BANGLADESH

L’incapacité du gouvernement à endiguer une vague de violence, dirigée principalement contre les membres des groupes minoritaires et les responsables politiques, était essentiellement due à l’impunité. Comme les années précédentes, des défenseurs des droits humains ont été victimes d’actes de harcèlement et d’agressions. Des milliers d’opposants au gouvernement ont été arrêtés de manière arbitraire. Sept personnes au moins ont été exécutées.

République populaire du Bangladesh
CAPITALE : Dacca
SUPERFICIE : 143 998 km²
POPULATION : 149,7 millions
CHEF DE L’ÉTAT : Iajuddin Ahmed
CHEF DU GOUVERNEMENT : Khaleda Zia
PEINE DE MORT : maintenue
COUR PÉNALE INTERNATIONALE : Statut de Rome signé
CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifiée avec réserves
PROTOCOLE FACULTATIF À LA CONVENTION SUR LES FEMMES : ratifié

Contexte
Les liens entre délinquants et responsables politiques ont, semble-t-il, favorisé la violence, la corruption institutionnalisée et l’impunité des responsables d’atteintes aux droits humains. La corruption, notamment au sein du système de justice pénale, restait une préoccupation majeure. En avril, un juge a été révoqué à la suite d’une enquête sans précédent menée par le Conseil judiciaire suprême, qui a conclu que les allégations selon lesquelles ce magistrat avait reçu un pot-de-vin « n’étaient pas totalement infondées ». La Commission anticorruption a été instaurée en novembre.
Au moins 147 personnes auraient trouvé la mort durant l’année à la suite de ce que le gouvernement a qualifié d’échanges de tirs entre le Bataillon d’action rapide, une branche spéciale des forces de sécurité, et des suspects de droit commun. Il était à craindre que les victimes, généralement tuées dans des endroits isolés après leur arrestation, n’aient été abattues sommairement par les membres du Bataillon d’action rapide. Par ailleurs, les partis d’opposition ont affirmé que leurs militants étaient souvent pris pour cible, ce que le gouvernement a nié.
Rendue en 1999 par la Haute Cour, la décision prévoyant la séparation des pouvoirs exécutif et judiciaire n’avait pas été mise en application. La création, en novembre, du Corps judiciaire du Bangladesh a été considérée comme une avancée.

Aggravation de la violence
Des attentats ont été perpétrés contre des membres de l’opposition et dans des endroits publics, notamment des cinémas et des lieux de culte. Les investigations, qui manquaient de rigueur, n’ont pas permis de mettre au jour les mobiles de ces actes de violence. Des membres des partis formant la coalition au pouvoir, notamment du Bangladesh Nationalist Party (BNP, Parti nationaliste du Bangladesh) et de la Jamaat-e Islami (Société de l’Islam), seraient à l’origine d’une série d’attaques visant des rassemblements organisés par l’opposition.
Vingt-deux personnes ont été tuées et plusieurs centaines d’autres blessées dans l’attentat à la grenade perpétré le 21 août contre des dirigeants de l’Awami League (Ligue Awami) lors d’un meeting de ce parti d’opposition. L’opposition a imputé cet acte à des groupes islamistes appartenant à la coalition dirigée par le BNP. Les autorités ont ordonné l’ouverture d’une information judiciaire, dont l’impartialité a été mise en doute après que le Premier ministre eut laissé entendre que des membres de l’opposition avaient pu commettre l’attentat dans le but de ternir l’image du gouvernement. Le juge chargé des investigations a remis son rapport le 2 octobre. Il a affirmé à des journalistes qu’il avait identifié les coupables et mis en évidence un lien avec des « ennemis étrangers », sans toutefois fournir de plus amples précisions. Le rapport et la réponse du gouvernement n’avaient pas été rendus publics à la fin de l’année.
Trois personnes ont trouvé la mort dans un attentat à l’explosif perpétré en janvier à Sylhet, dans le sanctuaire de Hazrat Shah Jalal. En mai, deux personnes ont été tuées et des dizaines d’autres blessées lors d’un nouvel attentat contre ce lieu de culte musulman modéré, qui est critiqué par les groupes islamistes conservateurs.
En octobre, des membres du BNP auraient lancé une attaque contre une réunion publique à Rangpur, dans le nord du pays.

Attaques contre des défenseurs des droits humains
Comme les années précédentes, des défenseurs des droits humains ont été menacés de mort et risquaient d’être victimes d’attentats. Les auteurs de ces agissements étaient, semble-t-il, liés à des groupes islamistes ou à des bandes de délinquants armés dont les défenseurs des droits humains avaient dénoncé le comportement.
Après avoir été menacé de mort à plusieurs reprises, Humayun Azad, professeur à l’université de Dhaka, a été poignardé par des agresseurs non identifiés en février. Personne n’a été traduit en justice pour cette attaque, qui semblait liée à la publication par l’universitaire d’un roman évoquant des groupes islamistes. Humayun Azad, qui s’était rétabli après avoir reçu des soins médicaux pendant plusieurs mois, est décédé en août, apparemment de mort naturelle.
Sumi Khan, correspondante à Chittagong du Weekly 2000, a été blessée à coups de couteau par des inconnus le 27 février, alors qu’elle se déplaçait en rickshaw pour transmettre un article au rédacteur en chef du magazine. Cette agression semblait liée à ses enquêtes sur l’implication de responsables politiques locaux et de groupes islamistes dans les violences perpétrées contre les hindous. Sumi Khan a reçu d’autres menaces de mort par la suite. Personne n’a été traduit en justice pour répondre de ces faits.
Les organisations non gouvernementales (ONG) considérées comme opposées à la politique du gouvernement risquaient d’être victimes d’actes de harcèlement.
Le président et le vice-président de l’ONG Proshika, Qazi Faruque Ahmed et David Williams Biswas, ont été interpellés le 22 mai, apparemment pour des motifs politiques. Leur organisation était accusée d’avoir participé à la campagne politique contre la coalition au pouvoir lors des dernières élections générales. Les deux hommes ont été remis en liberté sous caution, respectivement en juin et en juillet, mais ils étaient toujours sous le coup d’une inculpation.

Violences contre les minorités
Les violences perpétrées contre les groupes minoritaires, notamment les hindous et les ahmadis, restaient largement impunies.
Aucune enquête indépendante n’a été effectuée sur les attaques commises en 2003 contre les groupes tribaux des Chittagong Hill Tracts. Des membres des tribus avaient été tués, d’autres avaient été violés ou soumis à des violences sexuelles, et des centaines d’habitations avaient été incendiées. Personne n’a été traduit en justice à la suite du meurtre d’un prédicateur ahmadi, ni pour répondre des propos haineux visant cette communauté et des attaques contre ses lieux de culte. Plusieurs personnes ont été arrêtées dans le cadre de l’enquête sur l’incendie, en 2003, d’une maison appartenant à des hindous dans le sous-district de Banskhali. Toutefois, les responsables présumés ne figuraient apparemment pas parmi les personnes interpellées.

Violences contre les femmes
De nombreux actes de violence contre les femmes ont été signalés, notamment des agressions à l’acide et des meurtres liés à des demandes de dot non satisfaites. Au moins 153 femmes ont été attaquées à l’acide entre les mois de janvier et d’octobre, a indiqué la Fondation pour les victimes des agressions à l’acide, qui a également fait savoir que seuls neuf des cas de ce type portés en justice avaient débouché sur une condamnation. Des « règlements » à l’amiable seraient intervenus, dans certains cas, entre le coupable et la famille de la victime. La plupart de ces agressions étaient imputables à des prétendants éconduits ou à des personnes qui voulaient régler des comptes avec la famille de la victime.

Arrestations massives de militants de l’opposition
Des milliers de personnes ont été détenues, généralement pendant plusieurs semaines, à la suite de plusieurs vagues d’arrestations, notamment en avril, lors des grèves générales et des manifestations antigouvernementales organisées par la Ligue Awami, ainsi qu’en septembre. Des organisations bangladaises de défense des droits humains ont contesté devant la Haute Cour le bien-fondé des arrestations. Celle-ci a sollicité des explications du gouvernement, mais n’a reçu aucune réponse.

Atteintes aux droits humains commises dans le passé
Le 20 octobre, un tribunal de Dhaka a rendu son verdict à l’issue du procès de 11 hommes accusés d’avoir tué quatre dirigeants de la Ligue Awami dans la prison centrale de Dhaka en novembre 1975. Trois des accusés ont été condamnés à mort par contumace et trois autres - déjà condamnés à la peine capitale pour l’assassinat du président Sheikh Mujibur Rahman en août 1975 - se sont vu infliger une peine de réclusion à perpétuité ; les cinq autres ont été acquittés. La Ligue Awami a affirmé que ces acquittements avaient été prononcés pour des motifs politiques.

Peine de mort
Plus de 120 personnes ont été condamnées à la peine capitale. Sept hommes - dont trois policiers - reconnus coupables de viol et de meurtre ont été exécutés.

Autres documents d’Amnesty International
. Bangladesh : Chittagong Hill Tracts : A Call for Justice at Mahalchari (ASA 13/003/2004).
. Bangladesh. Les droits de la communauté ahmadiyya doivent être protégés (ASA 13/005/2004).
. Bangladesh. Le gouvernement doit s’opposer à la vague de violence (ASA 13/015/2004).

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