BELGIQUE

Cette année encore, les centres pour étrangers présentaient de mauvaises conditions d’hébergement. Des migrants et des demandeurs d’asile ont de nouveau été victimes de mauvais traitements imputables à la police. Des mineurs ont été gardés dans des centres fermés réservés aux migrants en situation irrégulière et aux demandeurs d’asile déboutés. Des immigrés en situation irrégulière ont occupé des bâtiments publics et entamé des grèves de la faim pour renforcer leurs demandes de réformes législatives. L’assassinat d’une femme et d’un enfant à Anvers, ainsi que d’autres épisodes, ont illustré la persistance des violences à caractère raciste. La surpopulation carcérale et les mauvaises conditions de détention ont entraîné des grèves du personnel pénitentiaire. De nouveaux éléments laissaient penser que des avions américains effectuant des vols secrets ont pu se poser sur le sol belge. La Belgique est devenue le premier pays à interdire les bombes à sous-munitions.




Asile et immigration
Adoptées en juillet, de nouvelles lois sur l’asile imposaient une durée maximale de douze mois pour traiter toute nouvelle demande d’asile, recours compris. La procédure d’asile a été réformée afin d’accorder une protection supplémentaire aux étrangers non concernés par la Convention relative au statut des réfugiés [ONU, 1951] mais risquant de graves violations des droits humains en cas de retour dans leur pays d’origine. Ces nouvelles dispositions n’abordaient toutefois pas la question des migrants en situation irrégulière. Cette année encore, le nombre de demandes d’asile a diminué.
Tout au long de l’année 2006, un certain nombre d’églises et d’édifices publics ont été occupés par des immigrés en situation irrégulière et par des demandeurs d’asile déboutés réclamant à la fois la régularisation de leur situation, la fin des opérations d’éloignement et la suppression des centres fermés pour étrangers. Le gouvernement a régularisé le statut de nombreux immigrés ayant occupé, en février et en mars, l’église de Saint-Boniface, à Bruxelles. Au mois de mai, des personnes ont entamé des grèves de la faim dans quatre centres pour demandeurs d’asile.
Des migrants mineurs étaient toujours gardés dans des centres fermés pour étrangers, en violation du droit international.

Mauvais traitements imputables à la police
Selon certaines sources, des policiers ont infligé des mauvais traitements à des personnes renvoyées de force.
Le 1er août, la troisième tentative d’éloignement du territoire de Hawa Diallo, ressortissante guinéenne déboutée de sa demande d’asile, s’est soldée par un échec : les autres passagers sont descendus de l’avion pour protester contre le traitement qui lui était infligé. La veille au soir, Hawa Diallo avait été séparée de son bébé de dix-neuf mois, qui ne lui a été rendu qu’au moment du vol. Les cinq policiers qui l’escortaient l’auraient agressée et proféré des injures racistes à son encontre. Hawa Diallo a été libérée après l’échec de la tentative d’éloignement. On lui a cependant intimé de quitter la Belgique dans un délai de cinq jours. Depuis l’endroit où elle se cache, Hawa Diallo a déposé une plainte pour mauvais traitements auprès du Comité permanent de contrôle des services de police.
Dans un arrêt rendu le 12 octobre et appelé à faire date, la Cour européenne des droits de l’homme a conclu que la Belgique transgressait l’interdiction des traitements inhumains, ainsi que le droit au respect de la vie privée et familiale garanti par la Convention européenne des droits de l’homme. En 2002, une enfant en quête d’asile, âgée de cinq ans et non accompagnée, avait été placée dans un centre de transit avant d’être renvoyée, toujours sans accompagnateur, en République démocratique du Congo, son pays d’origine, où aucun membre de sa famille ne l’attendait.

Racisme et discrimination
En vertu d’une directive adoptée en mars, les services de police ont commencé à recenser les infractions à caractère raciste. Le Centre belge pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme (CECLR) a indiqué recevoir chaque année un millier de plaintes pour acte raciste, tout en faisant observer que de nombreuses agressions n’étaient jamais signalées.
En avril, Daniel Féret, président du Front national (FN), a été reconnu coupable d’incitation à la haine raciale et condamné à dix ans d’inéligibilité et à 250 heures de travaux d’intérêts généraux. À des fins électorales, il avait diffusé des documents dans lesquels les immigrés étaient comparés à des criminels, à des sauvages et à des terroristes. Le responsable du site Internet du FN a également été déclaré coupable et s’est vu infliger une amende. Le tribunal n’a pas ordonné la dissolution du parti en raison de l’absence d’éléments permettant d’associer le FN aux textes incriminés. En octobre, la condamnation a été confirmée en appel.
Le 11 mai, un habitant d’Anvers âgé de dix-huit ans a abattu une femme noire enceinte et la fillette blanche dont elle s’occupait. Il a également grièvement blessé une femme turque. Il n’a pas caché qu’il avait pris pour cible des étrangers. À la fin de l’année, les enquêtes préliminaires arrivaient à leur terme, mais la date du procès n’avait pas encore été fixée.

« Guerre contre le terrorisme »

D’après des informations communiquées par la presse en mars, la Central Intelligence Agency (CIA, les services de renseignements des États-Unis) a organisé, en juillet 2002, au moins deux vols secrets à bord d’avions qui se sont posés durant une courte période à l’aéroport de Deurne, à Anvers. On ignorait si ces appareils transportaient des détenus. D’après une enquête effectuée par le Parlement européen, sur les 1 080 escales effectuées en Europe par des avions soupçonnés d’avoir été affrétés par la CIA, quatre auraient eu lieu en Belgique. En juillet, une commission sénatoriale belge a estimé que les opérations organisées sur le territoire national par les services de renseignements étrangers étaient insuffisamment contrôlées pour pouvoir établir avec certitude la destination de ces vols, ou même leurs motifs.

Conditions de détention
La population carcérale a atteint un nouveau record. Un tiers des prisonniers se trouvaient en détention provisoire. Les centres réservés aux mineurs étaient surpeuplés et ces derniers se voyaient, dans certains cas, placés dans des prisons ordinaires. Une loi relative à la protection de la jeunesse adoptée en mai prévoyait notamment la construction d’un établissement pénitentiaire destiné à accueillir 200 mineurs délinquants.
En avril, le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) a fait état d’accusations de mauvais traitements infligés en garde à vue. Par ailleurs, le Comité a condamné la surpopulation régnant dans l’unité psychiatrique de la prison de Namur, ainsi que les cages faisant office de cellules au palais de justice de Liège, et les conditions d’hébergement des personnes non autorisées à pénétrer sur le territoire au Centre « INADS » de l’aéroport de Bruxelles-National. Toujours au mois d’avril, une grève a eu lieu dans la prison de Forest, à Bruxelles. La Centrale générale des services publics (syndicat des services publics) a dénoncé la surpopulation carcérale, la médiocrité des conditions de détention et la non-conformité des locaux en termes de santé publique, d’hygiène et de sécurité, ainsi que le caractère « nettement insuffisant » de la formation en six semaines dispensée au personnel.
En août, à la suite de l’évasion de 28 détenus, le personnel de la prison de Termonde s’est mis en grève afin de protester contre la surpopulation et le manque d’effectifs. Il a repris la grève en septembre, arguant que les améliorations promises ne s’étaient pas concrétisées.

Contrôle des armes
La Belgique a été le premier pays à prohiber les bombes à sous-munitions : le Parlement a adopté le 8 juin une loi interdisant la production, le stockage, le transfert et la commercialisation de ces armes. En 1995, la Belgique avait déjà été la première nation à proscrire les mines terrestres antipersonnel.

Autres documents d’Amnesty International

 Europe and Central Asia : Summary of Amnesty International’s concerns in the region, January-June 2006 (EUR 01/017/2006).

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