Edito

Par Philippe Hensmans, directeur d’AIBF

La libération d’Aung San Suu Kyi a constitué un énorme moment de plaisir pour tous les défenseurs des droits humains qui se sont battus pendant plus de deux décennies pour cette femme et les libertés du peuple birman. Son histoire illustre à souhait la trajectoire de bon nombre de ces inconnus que nous défendons parfois pendant des années, sans arriver même à prononcer correctement leur nom (et ce fut certainement le cas avec la leader birmane !). Et puis, petit à petit, le travail que nous menons les fait connaître dans les médias, d’autres organisations s’emparent de leur cas, leurs noms sont cités dans des rapports officiels, et soudain, le Comité du prix Nobel (ces « clowns » comme les a baptisés un officiel chinois) leur attribue cette récompense prestigieuse. Et les place sous les sunlights de toutes les télévisions du monde. Des inconnu-e-s comme elle, il y en a des millions à travers le monde : ils/elles ne sont pas toutes/tous en prison : ce sont des « demandeurs d’asile ».

Et il est des endroits, y compris en belgique, où on ne les aime pas. Il y a 65 ans, bastogne disait « Nuts » aux troupes fascistes, résistant jusqu’au bout, grâce — entre autre — au sacrifice de jeunes gens venus mourir sur notre sol. Soixante-cinq ans plus tard, certains de ses habitants rejettent ces inconnus et inconnues, « qui auraient mieux fait de ne pas quitter leur pays, s’ils voulaient avoir un toit ».

Je dois l’avouer, en entendant ces propos à la télévision, je n’étais pas fier. Si ce n’est pas Mozart qu’on assassine, c’est Aung San Suu Kyi qu’on laisse dans la rue en plein hiver.

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