En quoi consiste cette modification de la loi ?

Cet ensemble de réformes prévoit, entre autres choses, des mesures de soutien pour les enfants ayant été identifiés comme ayant des besoins particuliers en termes d’enseignement, notamment avec des subventions, une année obligatoire d’école maternelle pour tous les enfants, et, de façon plus spécifique, l’objectif d’intégrer dans le système scolaire classique tous les enfants présentant un léger handicap mental. Cette dernière mesure devrait marquer la fin du plan destiné aux élèves présentant un léger handicap mental et d’un programme éducatif allégé, et si elle est pleinement mise en œuvre, elle permettra de supprimer l’un des principaux filtres utilisés par le passé pour exclure ces enfants du système scolaire classique.
Des ONG ont accueilli avec satisfaction ces réformes, mais il reste encore beaucoup à faire. Les autorités tchèques ont encore besoin de :

• résoudre le problème des préjugés à l’égard des Roms qu’ont certains enseignants ;

• fournir les ressources nécessaires pour aider les enfants roms qui rencontrent des difficultés à l’école ;

• éradiquer les préjugés dont font l’objet de nombreux enfants roms de la part d’autres élèves.

Des mesures énergiques auraient dû être prises depuis longtemps déjà par les autorités tchèques dans ce domaine. Amnesty International se félicite de l’entrée en vigueur de ces nouvelles dispositions législatives.

Pendant des années, des générations de Roms ont été privées d’un accès égal à l’éducation, ce qui a aggravé davantage encore la marginalisation sociale et les autres inégalités.

Les enfants sont notre avenir. Ils doivent être éduqués, et non entravés, et cela vaut pour tous les enfants, quelle que soit leur appartenance ethnique. L’injustice doit prendre fin, et cette nouvelle réforme ne représente que le début du combat contre la discrimination et la ségrégation subies par les enfants roms dans le système scolaire.

Amnesty International et d’autres organisations en Europe suivront avec beaucoup d’intérêt les avancées réalisées, en veillant à ce qu’elles apportent un changement réel et durable.

« Enfin, après des décennies d’incapacité systématique à procurer un accès égal à l’éducation aux enfants roms, la République tchèque prend pour la première fois en ce mois de septembre de véritables mesures pour offrir un enseignement de qualité et une intégration scolaire à tous les enfants. Nous accueillons cela avec beaucoup de satisfaction, à Amnesty International. Cette réforme profonde du système va sans doute demander du temps et se heurter à des difficultés. Nous devons poursuivre nos efforts et veiller à ce que ces projets deviennent réalité, afin que tous puissent jouir du droit à l’éducation, sans distinction de race ou d’appartenance ethnique.  »

Mark Martin, directeur d’Amnesty International République tchèque

Toutes les infos
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit