IRLANDE

Cette année encore, des brutalités policières ont été signalées, mais ces allégations n’ont pas fait l’objet d’enquêtes impartiales. Amnesty International était toujours préoccupée par le système mis en place pour recueillir et enregistrer les plaintes pour crimes à caractère raciste et engager des poursuites contre leurs auteurs. Dans les établissements psychiatriques comme dans d’autres structures, les conditions d’accueil des personnes souffrant d’un handicap mental demeuraient inadaptées. Les procédures de demande d’asile suscitaient de vives inquiétudes, de même que de la discrimination dont étaient victimes les travailleurs immigrés. Les dispositifs de protection des femmes fuyant les violences domestiques étaient insuffisants.

Irlande
CAPITALE : Dublin
SUPERFICIE : 70 282 km²
POPULATION : 4 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Mary McAleese
CHEF DU GOUVERNEMENT : Bertie Ahern
PEINE DE MORT : abolie
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome ratifié
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée avec réserves
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifié

Contexte

Le Comité européen des droits sociaux a remis ses conclusions sur le premier rapport rendu par l’Irlande. Il a relevé 12 cas de non-conformité et a demandé des informations supplémentaires sur neuf autres affaires.
Le médiateur des enfants a ouvert une enquête sur les plaintes déposées contre certains établissements publics.

Personnes souffrant d’un handicap

Publié au mois de septembre, le rapport de l’inspecteur des services de santé mentale dénonçait la profonde médiocrité des conditions de soins et de traitement dans les hôpitaux psychiatriques. Il regrettait également l’existence de disparités dans les dispositions prévues pour certains groupes de personnes vulnérables.
Les carences en matière de services psychiatriques pour jeunes étaient telles que des mineurs se trouvaient internés dans des hôpitaux psychiatriques pour adultes.
Une Stratégie nationale de lutte contre les handicaps a été rendue publique au mois de septembre. Elle incluait notamment un projet de loi sur le handicap élaboré dans le courant de l’année. Malgré les engagements pris dans le passé par le gouvernement, ce texte ne se fondait pas sur le respect des droits humains et n’envisageait pas de manière satisfaisante la réalisation progressive des droits économiques et sociaux des handicapés. Les mouvements de défense des droits des personnes infirmes ont critiqué aussi bien la Stratégie que le projet de loi.

Maintien de l’ordre

De nouvelles informations faisaient état de mauvais traitements imputables à des membres de la police nationale irlandaise, ainsi que d’autres fautes graves commises par ceux-ci dans l’exercice de leurs fonctions. Ces accusations n’ont pas donné lieu à des enquêtes approfondies de la part du Service des plaintes contre la police.
Le tribunal d’investigation (tribunal Morris) chargé d’enquêter sur les plaintes visant des policiers de la division de Donegal a remis son premier rapport en juillet. Il a reconnu des agents coupables d’infractions de différents degrés. Il a relevé des affaires de négligence, mais aussi le cas de deux policiers ayant orchestré la dissimulation de munitions et de faux explosifs. Le tribunal Morris a émis des recommandations destinées à améliorer les procédures et la gestion de ce type d’affaires. Il préconisait également une plus grande obligation de rendre des comptes, ainsi qu’un réexamen dans les meilleurs délais des principes régissant le traitement des informateurs.
Sept policiers ont été jugés à la suite d’accusations faisant état d’un recours excessif à la force au cours d’une manifestation organisée à Dublin en mai 2002. Six d’entre eux ont été relaxés ; le septième a été reconnu coupable d’agression sur la personne d’un enseignant.
Le projet de loi sur la police élaboré en 2004, a été publié au mois de février. C’était la première fois que les différentes fonctions d’un service de police étaient exposées sous la forme d’une loi. Le texte prévoyait également la création d’une commission médiatrice indépendante de la police, chargée de traiter les plaintes et ayant le pouvoir d’enquêter sur les policiers, de les arrêter et de les placer en détention. La Commission irlandaise des droits humains a exprimé son inquiétude devant certaines dispositions de ce projet de loi. Cet organisme a recommandé, entre autres, que tous les interrogatoires de suspects soient enregistrés par caméra vidéo et que la commission médiatrice soit habilitée à inspecter n’importe quel poste de police et dirige toutes les enquêtes, sauf les plus mineures.

Lieux de détention

Les conditions de détention ne respectaient pas les normes internationales : de nombreuses prisons étaient surpeuplées, ne disposaient pas d’installations sanitaires adaptées et ne proposaient pas de programmes d’éducation et d’emploi suffisamment développés. Les personnes susceptibles d’être expulsées étaient détenues en prison, et non dans des centres de détention spéciaux. Cette année encore, des prisonniers souffrant de troubles mentaux étaient incarcérés dans les cellules capitonnées de prisons ordinaires et non dans des établissements spécialisés. Les autorités n’ont pas mis en place de mécanisme indépendant et impartial afin que les prisonniers puissent déposer des plaintes, comme le recommandait le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants.

Demandeurs d’asile et immigrés

La Loi de 2004 relative à l’immigration était intrinsèquement viciée car elle ne respectait pas les droits humains reconnus au niveau international. Aucun organe indépendant ne veillait au respect des droits fondamentaux lors des contrôles d’immigration effectués dans les ports d’entrée.
Tout au long de l’année 2004, les inquiétudes se sont accrues concernant la situation et les droits des travailleurs immigrés, notamment le droit au regroupement familial et le droit de recours contre les arrêtés de reconduite à la frontière.
La 27e modification de la Constitution a été adoptée. Elle a supprimé la garantie constitutionnelle du droit du sol pour les enfants nés sur le territoire lorsque aucun des deux parents ne possède la nationalité irlandaise.
Les proches parents d’enfants irlandais, s’ils ne possédaient pas eux-mêmes la nationalité irlandaise, risquaient, par application rétroactive de ces nouvelles dispositions, de ne plus pouvoir bénéficier automatiquement d’un permis de séjour. Lorsque, pour des motifs humanitaires, ces familles demandaient à pouvoir rester sur le territoire, elles ne pouvaient pas prétendre à l’aide juridique. Selon des chiffres officiels, en octobre, 32 parents d’enfants irlandais avaient été renvoyés et 352 autres s’étaient vu notifier une mesure d’éloignement. On craignait toujours que les intérêts de l’enfant ne soient pas suffisamment pris en considération dans les décisions de renvoi. En octobre, un arrêt de la Cour de justice des communautés européennes confirmait que les enfants citoyens de l’Union européenne (UE) étaient en droit de bénéficier de l’affection de leurs parents et de leur présence au sein de l’UE. En décembre, le gouvernement a annoncé une révision des modalités de traitement des plaintes déposées par les parents étrangers d’enfants irlandais nés avant le 1er janvier 2005.

Racisme et égalité

L’élaboration du Plan national d’action contre le racisme était sujette à des retards excessifs. Le Comité consultatif national sur le racisme et le multiculturalisme a constaté une augmentation du nombre d’épisodes à caractère raciste, au lendemain d’un référendum sur la nationalité organisé au mois de juin. Un certain nombre de groupes de défense des droits humains et des gens du voyage ont condamné la dégradation des droits de ces derniers et la brutalité des méthodes de maintien de l’ordre utilisées contre eux. Le système mis en place pour recueillir et enregistrer les allégations de racisme et engager des poursuites demeurait un motif de préoccupation. La Loi de 2004 sur l’égalité, officiellement adoptée dans un souci de conformité avec les directives de l’UE relatives à l’égalité de traitement en matière d’emploi, sans distinction d’origine ou de genre, n’appliquait pas de façon satisfaisante les exigences de ces directives, tout en remettant en cause des dispositifs existants de lutte contre les discriminations. Certaines dispositions de cette loi prévoyaient notamment, pour l’accès à l’éducation et à un certain nombre de services publics, une différence de traitement entre les ressortissants de pays de l’UE et les autres. Une telle approche était préoccupante. Par ailleurs, des discriminations liées à la nationalité étaient à craindre en matière d’immigration et de permis de séjour. On déplorait également que le gouvernement n’ait jamais imposé aux services publics l’obligation légale de veiller à une plus grande égalité.

Violences contre les femmes

Les associations d’aide aux victimes de viol, d’agression sexuelle, de violences domestiques ou de traite à des fins d’exploitation sexuelle déclaraient rencontrer de sérieuses difficultés liées à un financement insuffisant.
Le manque de centres d’accueil pour les femmes et les enfants fuyant un contexte de violences constituait également un sujet de préoccupation, de même que la vulnérabilité des femmes immigrées, dont la situation au regard de la loi les empêchait de chercher secours.
La seule condamnation pour viol conjugal prononcée en Irlande a été annulée au mois d’octobre.

Commerce d’armes

Au mois de mai, le gouvernement a publié une étude du système irlandais de contrôle des exportations de matériel militaire et de biens et technologies à double usage. Il s’est, par la suite, engagé à adopter une nouvelle législation qui inclurait des contrôles sur le courtage d’armes et la remise d’un rapport annuel au Parlement. Le cadre législatif proposé présentait toutefois certaines failles.

Autres documents d’Amnesty International

  Ireland : Comments and recommendations on the International Criminal Court Bill 2003 (EUR 29/001/2004).

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