UKRAINE

Des réfugiés et des demandeurs d’asile ont été expulsés vers des pays où ils risquaient d’être torturés ou maltraités. La torture et les mauvais traitements en garde à vue restaient monnaie courante. La surpopulation qui régnait dans les locaux de détention de la police était à l’origine de nombreux cas de tuberculose. Les auteurs de violences domestiques jouissaient très souvent de la plus totale impunité. Des agressions racistes et antisémites ont été signalées dans diverses régions du pays.





Contexte
La mission d’observation électorale de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a estimé que les élections législatives, qui se sont tenues le 26 mars, s’étaient déroulées conformément aux normes internationales.
Le Comité des droits de l’homme [ONU] a exprimé au mois d’octobre sa préoccupation face aux actes de torture et aux mauvais traitements infligés aux personnes placées en garde à vue, au non-respect des droits des réfugiés et des demandeurs d’asile, ainsi qu’aux violences domestiques et aux agressions racistes et antisémites.

Réfugiés et demandeurs d’asile
L’Ukraine a enfreint les normes internationales relatives à la protection des réfugiés en renvoyant de force des demandeurs d’asile et des réfugiés dûment reconnus comme tels dans leur pays d’origine, sans même qu’ils puissent exercer un droit d’appel.
Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR) a reproché aux autorités d’avoir renvoyé en Ouzbékistan, dans la nuit du 14 au 15 février, 10 hommes qui avaient demandé asile à l’Ukraine. L’Ouzbékistan avait demandé à l’Ukraine d’extrader 11 hommes accusés d’avoir participé aux événements survenus en mai 2005 dans la ville ouzbèke d’Andijan (les forces de sécurité ouzbèkes avaient ouvert le feu sur les manifestants, pour la plupart pacifiques, tuant plusieurs centaines de personnes). Dix de ces hommes ont été renvoyés contre leur gré dans leur pays. Le onzième, qui avait de la famille en Ukraine, aurait été autorisé à rester. On ignorait ce qu’étaient devenus les expulsés ; en Ouzbékistan, leurs droits fondamentaux risquaient d’être bafoués car ils pouvaient notamment être mis en détention au secret, subir des actes de torture et d’autres mauvais traitements et être jugés à l’issue d’un procès inique. Le 28 février, les services de sécurité ukrainiens ont cherché à justifier leur action en déclarant que ces demandeurs d’asile « étaient liés à une organisation reconnue comme terroriste par l’ONU ».

Torture et mauvais traitements

Dans le cadre de la lutte contre la torture et les mauvais traitements, le ministère des Affaires intérieures a émis en avril une directive aux termes de laquelle tout détenu devait être informé de ses droits. La police n’a toutefois reçu aucune consigne concernant les modalités d’application de cette directive. L’Ukraine a ratifié en septembre le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants [ONU], qui prévoit la mise en place de mécanismes nationaux de prévention chargés d’inspecter tous les lieux de détention.
Amnesty International avait soumis en septembre 2005 à l’attention des autorités ukrainiennes six affaires de torture ou de mauvais traitements présumés. Des poursuites ont été engagées contre des policiers dans deux d’entre elles seulement.

Conditions de détention déplorables
Les locaux de garde à vue et de détention provisoire étaient généralement surpeuplés et les conditions de vie y étaient mauvaises, d’où un risque accru pour les détenus d’y contracter la tuberculose. Le taux annuel d’infection par la tuberculose en Ukraine était estimé à 95 pour 100 000 personnes, ce qui plaçait ce pays au huitième rang pour l’Eurasie, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS).
D’après le Groupe de défense des droits humains de Sébastopol, organisation non gouvernementale (ONG), il y avait au mois de janvier entre 30 et 40 détenus souffrant de tuberculose dans les locaux du centre de détention provisoire de Sébastopol, dans la presqu’île de Crimée. Ces personnes passaient dans cet établissement toute la période précédant leur procès – ce qui était contraire au Code de procédure pénale – au motif que le centre de détention provisoire de Simféropol, plus proche de leur domicile, avait depuis des années pour politique de ne pas accepter les personnes atteintes de tuberculose. D’après les informations disponibles, 20 malades étaient, en janvier, détenus dans une cellule prévue pour six personnes. Ils ne bénéficiaient pas d’un régime alimentaire spécial et ne recevaient pas les vitamines nécessaires pour pallier les effets secondaires de leurs médicaments.
En novembre, le Comité des droits de l’homme a appelé l’Ukraine à « garantir le droit des détenus à être traités avec humanité et avec le respect de la dignité inhérente à la personne humaine, en particulier en atténuant le surpeuplement ».

Mise à jour : le meurtre de Gueorgui Gongadze
Le procès de trois policiers inculpés du meurtre, en 2000, du journaliste d’investigation Gueorgui Gongadze s’est ouvert au mois de janvier. En juillet, un rapporteur mandaté par l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe s’est dit déçu de voir que l’enquête sur les instigateurs et les organisateurs de cet assassinat n’avançait guère. La mère du journaliste a annoncé en août qu’elle n’assisterait plus aux audiences du tribunal, car elle pensait ne rien avoir à attendre de ce procès. La procédure était toujours en cours à la fin de l’année.

Discrimination
Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale [ONU] a examiné en août les derniers rapports périodiques soumis par l’Ukraine. Lors de la présentation de ces rapports, le gouvernement ukrainien avait affirmé avoir « éliminé la discrimination raciale sous toutes ses formes et assuré l’égalité de tous devant la loi ». Des agressions racistes et des actes de discrimination continuaient pourtant d’être régulièrement signalés par les ONG. L’Union des Conseils pour les juifs de l’ancienne Union soviétique a dénoncé, entre janvier et novembre, sept agressions antisémites et racistes sur des personnes et 18 autres affaires, dont des actes de vandalisme contre des synagogues ou des écoles juives. Selon le Centre européen pour le droit des Roms, l’accès à l’enseignement, aux services de santé et au logement était refusé aux Roms parce qu’ils ne possédaient pas de papiers d’identité. Le Comité pour l’élimination de la discrimination raciale a notamment recommandé à l’Ukraine « de prendre des mesures préventives contre les actes dirigés contre des personnes ou des sites religieux appartenant à des minorités, d’enquêter sur ces actes et d’en traduire les auteurs devant la justice ». Il a également demandé que tous les Roms soient pourvus de documents d’identité.
Au mois de mars, dans le métro de Kiev, un groupe de jeunes a agressé un étudiant d’une école talmudique, qui s’est défendu avec un pistolet à air comprimé dûment enregistré. C’était un ami de Mordechaï Molojenov, un autre élève d’une école talmudique qui avait été poignardé en août 2005, également à Kiev. Les agresseurs ont été inculpés de « houliganisme ».
En octobre, Kunuon Mievi Godi, un Nigérian résidant depuis des années en Ukraine, a été tué à coups de couteau près de la station de métro Pozniaki, dans la banlieue de Kiev. Ses agresseurs ont crié des slogans racistes tout en le frappant. Ils n’ont pas pris les 400 dollars que la victime avait sur elle au moment des faits. L’enquête était toujours en cours à la fin de l’année.

Violences contre les femmes
En vertu de certaines dispositions de la Loi sur la prévention de la violence domestique, les personnes qui étaient la cible de violences au foyer pouvaient se voir adresser un avertissement sanctionnant leur « comportement de victime », ce qui perpétuait le mythe de la femme responsable des sévices qui lui sont infligés, laissait les coupables échapper à toute sanction et dissuadait celles qui voulaient porter plainte. Les femmes qui tentaient de poursuivre les auteurs de violences devant les tribunaux voyaient leurs efforts entravés par une corruption très répandue au sein du système judiciaire et par le caractère dérisoire des peines.
Le réseau mis en place par le ministère de la Famille, de la Jeunesse et des Sports apportait un soutien juridique et psychologique aux personnes de moins de trente-cinq ans et aux familles ; il possédait également des structures d’accueil, mais celles-ci n’étaient pas destinées spécifiquement aux femmes et n’assuraient pas toute l’aide et toute la protection dont avaient besoin les victimes de violence au foyer.
Le Comité des droits de l’homme a demandé en novembre à l’Ukraine d’intensifier ses efforts pour lutter contre la violence domestique, en veillant à ce que toutes les victimes puissent avoir accès à des centres sociaux et médicaux afin de se reconstruire.

Visites d’Amnesty International
Des délégués d’Amnesty International se sont rendus en Ukraine en septembre.

Autres documents d’Amnesty International

 Europe and Central Asia : Summary of Amnesty International’s concerns in the region, January-June 2006 (EUR 01/017/2006).

 Commonwealth of Independent States : Positive trend on the abolition of the death penalty but more needs to be done (EUR 04/003/2006).

 Ukraine. : Communication au Comité des droits de l’homme des Nations unies. Juin 2006 (EUR 50/003/2006).

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