UKRAINE

Les allégations de torture ou de mauvais traitements aux mains de la police étaient très fréquentes. Des manifestations ont été interdites, des protestataires interpellés et harcelés, et des agressions racistes signalées un peu partout dans ce pays. L’enquête sur la « disparition » de Gueorgui Gongadze n’a pas progressé.

Ukraine
CAPITALE : Kiev
SUPERFICIE : 603 700 km²
POPULATION : 48,2 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Leonid Koutchma
CHEF DU GOUVERNEMENT : Viktor Ianoukovitch
PEINE DE MORT : abolie
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome signé
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifié

Contexte
Le second tour de l’élection présidentielle, en novembre, a été le point de départ de troubles et de manifestations de grande ampleur, le candidat de l’opposition, Viktor Iouchtchenko, refusant d’accepter les résultats officiels. L’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE) a déclaré que la consultation n’avait pas satisfait « à un nombre considérable de normes de l’OSCE, du Conseil de l’Europe et autres standards européens en matière d’élections démocratiques ». Le droit de se réunir pacifiquement et la liberté d’association ont été violés, et les médias officiels ont fait preuve d’un parti pris flagrant en faveur du candidat du pouvoir en place, Viktor Ianoukovitch. Un troisième tour a finalement été organisé le 26 décembre. Il s’est soldé par la victoire manifeste de Viktor Iouchtchenko, mais la proclamation des résultats n’a eu lieu qu’au terme de la procédure de recours entamée par Viktor Ianoukovitch.

Torture et mauvais traitements
Le Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants a publié en décembre le rapport de la visite qu’il avait effectuée en Ukraine en 2002. Comme dans les rapports sur ses visites de 1998 et 2000, il a conclu que les personnes appréhendées par la police risquaient très fortement d’être maltraitées lors de leur arrestation ou pendant leur garde à vue. Le document qualifiait d’intolérables les conditions de vie dans les centres de détention provisoire dépendant du ministère de l’Intérieur, et indiquait que la surpopulation restait un problème majeur. Les locaux étaient mal ventilés et les conditions d’hygiène insuffisantes. La tuberculose faisait apparemment des ravages dans ces établissements.
Beslan Koutarba et Revaz Kichikachvili ont été arrêtés en août à Sébastopol, en Crimée (sud de l’Ukraine), par des policiers du poste de Nakhimov. Les deux hommes étaient accusés de vol avec effraction et auraient reconnu les faits. Leur avocat craignait cependant qu’ils n’aient « avoué » sous la torture. Les suspects n’ont pas fait l’objet d’un examen médical et leurs contacts avec leur famille et leur avocat étaient limités. Ils se trouvaient toujours au centre de détention provisoire de Sébastopol à la fin de l’année. Selon leur avocat, leurs conditions de détention s’étaient améliorées et ils n’étaient plus maltraités. Le parquet local et les services du ministère de l’Intérieur à Sébastopol ont rejeté les allégations de torture, alors qu’aucune enquête sérieuse et impartiale n’a été menée dans les meilleurs délais.
Andreï Ovsiannikov, un détenu qui avait contracté la tuberculose au centre de détention provisoire de Sébastopol, a enfin été hospitalisé au mois de mars, grâce à l’action de sa famille et du Groupe de défense des droits humains de Sébastopol. La police l’avait arrêté en juin 2003, car elle le soupçonnait de vendre de la drogue. Un examen médical avait ensuite révélé qu’il était tuberculeux, mais personne ne l’en avait informé. Ce n’est qu’en novembre 2003, alors que sa santé s’était détériorée, qu’il avait pris connaissance de son état. Il a été renvoyé au centre de détention provisoire le 30 juin 2004 et s’y trouvait toujours à la fin de l’année.
Le 28 juillet, 10 jeunes gens appartenant à un groupe communiste révolutionnaire qui avaient été arrêtés en décembre 2002 ont été déclarés coupables de participation à une tentative de coup d’État, d’actes de banditisme et de tentative de meurtre. Ils ont été condamnés à des peines allant de six à quatorze ans d’emprisonnement. Les accusés ont affirmé avoir été torturés pendant l’enquête ; une jeune fille de dix-sept ans aurait notamment été violée pendant sa détention. Ces allégations n’ont donné lieu à aucune investigation. Un onzième membre du groupe est mort, en novembre 2003, dans des circonstances suspectes.

« Disparition » de Gueorgui Gongadze
Le gouvernement ukrainien était soumis à des pressions de plus en plus vives l’incitant à identifier les responsables de la « disparition », en septembre 2000, du journaliste d’investigation Gueorgui Gongadze, mais l’enquête n’a pas vraiment avancé. Le président de la commission d’enquête parlementaire chargée de l’affaire a demandé en mars la destitution du chef de l’État, Leonid Koutchma, pour « crimes graves avec violence ». Au mois de juin, le journal britannique The Independent a publié des documents provenant de fuites, qui accusaient de hauts responsables gouvernementaux d’avoir bloqué l’enquête et indiquaient que Gueorgui Gongadze avait été placé sous surveillance par le ministère de l’Intérieur avant son enlèvement. Toujours en juin, les services du procureur général ont annoncé qu’un homme, déjà condamné pour meurtre, avait reconnu avoir tué le journaliste.

Liberté d’expression et d’association
Des partisans de l’opposition ont été arrêtés au mois d’octobre, pendant la campagne qui a précédé le premier tour de l’élection présidentielle. Un certain nombre de manifestants ont été maltraités par des agents de la police.
Des membres du mouvement Pora, une organisation de jeunesse d’opposition, ont été arbitrairement arrêtés et harcelés. Alexandre Tsitsenko a été interpellé par des policiers masqués, le 21 octobre, à Kirovograd, alors qu’il venait chercher des tracts et des autocollants. Il a été libéré sans inculpation le 25 du même mois. Andriiy Koulibaba, vingt ans, a été arrêté le 20 octobre à Vinnitsa et condamné à dix jours de détention pour « refus délibéré d’obtempérer aux injonctions de la police ». Cette peine a ensuite été commuée en une simple amende et le jeune homme a été libéré le 23 octobre. Alexandre Pougatch, dix-huit ans, a été appréhendé le 21 octobre à Vinnitsa parce qu’il refusait de donner son nom à la police. Quelques minutes après qu’il eut été jugé et relaxé, il a de nouveau été arrêté, pour « houliganisme » ; il se trouvait encore sur le perron du tribunal. Les poursuites engagées contre les trois jeunes gens ont finalement été abandonnées, mais les membres de l’organisation Pora ont été la cible d’autres actes de harcèlement jusqu’à l’élection présidentielle.

Réfugiés
Au mois de juin, l’Assemblée parlementaire du Conseil de l’Europe a recommandé à l’Ukraine de respecter les principes fondamentaux du droit international en matière de protection des réfugiés et des demandeurs d’asile, et de manifester sa volonté, notamment politique, de trouver une solution au problème des migrations. La législation ukrainienne relative aux réfugiés est contraire aux normes internationales, dans la mesure où elle impose aux demandeurs d’asile un délai strict de trois à cinq jours après leur arrivée pour déposer une requête.

Violences contre les femmes
La traite des êtres humains à des fins d’exploitation sexuelle constituait toujours un problème majeur. La plupart des femmes et des jeunes filles victimes de ce trafic continuaient d’être envoyées soit en Turquie, soit en Russie. Le gouvernement a pris des mesures pour lutter contre ce fléau et les poursuites se sont multipliées après l’adoption, en 1998, de l’article 149 du Code pénal, qui fait de la traite une infraction. Le taux de condamnation restait faible cependant. Les juges manquaient souvent d’expérience en la matière et les victimes susceptibles de témoigner se voyaient rarement proposer des mesures de protection. Bien qu’un service spécial ait été créé au sein du ministère de l’Intérieur pour lutter contre la traite, bien souvent les responsables de l’application des lois ne disposaient pas des moyens et compétences nécessaires.

Discrimination
Des agressions antisémites et racistes ont été signalées dans diverses régions d’Ukraine. Les membres de la communauté juive de Donetsk, par exemple, auraient constaté une forte recrudescence des actes antisémites en 2004. La police continuait de nier le caractère raciste des profanations de cimetières et de lieux de culte juifs. À Odessa, le nombre d’agressions contre des étrangers, en particulier des Africains, a enregistré une augmentation. Beaucoup étaient attribuées à des bandes de skinheads.

Visites d’Amnesty International
Des délégués d’Amnesty International se sont rendus en Ukraine au mois de juin.

Autres documents d’Amnesty International

  Europe and Central Asia : Summary of Amnesty International’s concerns in the region, January-June 2004 (EUR 001/005/2004).

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