ETATS-UNIS

Des milliers de personnes étaient toujours détenues par les États-Unis, sans inculpation ni jugement, en Irak, en Afghanistan et sur la base navale américaine de Guantánamo Bay, à Cuba. En juin, la Cour suprême a invalidé les commissions militaires instituées par le président Bush et annulé la décision de ce dernier de ne pas appliquer l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 aux personnes détenues en raison de leurs liens présumés avec les talibans ou avec Al Qaïda. Le Congrès a adopté la Loi relative aux commissions militaires : ce texte ôte aux tribunaux fédéraux la possibilité d’examiner les requêtes en habeas corpus introduites par ces détenus et prévoit que ceux-ci seront jugés par une commission militaire, modifiant ainsi la Loi relative aux crimes de guerre. En septembre, le président Bush a confirmé l’existence d’un programme de détentions secrètes dirigé par la CIA. D’après certaines informations, des soldats américains déployés en Irak se seraient rendus coupables d’exécutions extrajudiciaires ; un certain nombre d’entre eux ont fait l’objet de poursuites. Cette année encore, aucun haut responsable n’a été amené à rendre des comptes pour les actes de torture et les autres mauvais traitements infligés aux personnes arrêtées dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme », malgré les éléments de preuve établissant le caractère systématique de ces violences. Des informations ont fait état de brutalités policières et de mauvais traitements dans des centres de détention situés sur le territoire américain. Plus de 70 personnes sont mortes après avoir été touchées par des fléchettes de pistolets paralysants utilisés par la police. Cinquante-trois personnes ont été exécutées dans 14 États à travers le pays.








Loi relative aux commissions militaires

En juin, dans l’affaire Hamdan c. Rumsfeld, la Cour suprême a déclaré illégales les commissions militaires qui avaient été créées par décret militaire en novembre 2001 pour juger les étrangers détenus comme « combattants ennemis » dans la « guerre contre le terrorisme ». Avant que cet arrêt ne soit rendu, 10 étrangers avaient été cités à comparaître devant des commissions de cette nature. La Cour annulait également la décision du chef de l’État de ne pas appliquer l’article 3 commun aux quatre Conventions de Genève de 1949 aux détenus soupçonnés de relations avec les talibans ou avec Al Qaïda. Le texte de cet article 3 dispose que les personnes détenues lors de conflits armés doivent être traitées avec humanité et bénéficier d’un procès équitable. En septembre, le président Bush a confirmé que la Central Intelligence Agency (CIA, les services de renseignements) avait dirigé un programme secret de détentions au titre duquel certaines personnes appréhendées dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme » avaient été placées en détention au secret et soumises à des techniques d’interrogatoire « différentes ». Le chef de l’État a déclaré que la décision de la Cour suprême avait hypothéqué l’avenir de ce programme secret.
Fin septembre, le Congrès a adopté la Loi relative aux commissions militaires. Si ce texte est déclaré conforme à la Constitution, il privera les tribunaux américains de la possibilité d’examiner les requêtes en habeas corpus (procédure permettant la comparution immédiate d’un détenu devant une autorité judiciaire afin d’examiner le bien-fondé de la détention) contestant la légalité, ou même les conditions, de la détention de tout étranger détenu par les États-Unis en tant que « combattant ennemi », quel que soit son lieu d’incarcération. Le 13 décembre, un juge fédéral a rejeté la requête en habeas corpus introduite par un détenu de Guantánamo, Salim Ahmed Hamdan, qui à cette date était détenu par les États-Unis depuis plus de cinq ans sans jugement. Le magistrat a estimé que la Loi relative aux commissions militaires était rétroactive, que de ce fait Salim Ahmed Hamdan n’était pas habilité à introduire cette requête et que, en tant qu’étranger détenu en dehors d’un territoire sous souveraineté américaine, il n’avait aucun droit constitutionnel à l’habeas corpus.
La loi autorisait en outre le chef de l’État à créer de nouvelles commissions militaires afin de juger les « combattants ennemis étrangers et illégaux » – une définition très large qui permet d’inclure les civils capturés loin de tout champ de bataille. Ces nouvelles commissions seraient habilitées à prononcer des condamnations à la peine capitale, à l’issue de procédures dont il semble très peu probable qu’elles présentent des garanties d’équité.
De plus, la Loi relative aux commissions militaires interdisait aux détenus d’invoquer les Conventions de Genève de 1949 dans toute action en justice. Son effet rétroactif la faisait entrer en vigueur dès 1997. Le texte limitait, par ailleurs, la portée de la Loi relative aux crimes de guerre, en omettant d’ériger expressément en infraction les violations de l’interdiction, prévue à l’article 3 commun aux Conventions de Genève, des procès iniques ou des « atteintes à la dignité des personnes », notamment les traitements humiliants et dégradants. En juillet, au cours d’une audience devant le Sénat, six avocats militaires (encore en exercice pour certains) ont admis que certaines techniques d’interrogatoire employées par les États-Unis dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme » transgressaient l’article 3.

« Restitutions » et détentions secrètes
En septembre, le président Bush a annoncé que 14 détenus dits de « grande valeur », placés au secret pour des durées variables allant jusqu’à quatre ans et demi dans le cadre du programme secret de la CIA, avaient été transférés à la base de Guantánamo. Amnesty International considérait que certains d’entre eux au moins avaient été victimes de disparition forcée. Exception faite de ces 14 détenus, on ignorait toujours le lieu de détention d’un certain nombre d’autres personnes ainsi que le sort qui leur était réservé.
Lors des procès devant les tribunaux fédéraux, le gouvernement a veillé à ce que toute information sur le programme secret de la CIA dont auraient pu disposer les 14 détenus transférés depuis peu (lieu des centres de détention secrets ou techniques d’interrogatoire, par exemple) demeure confidentielle.
En juin, la Commission des questions juridiques et des droits de l’homme du Conseil de l’Europe a rendu son rapport d’enquête sur les détentions secrètes et les « restitutions » (transferts secrets et illégaux de détenus d’un pays à un autre) ayant eu lieu en Europe. Le rapport concluait que les États-Unis – qui ont le statut d’observateur au Conseil de l’Europe – avaient été les « principaux architectes » d’un système « répréhensible » de détentions secrètes et de transferts illégaux. Il confirmait les conclusions d’Amnesty International selon lesquelles plusieurs cas de « restitutions » avaient eu lieu avec le concours ou la coopération d’États membres du Conseil de l’Europe. La Commission a exhorté les États-Unis et les États européens à mettre un terme aux « restitutions » et à ouvrir des enquêtes indépendantes sur ces pratiques.

Guantánamo
À la fin de l’année, autour de 395 personnes de quelque 30 nationalités étaient toujours détenues sans inculpation ni jugement sur la base navale américaine de Guantánamo. Certaines s’y trouvaient depuis près de cinq ans.
En février, cinq experts des Nations unies, dont le rapporteur spécial sur la torture, ont remis leur rapport d’enquête sur les conditions de détention à Guantánamo, demandant la fermeture du centre. Ils ont jugé que certains mauvais traitements présumés s’apparentaient à des actes de torture, notamment le recours à l’isolement et à une force excessive, ainsi que la violence avec lesquels des détenus avaient été nourris de force lors d’une grève de la faim.
En mai, le Comité contre la torture [ONU] a également demandé la fermeture de Guantánamo, soulignant que la détention indéfinie sans inculpation constituait une violation de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. En juillet, le Comité des droits de l’homme [ONU] a exhorté les États-Unis à faire en sorte que toutes les personnes détenues à Guantánamo puissent « sans délai » contester la légalité de leur détention devant un tribunal.
En juin, trois détenus sont morts à Guantánamo ; selon toute apparence, ils se seraient suicidés. Parmi eux se trouvaient Abdullah Yahia al Zahrani qui, selon les informations disponibles, était âgé de dix-sept ans lorsqu’il a été placé en détention. Ces décès ont renforcé les inquiétudes quant à la gravité des répercussions psychologiques d’une détention illimitée.


Détention en Afghanistan et en Irak

Des centaines de personnes étaient toujours détenues sans inculpation ni jugement sur la base aérienne américaine de Bagram, en Afghanistan. De plus, elles n’avaient pas la possibilité de faire examiner la légalité de leur détention. Certaines étaient détenues depuis plus de deux ans sans avoir pu consulter un avocat, entrer en contact avec leurs proches ou être déférées à un tribunal. En novembre, les autorités américaines ont indiqué que, dans un délai d’un an, un « pourcentage important » d’Afghans détenus à Bagram pourraient être transférés et remis aux autorités de leur pays. Elles ont déclaré en outre que certaines personnes, de nationalité afghane ou non, seraient néanmoins maintenues en détention à Bagram ou encore transférées à Guantánamo.
Des milliers de personnes étaient détenues par les forces américaines en Irak. Plusieurs centaines d’entre elles avaient été incarcérées pour des raisons de « sécurité », avant la passation de pouvoir au gouvernement intérimaire irakien en juin 2004 ; aucune procédure d’examen de la légalité de la détention n’était prévue dans leur cas. Les personnes arrêtées après cette date étaient dans un premier temps soumises – souvent en leur absence – à un réexamen de leur détention par un magistrat. Un nouvel examen était ensuite effectué par un organe non judiciaire tous les six mois.

Homicides illégaux commis hors du territoire des États-Unis par les forces américaines
En Irak, des soldats américains auraient commis sur des civils un certain nombre d’exécutions extrajudiciaires et d’homicides illégaux.
En novembre, un soldat qui comparaissait pour le viol d’une jeune Irakienne de quatorze ans et pour le meurtre de celle-ci et de trois membres de sa famille, à Mahmudiya, en mars, a plaidé coupable devant un tribunal militaire. Il a été condamné à la réclusion à perpétuité. Dans cette même affaire, trois autres soldats avaient à répondre d’accusations de viol et de meurtre, mais aussi d’incendie volontaire, pour avoir brûlé le corps de la jeune fille afin de dissimuler des preuves. Un cinquième soldat, déjà rendu à la vie civile pour raisons psychiatriques au moment de son inculpation, a plaidé non coupable devant un tribunal fédéral civil.
Huit soldats ont été accusés de l’enlèvement et du meurtre, en avril, dans la ville d’Hamdania, d’Hashim Ibrahim Awad, un homme de cinquante-deux ans. Ils étaient accusés de l’avoir traîné hors de son domicile et de l’avoir abattu alors qu’il était immobilisé. Quatre soldats ont reconnu leur culpabilité dans des infractions liées à ce meurtre et ont été condamnés à des peines allant de cinq à dix ans d’emprisonnement. Celles-ci ont cependant été ramenées à des durées comprises entre douze et vingt et un mois d’incarcération, conformément aux transactions conclues avant le procès. Les procès des autres accusés n’étaient pas terminés fin 2006.
Au Pakistan, 13 à 18 personnes, dont cinq enfants, ont été tuées par des missiles Hellfire tirés, le 13 janvier, sur trois maisons du village de Damadola Burkanday, dans le nord-ouest du pays. D’après les informations reçues, les missiles avaient été tirés à partir d’avions américains et visaient Ayman al Zawahiri, un haut responsable d’Al Qaïda.

Détention de « combattants ennemis » aux États-Unis
Ali Saleh Kahlah al Marri, ressortissant du Qatar, était maintenu en détention, sans avoir été inculpé ni jugé, dans un établissement militaire de Caroline du Sud. Il se trouvait en cellule d’isolement et n’était autorisé à recevoir ni visite ni appel téléphonique de sa famille depuis plus de trois ans. En novembre, le gouvernement a introduit une requête afin que l’action en justice intentée par Ali al Marri pour contester la légalité de sa détention soit annulée, au motif que, en vertu de la Loi relative aux commissions militaires, les tribunaux fédéraux n’étaient plus compétents dans cette affaire. Aucune décision n’avait été rendue fin 2006.
En octobre, les avocats de José Padilla, un citoyen américain qui avait été détenu en tant que « combattant ennemi », ont cherché à obtenir un non-lieu en sa faveur, au motif qu’il avait été torturé pendant plus de trois ans alors qu’il était détenu au secret par l’armée américaine. À la fin de l’année, on attendait une décision sur cette requête.


Torture et mauvais traitements

Cette année encore, rien n’a été fait pour que les agents américains aient à répondre des actes de torture et des autres formes de mauvais traitements infligés dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme », notamment des sévices impliqués par certaines techniques d’interrogatoire autorisées par de hauts responsables de l’administration. Bien que quelques soldats de grade généralement subalterne aient été traduits devant un tribunal militaire, fin 2006 aucun agent américain n’avait été inculpé de torture au titre de la loi prohibant la torture hors du territoire américain, ni de crimes de guerre en vertu de la Loi relative aux crimes de guerre. Le Comité contre la torture et le Comité des droits de l’homme [ONU] se sont dits inquiets de l’indulgence régnante et de l’impunité dont semblaient jouir les agents américains.
À la fin de l’année, un seul employé de la CIA avait été traduit en justice pour des atteintes aux droits humains commises dans le cadre de la « guerre contre le terrorisme ». En août, David Passaro, un agent privé de la CIA, a été reconnu coupable de coups et blessures infligés lors du passage à tabac du détenu afghan Abdul Wali, mort en 2003 sur une base militaire américaine en Afghanistan. À la fin de l’année, aucune autre inculpation n’avait été prononcée dans les 19 affaires de violations présumées des droits humains impliquant des civils ou des agents de la CIA et portées devant le ministère de la Justice des États-Unis.
Une version révisée du manuel de terrain du combattant a été publiée en septembre ; elle rappelait l’interdiction des traitements cruels, inhumains ou dégradants envers tous les détenus – une position dont le gouvernement avait autrefois déclaré qu’elle ne s’appliquait pas aux « combattants ennemis illégaux ». D’autre part, le manuel interdisait expressément le recours à certaines techniques au cours des interrogatoires, dont l’humiliation sexuelle, la présence de chiens, le port forcé de cagoules, le simulacre de noyade et d’exécution, et la privation d’eau et de nourriture. Ce texte ne s’appliquait toutefois pas aux interrogatoires de la CIA menés en dehors d’un établissement dirigé par l’armée.
Le 6 décembre, le citoyen américain Roy Belfast Jr (également appelé Charles Taylor Jr), fils de Charles Taylor, ancien président du Libéria, a été la première personne à être accusée de torture au titre de la loi prohibant la torture hors du territoire américain. L’acte d’accusation portait sur des tortures infligées à une personne en juillet 2002, à Monrovia, au Libéria.

Mauvais traitements en prison et en garde à vue
Certaines informations ont fait état de mauvais traitements infligés à des suspects se trouvant en prison ou en garde à vue, y compris un recours abusif aux méthodes de contrainte et aux armes à décharges électriques. Plus de 70 personnes sont mortes après avoir été touchées par des fléchettes de pistolets paralysants (à décharges électriques), ce qui portait à plus de 230 le nombre total de personnes décédées dans des circonstances analogues depuis 2001.
En juin, le ministère de la Justice a annoncé que le National Institute of Justice (NIJ, Institut national de la justice) allait entreprendre une étude sur deux ans consacrée aux morts liées à l’utilisation des pistolets paralysants. De nombreux services de police ont néanmoins continué à utiliser ce type d’armes dans des situations très loin de présenter une quelconque menace pour la vie des personnes présentes. Le Comité contre la torture a lancé un appel aux États-Unis afin que les pistolets paralysants soient uniquement utilisés comme une alternative non meurtrière aux armes à feu.
En août, Raul Gallegos-Reyes est mort dans la prison du comté d’Arapahoe, dans le Colorado, après avoir été touché plusieurs fois par un pistolet paralysant puis attaché sur une chaise d’immobilisation, pour avoir crié et frappé sur la porte de sa cellule. Le coroner (officier de justice chargé de faire une enquête en cas de mort violente, subite ou suspecte) a conclu à une mort par « asphyxie posturale », due à la position de contrainte de la victime, et a jugé qu’il s’agissait d’un homicide.
En juillet, au cours d’un procès intenté contre la prison du comté de Garfield, également dans le Colorado, il est apparu que les prisonniers étaient souvent attachés sur des chaises d’immobilisation où, après leur avoir envoyé des fléchettes paralysantes ou les avoir aspergés de gaz poivre, on les laissait des heures durant dans des positions douloureuses. En outre, des gardiens auraient raillé des détenus qui portaient des ceintures électriques à télécommande pendant leur transfert jusqu’au tribunal, en les menaçant de leur envoyer des décharges. L’établissement pénitentiaire n’avait pas, semble-t-il, de ligne de conduite bien définie en matière de recours aux méthodes de contrainte.
De mauvais traitements infligés par la police à des personnes lesbiennes, gays, bisexuelles et transgenres ont été signalés, et les agents de la force publique ne réagissaient pas toujours de manière adéquate aux crimes dont ces personnes étaient victimes en raison de leur identité.
Après son arrestation, Mariah López, une femme transgenre, aurait subi des violences physiques et verbales de la part de policiers new-yorkais et d’employés de l’établissement pénitentiaire municipal où elle a été détenue. À la suite de ces coups elle aurait eu une fracture du cartilage nasal, une dent cassée et de nombreuses écorchures. Elle a, par ailleurs, été soumise à des fouilles au corps à caractère humiliant.
Christina Sforza, une autre femme transgenre, aurait été agressée dans un restaurant de New York. Les policiers qui sont intervenus sur les lieux l’ont arrêtée et ont refusé de recueillir la plainte qu’elle souhaitait déposer contre son agresseur. Les poursuites pour agression qui avaient été engagées contre elle ont finalement été abandonnées.

Prisons de très haute sécurité
Cette année encore, des milliers de prisonniers étaient enfermés dans des établissements de très haute sécurité (« supermax »), en isolement cellulaire de longue durée, dans des conditions qui s’apparentaient dans certains cas à des traitements cruels, inhumains ou dégradants.
En novembre, une cour d’appel fédérale a jugé inconstitutionnelles les conditions de détention présumées d’un « programme de modification du comportement » d’une prison de très haute sécurité du Wisconsin. Dans une action en justice intentée au nom d’un détenu emprisonné en 2002 dans le cadre de ce programme, il était affirmé que cet homme avait été privé de vêtements et de matériel de couchage, enfermé dans une cellule exiguë et nue, et nourri uniquement d’aliments réduits en purée et agglomérés en forme de pain. Ces conditions de détention auraient eu des conséquences particulièrement néfastes sur sa santé mentale. L’affaire a été renvoyée devant un tribunal de première instance afin qu’une décision soit rendue sur les faits, dont certains étaient contestés.

Femmes en prison
En mai, le Vermont a été le 50e et dernier État à adopter une loi protégeant les femmes en détention des violences sexuelles commises par les gardiens, en érigeant en infraction tout contact sexuel entre détenues et personnel pénitentiaire. Toutefois, aux États-Unis, de nombreuses femmes incarcérées demeuraient exposées à un risque de sévices en raison des directives autorisant le personnel masculin à effectuer des fouilles par palpation sur les détenues et à observer celles-ci lorsqu’elles se lavent ou s’habillent dans leurs cellules. La plupart des États permettaient aux gardiens de sexe masculin d’accéder sans surveillance aux prisons pour femmes, selon une disposition non conforme aux normes internationales.
Les autorités de 23 États, tout comme le Federal Bureau of Prisons (BOP, Bureau fédéral des prisons), permettaient d’entraver les détenues en train d’accoucher, une pratique qu’Amnesty International considère inhumaine et dégradante mais aussi potentiellement dangereuse pour la santé de la mère et celle de son bébé.

Prisonniers d’opinion
Une sous-officière de la Garde nationale des États-Unis, Katherine Jashinski, a purgé une peine d’un mois de prison après avoir été condamnée, en mai, à cent vingt jours de réclusion pour avoir refusé de servir en Afghanistan pour des raisons de conscience.
Kevin Benderman, sergent dans l’armée américaine, a été remis en liberté au mois d’août. Il avait purgé douze des quinze mois d’incarcération auxquels il avait été condamné parce qu’il avait refusé de repartir en Irak pour des raisons de conscience.
Fin 2006, plusieurs autres soldats n’ayant pas accepté d’être envoyés en Irak en raison de leur opposition à la guerre risquaient d’être poursuivis.


Peine de mort

En 2006, 53 personnes ont été exécutées dans 14 États, ce qui portait à 1 057 le nombre total de prisonniers mis à mort depuis la reprise des exécutions en 1977. Le nombre d’exécutions ayant eu lieu en 2006 était le plus faible depuis dix ans, tandis que le nombre de condamnations à mort continuait de diminuer depuis le niveau record atteint au milieu des années 1990. Des recours en inconstitutionnalité contre la méthode de mise à mort par injection étaient engagés. En décembre, les exécutions ont été suspendues en Californie et en Floride en attendant que soient résolus certains problèmes liés aux méthodes d’exécution. Des personnes atteintes de graves troubles mentaux ont, cette année encore, été condamnées à mort.
Clarence Allen, un Amérindien, a été exécuté en Californie le 17 janvier, au lendemain de son soixante-seizième anniversaire. Dans l’antichambre de la mort depuis vingt-trois ans, il ne pouvait plus quitter son fauteuil roulant et était quasiment aveugle. Clarence Allen souffrait également de diabète et d’une affection du cœur à un stade avancé. Il avait eu un grave infarctus en 2005.
Bobby Wilcher a été exécuté dans le Mississippi le 18 octobre, après plus de dix années dans un quartier des condamnés à mort tristement célèbre pour ses mauvaises conditions de détention, notamment pour la médiocrité des soins psychiatriques, le grand isolement des détenus et le manque d’hygiène. Cet homme souffrait de troubles bipolaires, une maladie mentale grave ; de plus, il avait des antécédents de troubles psychologiques et avait notamment commis plusieurs tentatives de suicide. Le 24 mai, Bobby Wilcher avait formé une requête devant le tribunal demandant que tous les recours qui lui restaient soient abandonnés. En juillet, il avait informé son avocat qu’il avait changé d’avis, faisant par la suite deux déclarations sous serment en ce sens. Les tribunaux ont toutefois rejeté toutes les requêtes qu’il avait introduites en vue de pouvoir exercer de nouveau ses droits de recours.
Angel Nieves Diaz a été exécuté par injection létale le 31 janvier en Floride, après avoir passé dans le quartier des condamnés à mort vingt années pendant lesquelles il n’a cessé de clamer son innocence. L’exécution a eu lieu bien qu’un témoin à charge ayant joué un rôle clé en première instance soit revenu sur ses déclarations. Elle a duré trente-quatre minutes, et il a fallu doubler la dose de produit létal pour tuer Angel Diaz. Des témoins ont raconté l’avoir vu grimacer de douleur et suffoquer pendant sa mise à mort.

Autres motifs de préoccupation
Daniel Strauss et Shanti Sellz, inculpés de transport d’immigrés clandestins, ont bénéficié en septembre d’un non-lieu prononcé par un juge fédéral. Ces deux personnes avaient été arrêtées après avoir conduit aux urgences trois Mexicains sans papiers, trouvés dans le désert de l’Arizona alors qu’ils étaient blessés et fortement déshydratés.
Plusieurs projets de loi visant à durcir le contrôle de l’immigration étaient en instance d’examen au Congrès à la fin de l’année. Ils contenaient notamment des mesures destinées à étendre les procédures d’expulsion simplifiées, appelées « expulsions accélérées ». En octobre, le Congrès a adopté une loi autorisant le financement de l’édification d’une clôture renforcée le long d’un tiers de la frontière mexicaine.
Amnesty International a interpellé le gouvernement des États-Unis à propos de son refus de délivrer des visas aux épouses de René Gonzáles et de Gerardo Hernández, toutes deux de nationalité cubaine, afin qu’elles puissent se rendre aux États-Unis et visiter leurs maris en prison. Les deux hommes, également Cubains, purgeaient de lourdes peines de réclusion aux États-Unis.


Le Comité contre la torture et le Comité des droits de l’homme

En mai et en juillet, le Comité contre la torture et le Comité des droits de l’homme ont fait des recommandations aux autorités américaines, les exhortant notamment à mettre un terme aux détentions secrètes et aux disparitions forcées, et à fermer Guantánamo. Le Comité contre la torture a également demandé la suppression des techniques d’interrogatoire cruelles et l’ouverture d’enquêtes exhaustives et impartiales sur les actes de torture et les autres mauvais traitements infligés, y compris sur le rôle de certains hauts responsables de l’État à cet égard.
En ce qui concerne la politique intérieure, les deux Comités ont sollicité l’adoption de restrictions strictes concernant le recours aux décharges électriques, un réexamen de la sévérité des conditions de détention dans les « prisons à sécurité maximale », ainsi que des mesures destinées à empêcher les violences sexuelles à l’encontre des prisonniers et l’imposition d’entraves aux détenues en train d’accoucher. Le Comité des droits de l’homme a, par ailleurs, demandé un moratoire sur les exécutions, ainsi que l’interdiction, pour les mineurs, des peines de réclusion à perpétuité sans possibilité de libération conditionnelle. Il s’est dit préoccupé par le fait que les plus démunis, en particulier les Afro-Américains, avaient été désavantagés par les dispositifs de secours et d’évacuation mis en place au lendemain de l’ouragan Katrina, en août 2005, et continuaient d’être défavorisés dans les projets de reconstruction. Il a exhorté le gouvernement à faire en sorte que les droits de ces personnes soient totalement pris en compte pour ce qui est de l’accès au logement, à l’éducation et aux soins de santé.

Visites d’Amnesty International
Des délégués d’Amnesty International se sont rendus aux États-Unis en février. En novembre, une délégation s’est déplacée en France et en Allemagne afin d’interroger d’anciens détenus de Guantánamo.


Autres documents d’Amnesty International


 États-Unis. Après Stonewall, quel horizon ? Violences policières contre les populations gays, lesbiennes, bisexuelles et transgenres (AMR 51/001/2006).

 USA : The execution of mentally ill offenders (AMR 51/003/2006).

 États-Unis. Guantánamo : des vies brisées. Les conséquences de la détention illimitée pour les détenus et leurs familles (AMR 51/007/2006).

 USA : Amnesty International’s continuing concerns about taser use (AMR 51/030/2006).

 États-Unis. Hors de portée des radars : vols secrets, torture et « disparition » (AMR 51/051/2006).

 États-Unis. Communication complémentaire d’Amnesty International adressée au Comité des Nations unies contre la torture (AMR 51/061/2006).

 États-Unis. Mémorandum au gouvernement des États-Unis sur le rapport du Comité de l’ONU contre la torture et sur la fermeture de Guantánamo (AMR 51/093/2006).

 USA : More about politics than child protection — The death penalty for sex crimes against children (AMR 51/094/2006).

 USA : Updated briefing to the Human Rights Committee on the implementation of the International Covenant on Civil and Political Rights (AMR 51/111/2006).

 États-Unis. La justice, enfin, ou le statu quo ? Détentions et procès après l’affaire Hamdan c. Rumsfeld (Résumé) (AMR 51/146/2006).

 États-Unis. « Restitution » – torture – procès ? Le cas de Mohamedou Ould Slahi, détenu à Guantánamo (AMR 51/149/2006).

 USA : Military Commissions Act of 2006 – Turning bad policy into bad law (AMR 51/154/2006).

 USA : Five years on ‘the dark side’ – A look back at ‘war on terror’ detentions (AMR 51/195/2006).

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