Dossier - Soudan : Une période difficile pour les étudiants Darfouriens

La situation de nombreux étudiants originaires du Darfour (ouest du Soudan) et inscrits dans des universités soudanaises est bien loin d’une vie étudiante typique, entre études, débats libres et préparation à la vie professionnelle. Au lieu de cela, ils sont exposés à des violences, des discriminations et des atteintes à leurs droits humains.

Entre 2003 et 2016, au moins 13 étudiants du Darfour ont été victimes d’homicides illégaux, qui n’ont fait l’objet d’aucune enquête et sont restés impunis. Plus de 10000 Darfouriens ont été arrêtés, torturés ou soumis à d’autres mauvais traitements dans des universités du Soudan.

Salma, une étudiante darfourienne de 27 ans, militante et membre de l’Association des étudiantes darfouriennes, a été arrêtée quatre fois entre 2011 et 2014. En mars 2014, des agents du Service national de la sûreté et du renseignement (NISS) l’ont arrêtée pour avoir fait campagne contre l’expulsion forcée d’étudiantes darfouriennes de sa résidence universitaire de Khartoum. Pendant son arrestation et son interrogatoire, elle a été insultée et frappée à coups de matraque, de crosse de pistolet, de tuyaux d’arrosage et de bâton. Elle a également reçu des décharges électriques et sa hanche s’est démise sous les coups.

Le 5 octobre 2014, Salma a été à nouveau arrêtée. Les yeux bandés et entravée, elle a été conduite dans les bureaux du NISS à Khartoum-Nord pour y être interrogée. Les agents de sécurité l’ont traînée et lui ont retiré sa Toub (la robe traditionnelle soudanaise). Salma a été droguée et, une fois réveillée, les agents lui ont montré une vidéo dans laquelle ils la violaient.

« Lorsque je me suis [...] réveillée, j’étais allongée sur le lit, nue. Les quatre agents de sécurité qui étaient là me regardaient. L’un d’eux m’a montré une vidéo dans laquelle ils me violaient [...]. Chacun à son tour, les quatre agents m’ont violée. »

Salma a été libérée en novembre 2014, après un mois de détention. Elle a quitté le Soudan et demandé l’asile dans un autre pays en 2015.

La torture, les arrestations et les détentions illégales d’étudiants darfouriens surviennent alors qu’un conflit armé sévit au Darfour depuis 2013. Le gouvernement soudanais persiste à réduire au silence et à persécuter les Darfouriens.

Les étudiants darfouriens sont en première ligne et cherchent à attirer l’attention sur la situation dans la région en manifestant et en diffusant au sein des universités des informations sur le conflit. Pour les faire taire, les forces de sécurité du gouvernement répriment leur liberté d’association, de réunion et d’expression.

Dans plusieurs universités, des forums publics organisés par des étudiants darfouriens ont été violemment dispersés et fermés.

Certains étudiants ont été suspendus, exclus de leur université ou leur diplôme ne leur a pas été remis en raison de leur militantisme politique ou parce qu’ils n’avaient pas payé les frais d’inscription, alors qu’ils en étaient dispensés. À cause de cette persécution, certains étudiants darfouriens ont fui le Soudan, contribuant à la fuite des cerveaux.

En janvier 2016, des membres des forces de sécurité et des étudiants affiliés au parti au pouvoir, armés de couteaux, de barres de fer et de mitrailleuses, ont interrompu et violemment dispersé une assemblée pacifique d’étudiants darfouriens à l’université d’El Geneina. Les étudiants ont été roués de coups et Salah Al Din Qamar, en quatrième année d’économie, est mort des suites des blessures causées par des agents du NISS. Au moins 27 étudiants ont été arrêtés. Une enquête policière sur la mort de Salah a conclu que la cause ou les circonstances de son décès étaient inconnues.

« Nous vivons une période très difficile ici. Et, au Darfour, nos familles ont été déplacées et n’ont plus de toit. Quand nous essayons d’expliquer cette situation aux étudiants de Khartoum, qui n’ont aucune idée de ce qui se passe, les partisans du gouvernement nous attaquent. Ils ne veulent pas que le peuple sache ce qui se déroule au Darfour. »

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