COREE DU NORD

Les violations systématiques des droits humains, notamment du droit à la vie et du droit à l’alimentation, se poursuivaient. Le droit de circuler librement, ainsi que la liberté d’expression et d’association, étaient fortement restreints. Les observateurs indépendants n’avaient qu’un accès restreint au pays. De nombreuses informations faisaient état de cas de disparitions forcées de proches de personnes ayant quitté le pays ou y ayant été renvoyées de force. Malgré certaines modifications du Code pénal, le recours à l’emprisonnement, à la torture et à la peine de mort pour des raisons politiques, et dans certains cas arbitraires, se poursuivait.






Contexte
La Corée du Nord a procédé à des tests de missiles en juillet, puis, pour la première fois, à un essai nucléaire en octobre.
Le Conseil de sécurité des Nations unies a adopté la résolution 1695 afin d’exprimer sa désapprobation quant aux tests de missiles. En octobre, au lendemain de l’essai nucléaire, il a adopté à l’unanimité la résolution 1718 demandant à la Corée du Nord d’abandonner toutes ses armes nucléaires et imposant des sanctions financières ainsi que des sanctions en matière d’armement. Les deux résolutions appelaient la Corée du Nord à reprendre sans condition préalable les pourparlers à six sur son programme nucléaire, qui se trouvaient alors au point mort. Par ailleurs, la résolution 1718 invoquait le chapitre VII de la Charte des Nations unies, aux termes duquel le Conseil de sécurité dispose des pouvoirs lui permettant d’assurer le maintien de la paix, sans pour autant menacer la Corée du Nord d’un recours à la force si elle ne se conformait pas à ses obligations. Suspendus depuis treize mois, les pourparlers à six (réunissant la Chine, les deux Corées, les États-Unis, le Japon et la Russie) en vue de résoudre la crise nucléaire nord-coréenne ont repris en décembre à Beijing. Ils n’ont pas abouti.
En novembre, la Troisième Commission de l’Assemblée générale des Nations unies a adopté sa deuxième résolution condamnant le bilan de la Corée du Nord en matière de droits humains.
En juillet, puis en octobre, de graves inondations ont entraîné la mort ou la disparition de plusieurs milliers de personnes.

Aggravation de la crise alimentaire
Le rapporteur spécial des Nations unies sur le droit à l’alimentation a annoncé, en octobre, que 12 p. cent de la population souffrait de malnutrition aiguë. En raison des inondations, il était à craindre que les récoltes soient beaucoup moins importantes que l’année précédente.
Selon un document datant du mois de mai, le Programme alimentaire mondial (PAM) devait mettre en œuvre un programme sur deux ans prévoyant la livraison de 150 000 tonnes de céréales à 1,9 million de Nord-Coréens parmi les plus nécessiteux, notamment les femmes et les enfants. En octobre, le PAM n’avait semble-t-il reçu que 8 p. cent des 102 millions de dollars des États-Unis (78 millions d’euros environ) nécessaires.

Nord-Coréens en Asie
Selon certaines sources, environ 100 000 Nord-Coréens vivaient clandestinement en Chine dans la crainte constante de l’expulsion. On estimait que, chaque semaine, entre 150 et 300 d’entre eux étaient renvoyés de force de Chine. Dans ce pays, la plupart des Nord-Coréennes étaient, semble-t-il, exposées à des atteintes aux droits humains (viols et prostitution, entre autres).
En Thaïlande, 175 Nord-Coréens ont été appréhendés en août à Bangkok, puis 86 autres en octobre et 50 autres en novembre. D’après les informations recueillies, plus de 500 Nord-Coréens ont été arrêtés par les autorités thaïlandaises.
Près de 10 000 Nord-Coréens se seraient installés en Corée du Sud.

Disparitions forcées
On était sans nouvelles de centaines de personnes renvoyées de force depuis la Chine. Des proches de Nord-Coréens ayant quitté leur pays sans autorisation ont disparu. On pense qu’ils ont été victimes de disparitions forcées, les autorités nord-coréennes punissant des familles entières en raison de leur lien de parenté avec une personne considérée comme hostile au régime (« culpabilité par association »).
En mars, Lee Kwang-soo a rejoint la Corée du Sud par bateau en compagnie de son épouse, de leurs deux enfants et d’un ami. En août, il a appris que 19 membres de sa famille et de celle de son ami avaient disparu en Corée du Nord entre le mois de mars et le début du mois d’août 2006.
Des Nord-Coréens installés en Corée du Sud ont été enlevés à la frontière chinoise par les forces de sécurité nord-coréennes. Les autorités de Pyongyang ont également enlevé des ressortissants d’autres pays, notamment de Corée du Sud, du Japon, de Thaïlande et du Liban.

Interdiction d’accès au territoire
En dépit de demandes répétées, le gouvernement refusait toujours d’autoriser la venue d’observateurs indépendants des droits humains, y compris du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l’homme en République populaire démocratique de Corée et du rapporteur spécial sur le droit à l’alimentation.
Selon les informations recueillies, les agences de secours des Nations unies n’ont été autorisées à se rendre que dans 29 des 213 régions du pays. À la demande du gouvernement nord-coréen, le PAM a réduit son personnel international de 46 à 10 personnes et a diminué la fréquence de ses visites de surveillance. Cinq des bureaux régionaux du PAM, à partir desquels les inspecteurs contrôlaient la distribution de l’aide alimentaire, ont été fermés. Ces différentes mesures laissaient craindre encore avantage un manque de transparence sur la distribution de l’aide alimentaire.

Liberté d’expression
Le régime nord-coréen ne tolérait aucune forme d’opposition. Selon les informations reçues, les personnes qui exprimaient une opinion contraire aux positions du Parti des travailleurs coréens (PTC, au pouvoir) risquaient de sévères représailles, de même bien souvent que leurs familles. Les médias d’information nationaux restaient strictement censurés ; l’accès aux émissions des médias étrangers était toujours très limité. En octobre, l’organisation non gouvernementale Reporters sans frontières considérait la Corée du Nord comme le pays où la liberté de la presse était la plus bafouée au monde.
Toute réunion ou association non autorisée était considérée comme un « trouble collectif à l’ordre public », délit passible de sanction. Bien que garantie par la Constitution, la liberté religieuse était dans les faits fortement restreinte. Les personnes impliquées dans des activités religieuses publiques ou privées risquaient d’être incarcérées, torturées, voire exécutées.

Peine de mort
Les condamnés à mort étaient pendus ou fusillés. On a signalé des exécutions d’opposants politiques mais aussi de personnes condamnées pour des infractions comme le vol de nourriture.
Son Jong-nam aurait été condamné à mort pour avoir trahi son pays, échangé des informations avec la Corée du Sud et reçu une aide financière de la part de son frère, qui vit en Corée du Sud depuis 2002. En avril 2006, Son Jong-nam a été placé en détention dans les sous-sols de l’Agence pour la sécurité nationale de Pyongyang et serait « quasiment mort » des suites d’actes de torture, selon des sources onusiennes. Il avait quitté la Corée du Nord en 1997 avec sa femme, son fils et son frère, et s’était converti au christianisme – ce qui est considéré comme une grave infraction en Corée du Nord. En 2001, les autorités chinoises l’ont renvoyé de force dans son pays d’origine, où il a été détenu pendant trois ans au camp pénitentiaire de Hamgyung-buk do. Libéré en mai 2004, Son Jong-nam a retrouvé son frère en Chine, puis a regagné la Corée du Nord. Informées de sa rencontre avec son frère, les autorités de Pyongyang l’ont arrêté en janvier 2006. À la connaissance d’Amnesty International, Son Jong-nam était toujours en vie à la fin de l’année.

Conditions carcérales
Les prisonniers, notamment les détenus politiques, souffraient des conditions déplorables régnant dans les multiples prisons et centres de détention.
Les Nord-Coréens renvoyés de force de Chine risquaient d’être torturés ou maltraités et pouvaient subir une peine de trois ans de prison. Les sanctions dépendaient de l’âge, du sexe et du passé de la personne concernée. Les femmes et les enfants se voyaient généralement infliger des peines ne dépassant pas deux semaines en centre de détention. Toutefois, des incarcérations de plusieurs mois en camp de travail étaient également fréquentes. Selon les informations recueillies, les conséquences du retour forcé étaient particulièrement graves pour les femmes enceintes, qui subissaient des avortements forcés dans des conditions médicales précaires. Les personnes avouant avoir rencontré des Sud-Coréens ou des missionnaires faisaient l’objet de sanctions très sévères. Les exécutions sommaires et les longues peines de travaux forcés existaient toujours, même si les autorités relâchaient souvent les détenus sur le point de mourir. Ces derniers décédaient peu de temps après leur libération.

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