JAMAÏQUE

Jamaïque
CAPITALE : Kingston
SUPERFICIE : 10 991 km²
POPULATION : 2,7 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Elizabeth II, représentée par Howard Felix Cooke
CHEF DU GOUVERNEMENT : Percival James Patterson
PEINE DE MORT : maintenue
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome signé
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée avec réserves
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : non signé

De nouveaux cas de brutalités policières ont été signalés. Un certain nombre d’agents ont été inculpés et jugés à la suite d’exécutions illégales, mais aucun n’a été condamné. Au moins 168 personnes ont été tuées par la police, souvent dans des circonstances donnant à penser qu’il s’agissait d’exécutions extrajudiciaires. Les conditions de détention s’apparentaient souvent à une forme de traitement cruel, inhumain ou dégradant. Deux personnes au moins ont été condamnées à mort ; il n’y a pas eu d’exécution.

Contexte

Cette année encore, la société jamaïcaine souffrait d’un taux de criminalité violente très élevé ; le nombre de meurtres a augmenté par rapport aux années précédentes, avec 1 674 meurtres signalés en 2005. Au moins 13 policiers ont été tués. En mai, trois agents de police ont été abattus à quelques heures d’intervalle, lors d’attaques manifestement coordonnées.

Homicides illégaux et impunité

Au moins 168 personnes auraient été tuées par des policiers, soit une augmentation par rapport à l’an passé. Depuis six ans, aucun policier ni militaire n’a jamais été reconnu coupable d’homicide illégal perpétré en service. Les enquêtes menées sur les exécutions extrajudiciaires présumées demeuraient insatisfaisantes. La police omettait fréquemment de préserver les lieux où des crimes avaient été commis et, dans bien des cas, les dépositions des agents étaient recueillies longtemps après les faits. De nombreux policiers inculpés d’homicides illégaux se sont soustraits à la justice, y compris celui qui avait été mis en cause dans le meurtre de Renee Lyons, une fillette de dix ans tuée en 2003 à Kingston.
En février, six policiers ont été acquittés du meurtre de sept jeunes gens tués à Braeton en 2001, alors que des preuves accablantes démontraient qu’ils avaient été exécutés de manière extrajudiciaire. Le juge a estimé que les éléments de preuve produits par l’accusation étaient insuffisants et que, de ce fait, le procès ne pouvait continuer.
En août, six policiers ont été accusés d’avoir tué deux hommes âgés lorsque les forces de l’ordre avaient ouvert le feu sur leur taxi en octobre 2003, à Flankers. Fin 2005, le procès n’avait pas commencé.
En décembre, le procès de six policiers poursuivis pour le meurtre de deux hommes et deux femmes à Crawle, en 2003, s’est soldé par des acquittements. En juillet, deux membres de la police ont été accuses d’avoir cherché à infléchir le cours de la justice et d’avoir commis d’autres infractions en rapport avec ces meurtres. Les policiers auraient tenté de modifier la scène du crime afin de faire croire que les victimes avaient ouvert le feu sur les forces de l’ordre. L’enquête n’était pas terminée fin 2005.
En décembre, trois policiers ont été acquittés du meurtre de Jason Smith, un adolescent de quinze ans tué en 2003 à Kingston.
Le mois d’octobre a été marqué par l’adoption d’une loi portant création d’une autorité civile de supervision de la police. Toutefois, ce texte ne prévoyait, pour cette structure, aucun rôle majeur dans les investigations sur les homicides illégaux dont pouvait être soupçonnée la police ; elle semblait plutôt lui réserver des questions telles que l’efficacité de l’utilisation des ressources.
En novembre, la Commission interaméricaine des droits de l’homme a publié un rapport dénonçant l’attitude des autorités jamaïcaines dans l’affaire Michael Gayle, qui avait apparemment été battu à mort par des membres des forces de sécurité en 1999. Personne n’a jamais été poursuivi pour cet homicide.

Peine de mort

Des personnes se trouvant sous le coup d’une condamnation à la peine capitale ont bénéficié de nouvelles audiences, conformément à la décision rendue par le Judicial Committee of the Privy Council (JCPC, Comité judiciaire du Conseil privé) qui, en 2004, a jugé inconstitutionnelle l’application obligatoire de la peine de mort. Onze prisonniers, peut-être plus, ont vu leur sentence commuée en peine d’emprisonnement et quatre autres ont de nouveau été condamnés à mort.
Au cours de l’année 2005, face à une criminalité élevée, des appels ont été lancés en faveur de la reprise des exécutions ; le gouvernement et l’opposition ont entamé des débats sur d’éventuelles modifications de la Constitution qui permettraient de les faciliter.

Torture et mauvais traitements en détention

Les conditions dans les prisons et les autres lieux de détention restaient très éprouvantes et constituaient souvent, de fait, un traitement cruel, inhumain ou dégradant.
En avril, une tentative d’évasion a eu lieu au centre pénitentiaire de Tower Street. Un gardien et un prisonnier ont été abattus ; d’autres détenus ont été roués de coups. Une commission nommée par le gouvernement a enquêté sur les faits et mis au jour de multiples violations des droits humains commises sur les prisonniers. Elle a notamment découvert qu’un détenu avait été battu à mort par des gardiens et qu’un autre avait succombé à ses blessures parce qu’il n’avait pas reçu de soins médicaux à temps. À la connaissance d’Amnesty International, ces violences n’ont pas donné lieu à des poursuites pénales.

Violences contre les femmes

Selon les chiffres officiels, au cours des huit premiers mois de 2005, 835 agressions sexuelles contre des femmes, des jeunes filles et des fillettes ont été signalées.
Dans 67 p. cent des cas les victimes étaient mineures, et 16 p. cent des agressions se sont déroulées sous la menace d’une arme à feu. La plupart des violences subies par des femmes ont été infligées par un partenaire intime. Les taux d’infection par le VIH ont augmenté chez les femmes et les jeunes filles ; les personnes vivant avec le VIH/sida étaient en butte à des discriminations systématiques.
D’après les informations reçues, les enquêtes de routine sur les agressions sexuelles étaient peu satisfaisantes et, malgré l’existence d’unités spécialement chargées de travailler avec les victimes de ce type de violences, les enquêtes finissaient fréquemment par être confiées aux services de police ordinaires.
Des modifications visant à réformer et mettre à jour la Loi relative aux crimes et aux délits contre les personnes et la Loi relative à la répression de l’inceste n’ont toujours pas été approuvées ; elles avaient été soumises à l’approbation du Parlement en 1995. Le viol conjugal n’était toujours pas considéré comme une infraction pénale. Dans les affaires de sévices sexuels, et uniquement dans ces dossiers, les juges avaient la consigne de prévenir les jurés que les femmes et les jeunes filles avaient parfois tendance à mentir.
Au mois de novembre, la Jamaïque a ratifié la Convention interaméricaine sur la prévention, la sanction et l’élimination de la violence contre la femme (Convention de Belém do Pará).

Gays et lesbiennes

Cette année encore, les gays et les lesbiennes étaient quotidiennement la cible de violences et de discrimination. En août, deux hommes ont été condamnés pour sodomie à une peine de deux ans de travaux forces avec sursis et mise à l’épreuve pendant deux ans. Au cours de précédentes audiences, une foule rassemblée devant le tribunal les avait couverts d’injures. Au mois de septembre, Buju Banton, un musicien en vogue, a été inculpé d’agression sur six hommes qui, selon lui, étaient homosexuels. Nombre de ses chansons prônaient la violence contre les gays et les lesbiennes. En novembre, Steven Harvey, militant de la lutte contre le sida, a été assassiné en raison, semble-t-il, de son homosexualité.

Visites d’Amnesty International

Aux mois d’avril et de novembre, des délégations d’Amnesty International se sont rendues à la Jamaïque pour s’entretenir avec des organisations non gouvernementales luttant contre la violence envers les femmes dans le pays. En novembre, une délégation d’observateurs était sur place pour le procès de six policiers accusés de meurtre.

Toutes les infos
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit