Ventes d’armes : nous voulons de la transparence

Le 29 juin, le Conseil d’État a suspendu plusieurs licences d’armes accordées par la Wallonie vers l’Arabie saoudite. C’est une excellente nouvelle, mais le combat est loin d’être terminé.

En décembre dernier, soutenues par Amnesty International,
la Ligue des droits de l’homme (LDH) et la Coordination Nationale d’Action pour la Paix et la Démocratie (CNAPD) introduisaient devant le Conseil d’État un recours en suspension et en annulation de quelque 28 licences d’exportation d’armes vers l’Arabie saoudite accordées par le Ministre-Président wallon, Willy Borsus.

Six mois plus tard, le Conseil d’État belge prenait une décision historique en suspendant plusieurs licences, empêchant ainsi que ces armes soient expédiées vers le royaume saoudien. Il s’agit là d’une belle victoire pour nos organisations, mais notre campagne #WallonieImmorale demande plus que cela : plus de transparence dans l’octroi des licences d’armes est indispensable !

POURQUOI LES LICENCES ONT-ELLES ÉTÉ SUSPENDUES ?

Nous considérons, tout comme la LDH et la CNAPD, que les licences visées par notre recours violaient de manière flagrante la Position commune de l’Union européenne et le Décret wallon relatif à l’importation, à l’exportation, au transit et au transfert d’armes civiles et de produits liés à la défense. Ces deux textes interdisent en effet de vendre des armes à des ays qui risquent de les utiliser pour commettre des violations des droits humains et/ou du droit international humanitaire (DIH).

Le Conseil d’État ne s’est en réalité pas prononcé sur le risque de violations que l’Arabie saoudite pourrait commettre avec les armes belges, au Yémen notamment. Sur quelle base a-t-il donc pu suspendre les licences ? Le Conseil d’État a en fait découvert que la Région wallonne n’avait tout simplement pas procédé à l’analyse de la question du respect des droits humains et du DIH par l’Arabie saoudite. Il s’agit pourtant d’une injonction fondamentale de la législation wallonne et européenne. Cette analyse n’ayant pas été réalisée, les licences ne sont pas valables et ont pu être suspendues.

QUE FAUT-IL COMPRENDRE DE CETTE DÉCISION ?

Nous dénonçons depuis des mois les violations du droit international humanitaire commises par Ryad au Yémen. Malgré cela, la Région wallonne ne semble pas se soucier du risque de se rendre complice de ces crimes en continuant de vendre ses armes à l’Arabie saoudite.

Si cette décision va dans le bon sens, elle n’équivaut pas à un embargo sur les ventes d’armes à l’Arabie saoudite. En réalité, la prochaine fois qu’une demande d’exportation échouera sur le bureau du Ministre-Président, personne ne peut savoir si ce dernier va bel et bien analyser le respect des droits humains et du DIH en Arabie saoudite. La procédure d’octroi des licences reste en effet totalement opaque. Les avis rendus par la Commission d’avis, qui aiguillent le Ministre-Président dans sa prise de décision, sont par exemple complètement confidentiels, ce qui ne permet pas au Parlement d’en contrôler la teneur. Par ailleurs, les rapports sur les licences accordées ne sont pas assez détaillés et pas assez fréquents, si bien que le Parlement est souvent informé d’une vente après que les armes aient été expédiées.

UN NOUVEAU DÉCRET POUR PLUS DE TRANSPARENCE

Afin de mettre fin à cette opacité et au pouvoir quasi discrétionnaire du Ministre-Président, il est de prime importance que le Décret wallon soit modifié pour qu’un réel débat démocratique soit possible. Et nous y travaillons. Notre objectif, dans le cadre des élections régionales de mai 2019, est que les partis politiques inscrivent à leur programme la révision du décret pour plus de transparence. Amnesty et ses partenaires seront force de proposition dans ce projet, apportant des idées concrètes de modification du Décret s’inspirant notamment de ce qui se fait dans certains pays.

Dans quelques jours, à l’approche des Fêtes de Wallonie, nous remettrons à Willy Borsus notre pétition #WallonieImmorale que vous avez été plus de 50 000 à signer. Ensemble, nous demandons de cette façon à la Région wallonne de suspendre ses ventes d’armes à des pays qui violent le droit international des droits humains et le droit international humanitaire, comme l’Arabie saoudite et les autres pays impliqués dans la terrible guerre qui ensanglante le Yémen.

QUAND « ABDEL EN VRAI » S’Y MET…

… ça frappe fort et juste ! Dans une vidéo débordante d’ironie, le youtubeur expose la réalité crue des transferts d’armes à l’Arabie saoudite. Comme il le dit lui-même, « mon pays vend des armes à un pays qui tue des personnes civiles, innocentes, alors que selon le droit international c’est totalement interdit ». Déjà plus de 490 000 vues sur Facebook pour ce concentré d’humour, de dénonciation et d’appel à l’action avec Amnesty !

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