SOMALIE

Somalie
CAPITALE : Mogadiscio
SUPERFICIE : 637 657 km²
POPULATION : 8,2 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Abdullahi Yusuf Ahmed, président du gouvernement fédéral de transition
PREMIER MINISTRE : Ali Mohammed Ghedi
PEINE DE MORT : maintenue
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome non signé
CONVENTION SUR LES FEMMES : non signée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : non signé

Des milliers de civils fuyant les persécutions ont dû quitter leur foyer pour se réfugier à l’étranger ou dans d’autres endroits du pays. L’état de droit était inexistant dans le sud de la Somalie. Des journalistes ont été arrêtés et des défenseurs des droits humains ont été la cible de menaces dans plusieurs régions. Les violences contre les femmes étaient monnaie courante. Au Somaliland, des détentions arbitraires, des procès politiques inéquitables et des actes de torture ont été signalés. Une jeune fille de seize ans emprisonnée pour espionnage a été remise en liberté.

Contexte

Gouvernement fédéral de transition

Au mois de janvier, le Parlement fédéral de transition, installé au Kenya, a approuvé la nomination d’un gouvernement composé de ministres et de ministres adjoints. Le Premier ministre avait été désigné par le président du gouvernement fédéral de transition en novembre 2004. Mis en place pour une période de cinq années, le gouvernement de transition et les autres institutions fédérales n’étaient toutefois pas opérationnels fin 2005. Ce retard s’expliquait par les divisions internes entre, d’une part, le président Abdullahi Yusuf Ahmed et les factions claniques qui lui sont associées (dont la plupart ont quitté le Kenya pour rejoindre la ville de Jowhar, dans le centre de la Somalie) et, d’autre part, les chefs d’autres factions qui avaient regagné leur base à Mogadiscio, la capitale. Des affrontements entre les deux camps ont été évités de peu. En octobre, le secrétaire général des Nations unies a de nouveau lancé un appel en faveur d’un accord de cessez-le-feu global.
Proposée en 2004 à l’issue d’une conférence sur la paix et la réconciliation qui s’était étalée sur deux années au Kenya, la force de maintien de la paix de l’Union africaine n’a pas été déployée, pour des raisons de sécurité. La démobilisation des milices des factions, telle que l’exigeait la Charte fédérale de transition (la Constitution intérimaire), s’est avérée très faible.
Une grande partie des régions du centre et du sud de la Somalie ont régulièrement été le théâtre de flambées de violences entre les factions ou entre les milices des différents clans. En janvier, le général de police Yusuf Ahmed Sarinle a été assassiné à Mogadiscio, selon toute apparence parce qu’il soutenait le gouvernement de transition. Les organisations humanitaires ont eu dans l’ensemble beaucoup de mal à être présentes sur le terrain. Les approvisionnements étaient souvent pillés et les membres du personnel des Nations unies et des organisations humanitaires internationales risquaient d’être assassinés ou enlevés par des personnes exigeant une rançon.
Plusieurs seigneurs de la guerre et autres individus signalés comme ayant commis des crimes de guerre, des crimes contre l’humanité ou des atteintes flagrantes aux droits humains, que ce soit avant 1991, sous le régime de Siad Barré, ou lors des guerres civiles qui ont suivi, ont été nommés ministres au sein du gouvernement fédéral de transition ou à d’autres fonctions de l’administration fédérale ; ils continuaient de bénéficier d’une parfaite impunité. Attendant que le gouvernement de transition soit unifié et opérationnel, la communauté internationale a suspendu le début de l’aide à la reconstruction.
Les Nations unies et la Banque mondiale ont toutefois commencé à effectuer une évaluation conjointe des besoins. Près d’un million de personnes étaient dans une situation de détresse humanitaire nécessitant une aide d’urgence.

Somaliland

Après quatorze années d’indépendance de fait, la République autoproclamée du Somaliland, dans le nord-ouest de la Somalie, réclamait toujours sa reconnaissance par la communauté internationale. Le Somaliland demeurait le seul territoire issu de l’ancienne République de Somalie à être doté d’un gouvernement et d’une fonction publique en état de fonctionnement. Son litige avec le Puntland voisin au sujet de la souveraineté des régions frontalières de Sool et de Sanaag n’était toujours pas résolu. Trente-six « prisonniers de guerre » capturés en 2004 par l’une et l’autre parties au conflit ont toutefois été échangés au mois de décembre.
Des élections législatives se sont déroulées en septembre. Le parti du président Dahir Riyaale Kahin, l’Ururka Dimuqraadiga Umada Bahawday (UDUB, Parti uni et démocratique du peuple), a remporté 33 sièges, alors que les formations d’opposition Kulmiye (Unité) et Ururka Caddaalada iyo Daryeelka (Justice et développement) ont obtenu respectivement 28 et 21 sièges.

Embargo des Nations unies sur les armes

En octobre, le Conseil de sécurité des Nations unies a condamné les violations de plus en plus graves de son embargo international sur les armes à destination de la Somalie, proclamé en 1992. Le rapport établi par un groupe d’experts recensait des infractions commises par les gouvernements de l’Éthiopie et du Yémen, ainsi que par un troisième État dont le nom n’a pas été divulgué, mais aussi par certains seigneurs de la guerre et hommes d’affaires somaliens opérant dans les secteurs de la pêche, du charbon de bois et de l’industrie pharmaceutique. Le rapport du groupe déplorait que ces flux illégaux d’armes légères à destination du gouvernement fédéral de transition et des groupes d’opposition exacerbent le climat d’insécurité générale et les difficultés à établir un gouvernement de transition opérationnel.

Justice et état de droit

Il n’existait aucun état de droit ni système judiciaire dans les régions du centre et du sud de la Somalie, à l’exception de quelques tribunaux se fondant sur la charia (droit musulman), qui appliquaient des procédures non conformes aux normes internationales d’équité.
En septembre, Jama Aden Dheere, un chef de faction favorable au gouvernement de transition, a été arrêté à Jowhar pour des motifs politiques. Selon certaines informations, il a subi des mauvais traitements. Des cas de procès politiques iniques et d’incarcération sans jugement ont été relevés au Somaliland.
En janvier, Zamzam Ahmed Dualeh, une jeune fille de seize ans, a été graciée et autorisée à rentrer chez elle au Puntland sous la protection de l’expert indépendant des Nations unies chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie. Elle avait été reconnue coupable d’espionnage en 2004 et condamnée à une peine de cinq ans d’emprisonnement, à l’issue d’un procès contraire aux règles d’équité les plus élémentaires. Les autorités du Somaliland ont continue à rejeter ses allégations selon lesquelles elle aurait été violée et torturée par des policiers.
En septembre, des dizaines de personnes, dont des enseignants musulmans, ont été arrêtées après une fusillade entre un groupe armé et la police. Elles ont été accusées d’appartenance à un groupe islamiste proche d’Al Qaïda, qui aurait préparé une attaque contre des représentants du gouvernement et des étrangers. À la fin de l’année, ces personnes restaient détenues sans inculpation ni jugement. Certaines auraient été torturées.
Originaires d’Éthiopie, 29 anciens du clan ogaden qui avaient été placés en détention en novembre 2003 et reconnus coupables de complot armé en tant que membres présumés du Front national de libération de l’Ogaden (FNLO, en conflit avec le gouvernement éthiopien) ont été acquittés en 2005, à l’issue d’une procédure d’appel devant la Cour suprême. Ils ont toutefois été maintenus en détention à la prison d’Hargeisa. Tous étaient dans un état de santé précaire, et deux sont morts à la fin de l’année.

Journalistes

Plusieurs journalistes de Somalie (y compris du Puntland) et du Somaliland ont été la cible de menaces ou ont été arrêtés ; deux d’entre eux ont été tués. En août, une conférence sur la liberté et les droits des journalistes s’est déroulée à Mogadiscio, malgré les menaces de mort adressées aux organisateurs. Un Syndicat national des journalistes somaliens a été fondé à cette occasion.
Une journaliste de la British Broadcasting Corporation (BBC), Kate Peyton, a été assassinée à Mogadiscio en février.
Ce même mois, une bombe a été lancée contre les locaux de la radio HornAfrik, à Mogadiscio. En juin, une journaliste de la station, Duniya Muhyadin Nur, a été tuée à un barrage routier par des miliciens.
Abdi Farah Nur, le rédacteur en chef de Shacab, un journal du Puntland interdit par les autorités de cet État, a été détenu pendant une courte période en juin à Garowe ; il avait déjà été arrêté à deux reprises depuis le début de l’année.

Défenseurs des droits humains

En dépit de menaces de mort contre les militants, les organisations somaliennes de défense des droits humains ont continué de surveiller la situation des libertés et de dénoncer les atteintes aux droits fondamentaux. Elles militaient également en faveur d’une meilleure protection, appelant notamment de leurs vœux la création d’une commission nationale indépendante des droits humains en Somalie et d’organes similaires au Somaliland et au Puntland. Les défenseurs des droits humains au Somaliland ont dénoncé les conditions de détention dans les établissements pénitentiaires d’Hargeisa, de Berbera et de Burao.
Personnalité influente de l’action en faveur de la paix, le directeur du Centre pour la recherche et le dialogue, Abdulqadir Yahya Ali, a été assassiné à Mogadiscio par des agresseurs qui n’ont pas été identifiés.
L’expert indépendant des Nations unies chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en Somalie a de nouveau fait part de son inquiétude concernant les violations des droits humains et a salué le rôle de plus en plus visible joué par la société civile dans la promotion des droits de la personne.

Droits des femmes

Plusieurs organisations de défense des droits des femmes ont pris une part active dans différentes initiatives liées à la réconciliation, au désarmement des milices, à la protection des droits des enfants et au développement. Ces organisations, y compris celles du Somaliland, ont également fait campagne contre les violences faites aux femmes, notamment les mutilations génitales féminines, le viol - dont sont victimes en particulier les femmes déplacées - et la violence domestique. La représentation des femmes au Parlement fédéral de transition était inférieure au quota fixé à 12 p. cent des sièges.

Droits des minorités

Les personnes appartenant à des groupes minoritaires ont, cette année encore, été en butte à la discrimination sociale et à des violences - meurtre et viol, notamment - imputables à des membres de clans agissant en toute impunité. La question des droits des minorités a fait l’objet d’un débat public. Les groupes minoritaires se sont vu allouer 31 sièges au Parlement fédéral de transition.
Au Somaliland, des dizaines de militants et de sympathisants des droits des minorités ont été placés en détention durant une courte période en mai. Ces personnes manifestaient à Hargeisa à l’occasion du procès d’un policier, qui a été condamné à une peine d’emprisonnement pour homicide sur la personne de Khadar Aden Osman, membre de la minorité gaboye.

Réfugiés et personnes déplacées

Les affrontements entre factions rivales, les enlèvements, les menaces contre les défenseurs des droits humains et les autres atteintes aux droits fondamentaux continuaient de contraindre des personnes à l’exil. Dans les camps de personnes déplacées, 400 000 Somaliens vivaient dans des conditions extrêmement difficiles. De très nombreuses personnes ont trouvé la mort en tentant de rejoindre le Yémen par la mer depuis le Puntland.

Peine de mort

En novembre, huit hommes ont été condamnés à mort au Somaliland pour le meurtre, en 2003, de deux Britanniques travaillant pour une organisation humanitaire et celui, en 2004, d’un Kenyan travaillant lui aussi pour une organisation humanitaire. Ces hommes, dont l’un était jugé par contumace, étaient soupçonnés d’appartenir à un groupe proche d’Al Qaïda. On attendait qu’il soit statué sur leur appel à la fin de l’année.

Autres documents d’Amnesty International

 Somalia : Urgent need for effective human rights protection under the new transitional government (AFR 52/001/2005).

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