Quelles sont les répercussions de la politique de Donald Trump sur les droits humains aux États-Unis ?
Paul O’Brien : Le président Trump a créé une situation d’urgence en adoptant une série de politiques contraires aux droits humains et en s’attaquant aux institutions qui protègent ces mêmes droits. Nous avons constaté ces impacts sur toute une série de questions, notamment les droits des réfugié·e·s et des migrant·e·s, le droit de manifester, la justice raciale et les droits des personnes LGBTQIA+. Le retrait des États-Unis de l’Accord de Paris sur le climat témoigne également du mépris total porté à la crise climatique et à ses conséquences. J’aimerais approfondir ici la question de la répression des manifestations pacifiques sur les campus universitaires. C’était déjà une préoccupation majeure depuis le début du génocide à Gaza, mais Donald Trump a empiré la situation en ciblant et menaçant d’expulser des citoyen·ne·s pour avoir exercé leur liberté d’expression. Nous nous sommes ainsi mobilisé·e·s en faveur de Mahmoud Khalil, un militant palestinien récemment diplômé de l’Université de Columbia. Mahmoud a été pris pour cible en raison de son rôle dans les manifestations étudiantes à son université, où il exerçait ses droits à la liberté d’expression et de réunion pacifique. Il est retenu dans un centre de détention et les autorités l’ont informé qu’elles avaient « révoqué » son statut de résident permanent légal aux États-Unis, et l’avaient placé en procédure d’expulsion. Ce ciblage envoie un message effrayant : toute personne exerçant ses droits sera soumise à la répression, à la détention et à une éventuelle expulsion.
Le contexte politique actuel a-t-il modifié vos priorités ?
P. O. B. : Aucun·e dirigeant·e ni aucun gouvernement n’est à l’abri d’un examen minutieux d’Amnesty International. Notre exigence s’exerce de la même façon pour chaque président américain. Il est cependant important de noter que les politiques menées par le président ne sont pas de son unique fait ; des idéologies suprémacistes, xénophobes, antiscientifiques et oligarchiques se sont longtemps répandues aux États-Unis, menant le pays à son état actuel. En l’occurrence, nous assistons à un assaut important contre les droits humains, mené tambour battant, ainsi qu’à un dangereux glissement vers des pratiques autoritaires.
Doit-on craindre le développement d’un axe défavorable aux droits humains dans les Amériques, particulièrement avec le tandem Milei-Trump ?
P. O. B. : Nous sommes déjà témoins de graves atteintes aux droits humains partout dans le monde. Depuis au moins une décennie, des lois, des politiques et des pratiques autoritaires ne cessent de se propager ; l’espace civique de se rétrécir ; la liberté d’expression de s’éroder. Les racines de ces problèmes vont bien au-delà de Donald Trump ; partout dans le monde, nous observons des tendances dans le chef des dirigeant·e·s à désigner des boucs émissaires parmi les populations marginalisées, à semer la peur ou encore à s’attaquer à la liberté de la presse. La rhétorique et les pratiques de Donald Trump ne sont pas les premières du genre, mais, compte tenu de l’influence disproportionnée des États-Unis dans le monde, elles risquent fortement d’encourager les autres dirigeant·e·s à agir comme lui.