Selon cette enquête, beaucoup de militant·e·s en faveur des droits reproductifs de premier plan ont été confronté·e·s à un harcèlement accru sur Twitter depuis la fuite le 2 mai du projet de décision de la Cour suprême dans l’affaire Dobbs c. Jackson Women’s Health Organization, l’affaire qui a annulé Roe c. Wade et a mis fin au droit constitutionnel à l’avortement aux États-Unis.
« Twitter doit en faire plus pour protéger les militant·e·s qui luttent pour les droits reproductifs, surtout à un moment aussi critique », a déclaré Michael Kleinman, directeur du programme Technologie et droits humains à Amnesty International États-Unis.
« Ces dernières années, Amnesty et d’autres organisations ont à de nombreuses reprises appelé Twitter à en faire davantage pour lutter contre les violences en ligne. Malheureusement, comme les résultats de cette enquête le montrent, ce problème ne fait qu’empirer. »
Sur les 17 militant·e·s interrogé·e·s, toutes et tous ont utilisé la plateforme pour discuter de questions liées aux droits reproductifs depuis le 2 mai. Dix de ces militant·e·s (59 %) ont constaté une augmentation des discours violents et haineux sur Twitter au cours de cette période. Sur ces dix personnes, six ont essayé de signaler les discours violents et haineux à Twitter, mais les six personnes ont indiqué que Twitter n’avait pris aucune action pour tenter de remédier à cette situation.
Ce type de violences en ligne a un impact direct sur la manière dont les militant·e·s utilisent la plateforme, et le manque de réaction adaptée de la part de Twitter crée un dangereux effet dissuasif. Certains militant·e·s ont signalé que, en raison des violences subies en ligne, ils et elles avaient moins utilisé la plateforme et partagé moins d’informations, tandis que d’autres ont indiqué avoir soigneusement limité les personnes avec qui ils et elles interagissaient sur la plateforme.
« Il est regrettable que des militant·e·s risquent d’être pris pour cible sur Twitter au moment même où l’on a le plus besoin qu’ils et elles s’expriment », a déclaré Tarah Demant, directrice nationale par intérim des programmes, du plaidoyer et des affaires gouvernementales à Amnesty International États-Unis.
« Sans action de la part de Twitter, la tolérance persistante de la plateforme envers les discours violents et haineux rendra son usage virtuellement impossible pour les militant·e·s, ce qui aura des effets dévastateurs sur la société. »
Toutes les plateformes de réseaux sociaux sont confrontées aux problèmes de violence et de harcèlement en ligne, mais le problème est cependant particulièrement grave sur Twitter. Sur les 17 militant·e·s interrogé·e·s, 16 ont indiqué utiliser d’autres plateformes de réseaux sociaux comme Facebook, Instagram, Snapchat et TikTok, pourtant, dix de ces 16 personnes (63 %) indiquent qu’elles pensent qu’il y a davantage de discours violents et haineux sur Twitter que sur ces autres plateformes.
« Il y a un fossé énorme entre les idéaux de Twitter et la réalité. Au lieu d’une place publique mondiale où toutes les voix sont entendues, le manque d’action de Twitter en matière de violences en ligne signifie le plus souvent que les voix les plus marginalisées sont prises pour cible. L’entreprise doit faire mieux », a déclaré Michael Kleinman.
Complément d’information
En 2018, Amnesty International a publié Toxic Twitter : Violence and abuse against women online, un rapport qui révélait l’ampleur, la nature et l’impact des violences ciblant les femmes sur Twitter aux États-Unis et au Royaume-Uni. Les conclusions du rapport étaient que la plateforme avait failli à sa responsabilité de protéger les droits des femmes sur Internet en ne menant pas d’enquête adaptée sur les signalements de violences et en ne réagissant pas en toute transparence à ces agissements, ce qui conduit de nombreuses femmes à se taire ou à se censurer sur la plateforme.
En septembre 2020, Amnesty International a publié son premier Twitter Scorecard qui évalue les progrès de Twitter dans sa réponse aux problèmes de discours violents en s’appuyant sur dix indicateurs, qui couvrent les questions de transparence, de mécanismes de signalement, de processus d’évaluation des signalements, et de fonctionnalités renforcées relatives à la vie privée et à la sécurité. Sur les dix recommandations mises en avant dans le rapport, Twitter n’en avait mis en œuvre pleinement qu’une seule. Amnesty International a ensuite publié un second Twitter Scorecard en décembre 2021, qui a conclu qu’un an plus tard, Twitter n’avait fait que des progrès limités.