Biélorussie

RÉPUBLIQUE DU BÉLARUS
CAPITALE : Minsk
SUPERFICIE : 207 600 km_
POPULATION : 9,9 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Alexandre Loukachenko
CHEF DU GOUVERNEMENT : Guennadi Novitski, remplacé provisoirement par Sergueï Sidorski le 10 juillet
PEINE DE MORT : maintenue
CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : ratifiée
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR L’ÉLIMINATION DE TOUTES LES FORMES DE DISCRIMINATION À L’ÉGARD DES FEMMES : signé

Les enquêtes en cours sur un certain nombre de « disparitions » qui avaient eu un grand retentissement ont été arrêtées sans explication satisfaisante. Les autorités ont interdit des organisations non gouvernementales (ONG), dont des organisations de défense des droits humains, et suspendu plusieurs journaux privés. Le mouvement syndicaliste indépendant a été pris pour cible et ses dirigeants emprisonnés. De nombreux contestataires ont été arrêtés pour leurs activités au sein de l’opposition, pourtant non violentes. Condamnés à de longues peines d’emprisonnement, plusieurs prisonniers d’opinion restaient détenus. La violence domestique était généralisée. Cette année encore, les tribunaux ont prononcé des peines capitales.

Contexte
La communauté internationale a formulé de nombreuses critiques à l’égard de la Biélorussie pour les violations des droits humains et des libertés fondamentales commises, et les relations avec ce pays sont demeurées tendues. En avril, la Commission des droits de l’homme des Nations unies s’est déclarée vivement préoccupée par les atteintes aux droits humains, notamment les « disparitions », les arrestations et détentions arbitraires et les actes de harcèlement visant des opposants. Divers organismes intergouvernementaux ont exprimé des inquiétudes analogues tout au long de l’année 2003.

« Disparitions »
Aucun progrès n’a été accompli dans la désignation des responsables des « disparitions » de Iouri Zakharenko et Viktor Gontchar, deux grandes figures de l’opposition, de l’homme d’affaires Anatoli Krassovski et du journaliste Dimitri Zavadski. Les enquêtes judiciaires ont été arrêtées aux mois de janvier et de février, mais ces décisions n’auraient pas été motivées quant au fond auprès des familles concernées. À la suite de campagnes menées par les proches, les investigations ont été rouvertes, en juin pour l’affaire Iouri Zakharenko, en juillet pour Viktor Gontchar et Anatoli Krassovski et au mois de décembre pour Dimitri Zavadski.

Défenseurs des droits humains
Tout au long de l’année, les autorités ont soumis les défenseurs des droits humains à une intense campagne de harcèlement et d’intimidation. Des organisations de défense des droits humains de premier plan ont été interdites après avoir reçu deux avertissements officiels préalables, parfois plus, du ministère de la Justice. De tels avertissements ont été infligés pour de fausses violations d’une législation controversée qui régissait de façon stricte les activités de la société civile. Un grand nombre d’autres ONG n’ont pas été autorisées à se faire enregistrer ou ont vu leur enregistrement annulé pour des raisons tout aussi douteuses. La vague d’interdictions a soulevé une réprobation considérable au sein de la communauté internationale.
_Le 8 septembre, le tribunal municipal de Minsk a ordonné la fermeture d’une importante organisation de défense des droits humains, Aide juridique à la population. Celle-ci avait reçu au cours de l’année qui avait précédé deux avertissements officiels pour avoir fourni une assistance juridique gratuite à des non-membres et pour avoir utilisé comme logo un symbole différent de celui proposé au moment de son enregistrement.
_Le 28 octobre, la Cour suprême a décrété l’interdiction de l’organisation de défense des droits humains Viasna-96 (Printemps-96). La Cour a invoqué plusieurs infractions présumées à la loi, dont l’assistance juridique à des non-membres, la dispense de droits d’adhésion et des irrégularités dans les dossiers d’enregistrement.

Liberté de la presse
Le ministère de l’Information a eu régulièrement recours à un système analogue d’avertissements et de suspensions pour contenir la presse indépendante. Plusieurs journaux influents ont été suspendus. D’autres ont été la cible de procès en diffamation intentés par des représentants de l’État et qui ont eu des effets désastreux.
Le 29 mai, la Belorousskaïa Delovaïa Gazeta a été fermée pour trois mois par les autorités après trois avertissements ; il lui était reproché d’avoir violé la législation sur la presse. En juin, elle a reparu pour deux numéros sous les cartouches de titre des journaux Ekho et Salidarnasts avant que les pouvoirs publics ne bloquent à nouveau le tirage. Ekho a été suspendu pour trois mois ; Salidarnasts a été condamné à une amende équivalant à plus de 1 700 euros et le directeur de la société éditrice a été démis de ses fonctions. Au mois de juin, un autre journal indépendant, Predprinimatelskaïa Gazeta, a été également suspendu pour une durée de trois mois après avoir publié un article sur cette affaire.

Détention de manifestants
De nombreuses personnes qui manifestaient pacifiquement ont été détenues uniquement pour avoir voulu exercer leur droit à la liberté d’expression et de réunion. Amnesty International les considérait comme des prisonniers d’opinion. Le risque d’être maltraité par la police lors de l’arrestation était réel et plusieurs de ces manifestants ont été condamnés à des amendes et à des peines dont certaines allaient jusqu’à quinze jours d’emprisonnement.
Au moins 24 manifestants se sont vu infliger de courtes peines d’emprisonnement après que les autorités eurent procédé à une action de répression concertée contre des personnes qui manifestaient pacifiquement en mars. Le 12 de ce même mois, Andreï Sannikov, ancien vice-ministre des Affaires étrangères, ainsi que Loudmila Griaznova et Dimitri Bondarenko, défenseurs des droits humains et membres de la Charte 97, ainsi que le représentant des petits commerçants Leonid Malakhov, ont été condamnés à quinze jours de détention pour le rôle qu’ils ont joué dans l’organisation d’une manifestation à Minsk le même jour. Deux autres participants ont été reconnus coupables par la suite et condamnés à des peines d’emprisonnement pour des infractions similaires.

Violations des droits syndicaux
L’Organisation internationale du travail a émis des critiques à l’égard des nombreuses violations des droits des travailleurs signalées tout au long de l’année. Le 19 novembre, elle a annoncé la création d’une commission chargée d’enquêter sur ces allégations, une procédure utilisée uniquement dans les cas les plus graves. Des syndicalistes indépendants ont porté plainte pour avoir été emprisonnés, harcelés et licenciés, parce que leur droit d’association était gravement restreint et que l’État intervenait dans les affaires internes de plusieurs syndicats et de la fédération syndicale nationale.
Le 18 septembre, le tribunal du quartier Lénine, à Minsk, a condamné Alexandre Iarochouk, président du Congrès des syndicats démocratiques, à dix jours d’emprisonnement pour atteinte à l’autorité de la justice. Dans un article paru dans la presse en août, cet homme avait critiqué la décision de la Cour suprême de dissoudre le Syndicat national des contrôleurs aériens.
Le 17 octobre, l’avocat du syndicat, Vladimir Odynets, a été condamné par un tribunal de Minsk à une peine de cinq jours d’emprisonnement, également pour atteinte à l’autorité de la justice ; il semblerait que cette condamnation était aussi en rapport avec le fait qu’il assurait la défense d’Alexandre Iarochouk.
Le 30 octobre, le président du Syndicat national des travailleurs de l’automobile et de la machine agricole, Alexandre Boukhvostov, a été arrêté par la police dans le centre de Minsk pour avoir organisé une manifestation non autorisée, mais pacifique, contre l’ingérence présumée du gouvernement dans les affaires internes du syndicat. Le même jour, un tribunal de Minsk l’a condamné à dix jours d’emprisonnement.

Prisonniers d’opinion purgeant de lourdes peines
En mars, Nikolaï Markevitch et Pavel Mojeïko, rédacteur en chef et rédacteur du journal indépendant Pagonia, qui avaient été condamnés respectivement à un an et demi et à un an de « restriction de liberté », ont bénéficié d’une libération anticipée. En juin 2002, un tribunal de Grodno les avait reconnus coupables d’avoir diffamé le président de la République, Alexandre Loukachenko. Les deux journalistes avaient évoqué, dans un article de Pagonia qui n’a pas été diffusé, les soupçons (largement partagés dans l’opinion) concernant une possible implication des pouvoirs publics dans plusieurs « disparitions ».
_En juin, Viktor Ivachkevitch, rédacteur en chef du journal syndical influent Rabotchi, a vu sa peine de deux ans de « restriction de liberté » ramenée en appel à un an. En septembre 2002, un tribunal de Minsk l’avait reconnu coupable d’avoir diffamé le président Alexandre Loukachenko dans un article. Il a été remis en liberté à la mi-décembre.
La santé du scientifique Iouri Bandajevski semblait s’être détériorée au cours de l’année 2003. Selon des membres de sa famille qui lui ont rendu visite dans la colonie pénitentiaire UZ 15 de Minsk, il souffrirait de dépression. Il avait été condamné à huit ans d’emprisonnement pour corruption passive en juin 2001. Toutefois, nombreux sont ceux qui pensent que sa condamnation était liée à l’attitude critique qu’il avait adoptée face à la réaction des autorités biélorusses lors de la catastrophe de Tchernobyl, au cours de l’année 1986.

Violence contre les femmes
Les violences au foyer demeuraient courantes et les femmes en quête de justice étaient en butte à de nombreux obstacles. La Biélorussie a remis un rapport contenant à la fois ses quatrième, cinquième et sixième rapports périodiques au Comité des Nations unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes, qui devait l’examiner au mois de janvier 2004. Elle décrivait dans ce document les diverses mesures prises pour mettre en œuvre les recommandations faites par le Comité en 2000 en vue de prévenir et d’éradiquer la violence envers les femmes, en particulier la violence domestique. La Biélorussie a donné un aperçu de son Plan national 2001-2005 pour l’égalité des genres, qui contenait des mesures en ce sens, notamment des enquêtes, la création de centres de crise et de conseil pour les victimes et des campagnes de sensibilisation de la population.

Peine de mort
Au moins un prisonnier aurait été exécuté en 2003, bien qu’il demeure difficile d’obtenir des informations précises à ce sujet. Le vice-président de la Cour suprême a déclaré au mois d’octobre que deux hommes avaient été condamnés à mort au cours de l’année 2003 ; d’autres sources ont fait état de cinq condamnations.
Le 13 mai, le Comité des droits de l’homme des Nations unies a décidé que le secret entourant la peine capitale en Biélorussie s’apparentait à un traitement inhumain pour les familles. Les prisonniers sont exécutés en secret et les autorités ne communiquent aux familles ni la date de l’exécution ni le lieu où leurs proches sont enterrés. Dans les affaires opposant Anton Bondarenko et Igor Liachkevitch à la Biélorussie, le Comité a statué que ces pratiques avaient « pour effet d’intimider ou de punir des familles en les laissant délibérément dans un état d’incertitude et de souffrance psychologique ».

Autres documents d’Amnesty International
Concerns in Europe and Central Asia, January-June 2003 : Belarus (EUR 01/016/2003).
Biélorussie. Et il n’en resta aucune (EUR 49/006/2003).

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