Cuba

RÉPUBLIQUE DE CUBA
CAPITALE : La Havane
SUPERFICIE : 110 860 km_
POPULATION : 11,3 millions
CHEF DE L’ÉTAT et du GOUVERNEMENT : Fidel Castro
PEINE DE MORT : maintenue
CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifiée avec réserves
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : signé

La situation des droits humains à Cuba s’est fortement dégradée en 2003. À la mi-mars, les autorités ont mené une campagne de répression sans précédent contre le mouvement dissident. Soixante-quinze militants de longue date ont été arrêtés, soumis à des procès inéquitables et condamnés à de lourdes peines dont certaines allaient jusqu’à vingt-huit ans d’emprisonnement. Amnesty International considérait ces personnes comme des prisonniers d’opinion. En avril, trois hommes déclarés coupables dans une affaire de détournement de ferry ont été fusillés par un peloton d’exécution, ce qui a mis fin au moratoire de facto qui était en vigueur depuis trois ans. Les autorités cubaines ont fait l’objet de critiques de plus en plus vives de la part de la communauté internationale, y compris de pays et de personnes qui leur étaient jusqu’alors favorables. Le gouvernement a présenté la répression comme une réponse nécessaire face à la menace pour la sécurité nationale posée par les États-Unis. Cette année encore, l’embargo américain et les mesures similaires qui en découlent ont eu des effets négatifs sur l’ensemble des droits humains à Cuba.

Prisonniers d’opinion
Quatre-vingt-quatre prisonniers d’opinion étaient toujours détenus, dont sept étaient en attente de jugement à la fin de l’année.

Campagne de répression en mars
En mars, la campagne de répression menée par le gouvernement a abouti à l’emprisonnement de la plupart des chefs de file du mouvement dissident, notamment des enseignants, des bibliothécaires, des journalistes, du personnel médical, ainsi que des militants politiques et des défenseurs des droits humains. Seules quelques personnalités très connues ont été épargnées.
Les personnes détenues ont été traduites en justice sans délai et soumises à des procès expéditifs et inéquitables. La plupart ont été inculpées en vertu de l’article 91 du Code pénal cubain pour « actes contre l’indépendance ou l’intégrité territoriale de l’État » ou en vertu de la Loi pour la protection de l’indépendance nationale et de l’économie de Cuba, qui n’avait encore jamais été appliquée. Ce texte prévoit des peines de prison sévères pour toute personne reconnue coupable de soutenir la politique des États-Unis au détriment de Cuba. Les principaux chefs d’inculpation comprenaient la participation à des interviews pour Radio Martí, une station de radio émettant à destination de Cuba et financée par les États-Unis, la réception de matériel ou de fonds dont le gouvernement américain serait à l’origine, ou encore le maintien de contacts avec des responsables de la Section des intérêts américains à La Havane, que les autorités cubaines avaient accusée de comportement subversif et provocateur. À la fin de l’année, toutes les condamnations avaient été ratifiées par la Cour suprême populaire, ce qui, conformément au droit cubain, excluait toute possibilité d’appel. Après avoir examiné en détail les éléments retenus contre eux, Amnesty International a considéré que ces 75 dissidents étaient des prisonniers d’opinion.
Marcelo López Bañobre, membre de la Comisión Cubana de Derechos Humanos y Reconciliación Nacional (CCDHRN, Commission cubaine des droits humains et de la réconciliation nationale), a été condamné à une peine de quinze ans d’emprisonnement pour avoir, entre autres, « transmis des informations à des organisations internationales comme Amnesty International ».

Préoccupations concernant la santé
L’état de santé de nombreux prisonniers d’opinion demeurait préoccupant. Selon les informations reçues, certains n’étaient pas autorisés à recevoir les soins médicaux dont ils avaient besoin et étaient détenus dans des conditions éprouvantes. Les possibilités de contact avec les familles étaient limitées, la plupart des prisonniers étant détenus loin de leur province d’origine.
_Roberto de Miranda Hernández, âgé de cinquante-six ans, aurait eu une crise cardiaque, des douleurs cardiaques et un ulcère à l’estomac pendant sa détention. L’état de santé d’Oscar Manuel Espinosa Chepe, soixante-trois ans, s’est détérioré après son arrestation, à tel point qu’une greffe du foie sera probablement nécessaire. Les familles des deux hommes ont affirmé que les conditions carcérales avaient contribué à aggraver leur maladie.

Libérations
Un petit nombre de prisonniers d’opinion ont été libérés en 2003.
Yosvany Aguilar Camejo, José Aguilar Hernández et Carlos Oquendo Rodríguez ont été libérés le 11 octobre après vingt mois de détention. Des trois, Carlos Oquendo Rodríguez était le seul à avoir été jugé et condamné.
_Bernardo Arévalo Padrón a été libéré en novembre après avoir passé six ans derrière les barreaux pour « outrage » envers le président Castro et le vice-président Carlos Lage.
Eddy Alfredo Mena González, condamné en 2000 à cinq années d’emprisonnement notamment pour « outrage » et « troubles à l’ordre public », a lui aussi été remis en liberté.

Reprise des exécutions
Le 11 avril, les autorités ont mis un terme au moratoire de facto sur les exécutions en vigueur depuis trois ans : Lorenzo Enrique Copello Castillo, Bárbaro Leodán Sevilla García et Jorge Luis Martínez Isaac ont été passés par les armes. Ils appartenaient au groupe de personnes condamnées pour avoir détourné un ferry cubain avec plusieurs dizaines de passagers à son bord. L’affaire s’était réglée sans recours à la violence. Les trois hommes, traduits en justice et déclarés coupables en vertu de la législation « antiterroriste », ont vu leurs appels rejetés, le tout en moins d’une semaine. En conséquence, de profondes inquiétudes ont été exprimées quant à l’équité de la procédure. Le président Castro a déclaré que ces exécutions étaient nécessaires pour mettre fin aux détournements et porter un coup d’arrêt à la crise migratoire qui s’intensifiait entre Cuba et les États-Unis. Fin 2003, 50 prisonniers étaient toujours sous le coup d’une condamnation à la peine capitale.

La Communauté internationale
Les Nations unies
En avril, la Commission des droits de l’homme des Nations unies a salué les efforts de Cuba pour promouvoir les droits économiques et sociaux et adopté une résolution invitant le gouvernement cubain à réaliser des progrès similaires dans le domaine des droits civils et politiques. Elle a aussi exhorté le gouvernement cubain à recevoir la visite de la représentante personnelle du haut-commissaire des Nations unies aux droits de l’homme. Le gouvernement a répondu qu’il n’acceptait pas le mandat de la résolution et qu’il n’autoriserait pas la représentante du haut-commissaire à se rendre sur l’île.
En novembre, pour la douzième année consécutive, l’Assemblée générale des Nations unies a adopté une résolution demandant aux États-Unis la levée de l’embargo contre Cuba.
Relations avec les États-Unis
En mars, le gouvernement américain a encore durci les restrictions imposées aux déplacements entre la Floride (États-Unis) et Cuba. Le gouvernement cubain a vigoureusement protesté contre l’expulsion de Floride de 14 diplomates accusés de s’être livrés à des « activités inappropriées », contre l’inclusion de Cuba dans le rapport annuel des États-Unis sur le trafic des personnes, et contre les nouvelles allégations du gouvernement des États-Unis concernant l’existence d’un programme cubain d’armes biologiques.
Au mois d’août, les États-Unis ont procédé au renvoi forcé de 12 personnes qui avaient, semble-t-il, détourné un ferry. Cette mesure a été critiquée par la communauté des Cubains en exil et par le gouverneur de la Floride, Jeb Bush. Dans un geste interprété par certains comme une réaction à ces critiques, le gouvernement américain a annoncé la création d’une commission pour une transition vers la démocratie à Cuba, ainsi que des améliorations en matière de diffusion d’émissions et de distribution de documents imprimés à destination de l’île. Au mois d’octobre, l’Agence des États-Unis pour le développement international a annoncé un accroissement de son aide aux dissidents cubains.
L’Union européenne (UE)
La vague de répression de mars est survenue alors que l’UE venait tout juste d’ouvrir son premier bureau à Cuba. L’UE a condamné la campagne de répression des autorités en avril, juin et juillet. En juin, elle a annoncé plusieurs mesures en réaction à ces événements ; elle a notamment invité des dissidents à des célébrations de fêtes nationales et réduit les échanges culturels et diplomatiques de haut niveau, tout en maintenant les liens économiques. En réponse, Fidel Castro et le premier vice-président du Conseil des ministres et ministre des Forces armées révolutionnaires, Raúl Castro, ont pris la tête de manifestations devant les ambassades d’Espagne et d’Italie, accusées d’être à l’origine de ces mesures. L’accord qui avait institué le Centre culturel espagnol à La Havane a également été suspendu. En août, les autorités cubaines ont adressé une lettre à l’UE dans laquelle elles lui signifiaient que le pays n’accepterait plus aucune aide au développement de l’UE ou de ses États membres ; elles marquaient ainsi leur rejet des conditions imposées en matière d’amélioration de la situation des droits humains. L’UE a déploré cette décision. Cependant, elle a réitéré son engagement à fournir une aide au peuple cubain et demandé la suspension immédiate de l’embargo imposé par les États-Unis contre Cuba.

Le mouvement dissident
Les activités de l’opposition étaient au point mort depuis l’emprisonnement de certains militants occupant une position intermédiaire dans le mouvement. En avril, des procès ont révélé que 12 agents de la Sûreté de l’État avaient infiltré l’opposition, depuis plusieurs années pour certains. Ces révélations, de même que la publication de deux livres concernant des activités présumées de la Sûreté de l’État au sein du mouvement dissident, ont été perçues comme des tentatives visant à susciter la suspicion et la méfiance parmi les opposants encore en liberté.
En octobre, Oswaldo Payá Sardiñas, dirigeant du Movimiento Cristiano Liberación (Mouvement chrétien « Libération »), groupe politique non officiel, a lancé la première grande initiative d’opposition après la vague de répression de mars. Il a déposé à l’Assemblée nationale plus de 14 000 nouvelles signatures appuyant le projet Varela, une pétition en faveur d’un référendum portant sur des réformes politiques et économiques. Le Comité des affaires constitutionnelles et juridiques du Parlement cubain avait déclaré cette initiative inconstitutionnelle en janvier. Au mois de décembre, Oswaldo Payá a présenté un plan national pour la transition vers la démocratie afin qu’il fasse l’objet d’un débat public.
Des restrictions à tout déplacement en dehors de Cuba ont continué d’être imposées aux dissidents les plus en vue. En juin, Elizardo Sánchez Santacruz, Vladimiro Roca Antùnez, Manuel Cuesta Morúa et Oswaldo Payá Sardiñas se sont vu refuser l’autorisation de se rendre en Italie pour participer à un séminaire sur le mouvement d’opposition démocratique à Cuba, organisé par un parti politique italien. La demande de Vladimiro Roca d’aller au Mexique en juillet pour suivre les élections fédérales de ce pays a également été rejetée. Enfin, Oswaldo Payá n’a pas pu assister à une session du Parlement européen à laquelle il avait été invité.

Visites d’Amnesty International
La dernière visite d’Amnesty International à Cuba remonte à l’année 1988. Le gouvernement n’a pas répondu aux demandes répétées que lui a adressées l’organisation en vue d’obtenir l’autorisation de se rendre dans le pays.

Autres documents d’Amnesty International

Cuba. Maintien en détention de dissidents arrêtés lors des vagues d’arrestations de février et décembre 2002 (AMR 25/001/2003).
Cuba. Une répression massive frappe l’opposition (AMR 25/008/2003).
Cuba. Des mesures « indispensables » ? Les droits humains bafoués au nom de la sécurité (AMR 25/017/2003).

Cuba. Le point sur les suites de la répression (AMR 25/035/2003).

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