EQUATEUR

L’agitation sociale s’est poursuivie. Les forces de sécurité auraient fait usage d’une force excessive contre des manifestants. Les taux de mortalité materno-infantile restaient élevés et la violence au foyer demeurait un motif de préoccupation. Des informations ont fait état d’actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements. Les conditions carcérales étaient toujours aussi difficiles. Près d’une centaine d’homicides ont été signalés à la frontière colombienne.






Contexte
Rafael Correa a remporté l’élection présidentielle de novembre, porté par son programme de réformes constitutionnelles, économiques et sociales. Il devait entrer en fonction en janvier 2007.
L’ancien chef de l’État, Lucio Gutiérrez, a été libéré à la suite de son acquittement des chefs de corruption et d’atteinte à la sécurité de l’État.
En novembre, trois juges de la nouvelle Cour suprême, nommés sous le gouvernement provisoire d’Alfredo Palacio, ont été destitués à la suite d’allégations de corruption.

Manifestations
L’agitation sociale a été une constante tout au long de l’année : des manifestations ont été lancées pour protester contre les politiques économiques et dénoncer l’impact des industries extractives sur les moyens de subsistance de la population. De très nombreux manifestants auraient été blessés et des membres de la police et de l’armée auraient fait un usage excessif de la force.
Dans plusieurs provinces, l’état d’urgence a été décrété pour des périodes d’au moins soixante jours à la suite des troubles. Les mesures prises à la faveur de l’état d’urgence ont conduit à une suspension des libertés d’expression, de circulation et d’association ; elles permettaient également aux forces de sécurité de perquisitionner chez des particuliers sans mandat.

Défenseurs des droits humains
Cette année encore, des défenseurs des droits humains, des dirigeants communautaires et des écologistes qui dénonçaient les politiques du gouvernement et les effets néfastes des industries extractives ont été la cible de menaces et d’actes d’intimidation. Certains ont eu à répondre d’accusations infondées.
Les membres d’un service juridique qui défendait des communautés indigènes dans le cadre d’une action en justice contre une multinationale pétrolière ont été menacés à plusieurs reprises ; ils poursuivaient la compagnie en justice pour n’avoir jamais nettoyé les zones qu’elle avait polluées par des décennies de forage (de 1964 à 1992) dans la région de Sucumbíos. Aucune enquête n’a été ouverte et aucune des victimes n’a bénéficié d’une protection, bien que la Commission interaméricaine des droits de l’homme ait ordonné des mesures en ce sens.

Droit à la santé
La mortalité materno-infantile demeurait élevée. Les femmes et les enfants démunis n’avaient toujours pas accès gratuitement aux services de maternité et de pédiatrie, un droit pourtant garanti par une loi de 1994. Le gouvernement n’aurait pris aucune mesure pour faire en sorte que les femmes pauvres soient dûment et clairement informées de leurs droits.

Droits des femmes
Les violences domestiques demeuraient un motif de préoccupation. Le nombre de plaintes déposées dans les 30 commissariats spécialisés dans les affaires de violences contre les femmes et la famille aurait augmenté en 2006. Selon le Bureau de défense des droits de la femme, cette hausse s’expliquerait en partie par la promotion de la Loi de 1995 relative à la violence contre les femmes et la famille, ainsi que par l’amélioration de la formation des services de police concernant les mesures à prendre en cas de violences envers les femmes.

Torture et mauvais traitements
En février, le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire a exprimé ses inquiétudes devant le fait que la torture et les mauvais traitements étaient couramment utilisés dans les postes de police pour punir des suspects ou leur soutirer des aveux.
Cette année encore, des policiers et des militaires accusés d’atteintes aux droits humains ont été jugés par des tribunaux militaires ou de police qui n’étaient ni indépendants ni impartiaux. Dans l’immense majorité des cas, les responsables présumés n’ont pas été tenus de rendre des comptes.
À la fin de l’année, 20 policiers condamnés à des peines d’emprisonnement allant de deux à seize ans pour la disparition forcée, en 2000, d’Elías López Pita, étaient toujours en liberté.

Conditions carcérales
D’avril à juin, des mesures d’urgence ont été prises pour les prisons surpeuplées du pays. Ces dispositions ont été imposées à la suite de problèmes de sécurité apparus à l’intérieur des établissements et d’une grève lancée par le personnel pénitentiaire pour exiger un meilleur financement. Le gouvernement a annoncé un investissement d’environ six millions d’euros pour améliorer les conditions de détention.
En septembre, la Cour constitutionnelle a confirmé son arrêt de 2003 dans lequel elle déclarait inconstitutionnel un article du Code de procédure pénale refusant aux suspects détenus dans l’attente du prononcé de leur peine le droit d’être libérés sous condition. De 5 000 à 7 000 détenus, sur une population carcérale totale de 14 000 personnes, seraient en attente de jugement.

Droits des minorités ethniques
Le rapporteur spécial sur la situation des droits de l’homme et des libertés fondamentales des populations autochtones [ONU] s’est déclaré préoccupé par les restrictions en matière d’éducation et de santé auxquelles ces populations étaient soumises et par les répercussions des activités des industries extractives sur leur environnement et leurs conditions de vie. Il s’est aussi inquiété du non-respect des garanties constitutionnelles en vertu desquelles les populations autochtones doivent être consultées sur tout projet d’exploitation du sous-sol prévu dans leurs territoires. Selon certaines allégations, des militaires chargés de garantir la sécurité des compagnies extractives ont commis diverses atteintes aux droits humains.

Homicides à la frontière colombienne
De nouvelles incursions en territoire équatorien de groupes armés et de militaires colombiens ont été signalées. Depuis la mise en œuvre, en 2000, du Plan Colombia (Plan Colombie), un programme d’assistance militaire soutenu par les États-Unis, les organisations de défense des droits humains ont recensé plus de 700 homicides, dont près d’une centaine en 2006, dans la province de Sucumbíos. Nombre des victimes étaient des civils, hommes, femmes et enfants, accusés d’être des délinquants de droit commun ; certaines présentaient des traces de torture. Selon des témoins, des policiers et des militaires sont impliqués dans certains de ces meurtres qui, dans la plupart des cas, n’ont pas été dénoncés par les proches des victimes ou n’ont pas fait l’objet d’enquêtes de la part des autorités, par crainte de représailles. D’après certaines informations, des témoins, des procureurs, des policiers, des gouverneurs et d’autres personnalités locales ont été menacés.

Visites d’Amnesty International
Une délégation d’Amnesty International s’est rendue en Équateur en octobre.

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