GUATEMALA

Les menaces, les attaques et les actes d’intimidation dirigés contre des défenseurs des droits humains, en particulier ceux qui se consacrent aux droits économiques, sociaux et culturels, se sont intensifiés. Cette année encore, un très grand nombre de femmes ont été tuées et les poursuites engagées contre les auteurs présumés de ces crimes ont rarement abouti. Quelques progrès ont été constatés dans les procédures visant à traduire en justice certains responsables présumés de violations des droits humains perpétrées pendant le conflit armé interne.





Contexte
Le taux de criminalité restait élevé en 2006. Tous les secteurs de la société étaient touchés.
Divers groupes ont protesté contre certaines politiques économiques adoptées par le gouvernement. En février, des manifestations ont eu lieu contre l’Accord de libre-échange avec l’Amérique centrale (ALEAC). En juin, des médecins ont dénoncé le manque d’investissements dans le secteur de la santé, tant en matière de services que d’infrastructures. Certaines communautés indigènes rurales ont continué à s’opposer aux activités minières dans leurs régions.
Au mois de février, le bureau du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme au Guatémala a publié son premier rapport. Il a notamment recommandé aux autorités d’investir davantage dans la prévention des violations des droits humains et dans la protection de ces droits.
Dans certaines régions rurales, les forces de police et l’armée ont annoncé qu’elles rechercheraient des caches d’armes et des cultures de drogues illicites. Ces opérations ont entraîné à deux reprises une suspension de certaines garanties prévues par la Constitution. Des groupes de la société civile ont dénoncé la manière dont ces recherches avaient été conduites ainsi que leur caractère politique : dans les régions concernées, en effet, diverses communautés avaient protesté contre des mesures gouvernementales.
Au mois d’octobre, un tribunal mexicain a autorisé l’extradition d’Alfonso Portillo, président du Guatémala jusqu’en janvier 2004, qui fait l’objet de poursuites pour corruption. Cette décision a donné lieu à un recours.
Au mois de décembre, le gouvernement a signé un accord avec les Nations unies en vue de mettre sur pied une commission internationale contre l’impunité au Guatémala. Cette commission serait chargée d’aider le ministère public à engager et à mener des poursuites contre les forces de sécurité illégales et les organisations de sécurité clandestines. À la fin de l’année, cet accord n’avait pas encore été soumis au Congrès pour ratification.

Violences contre les femmes
Au moins 580 femmes ont été tuées en 2006, d’après les statistiques de la police. Selon le ministère public, six personnes ont été condamnées pour ce type d’homicides, qui étaient souvent accompagnés de violences sexuelles.
En juin, le Comité pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes [ONU] s’est déclaré préoccupé par les disparitions, les viols, les actes de torture et les meurtres dont avaient été victimes des femmes au Guatémala, et par la culture de l’impunité caractérisant ces crimes. En septembre, le Congrès a approuvé la création d’un Institut national des sciences médicolégales qui réunirait l’ensemble des services de médecine légale des différents organes gouvernementaux. Selon un texte de loi, avoir des rapports sexuels avec une mineure ne constituait une infraction pénale que si cette personne était « honnête ». Cette loi était toujours en vigueur en 2006.
En février, Silvia Patricia Madrid, une travailleuse du sexe de vingt-cinq ans, a été retrouvée morte, à moitié nue, sur une route des faubourgs de Guatémala (la capitale). Elle avait été étranglée et son corps présentait des traces de violences sexuelles. Les autorités n’ont prélevé aucun élément de preuve sur le lieu présumé du meurtre.


Droits économiques, sociaux et culturels

D’après les Nations unies, plus de 30 p. cent de la population vivaient avec moins de 1,50 euro par jour. Les inégalités persistaient : les femmes, les indigènes et les populations rurales constituaient une part disproportionnée des personnes ayant des revenus faibles et un accès limité aux services de santé et à l’éducation.
Dans les zones rurales, les expulsions se poursuivaient : 29 ont été signalées en 2006. Au mois de juillet, le Comité contre la torture [ONU] a prié les autorités de prévenir tout recours excessif à la force, de dispenser des formations spécifiques aux fonctionnaires de police et de veiller à ce que toute plainte concernant une expulsion fasse l’objet d’investigations poussées.
En avril, quelque 400 personnes ont été expulsées de la ferme San José La Mocá, dans le département de l’Alta Verapaz. Les membres de cette communauté étaient en conflit avec le propriétaire de la ferme, qui n’aurait pas versé leurs salaires. Ils ont été chassés vers une route voisine, sans accès à l’eau potable, privés de toit et de nourriture. En juillet, un des leurs a été tué et 38 autres blessés au cours de nouvelles violences liées à leur expulsion.

Menaces, actes d’intimidation et impunité
Lors d’une visite sur place en mai, la haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies a déclaré qu’aucun progrès significatif n’avait été réalisé dans la lutte contre l’impunité ou dans l’élimination des groupes clandestins. Sur les 278 attaques signalées contre des militants et organisations de défense des droits humains, plus de la moitié concernaient des personnes travaillant sur les droits économiques, sociaux et culturels, notamment le droit au travail, les droits des populations indigènes et le droit au logement.
En juin, un juge et un procureur sont venus d’Espagne pour interroger des témoins et des suspects dans le cadre de leurs investigations sur un génocide présumé. Les deux magistrats ont été stoppés dans leur démarche. En juillet, néanmoins, le juge a délivré des mandats d’arrêt internationaux contre cinq individus mis en cause, dont le général Efraín Ríos Montt, ancien président du Guatémala.
En juillet, Erwin Orrego, membre du Frente de Emergencia Vendedores de Mercados de Guatemala (FEMVEMEGUA, Front d’urgence des vendeurs de marché du Guatémala), a été enlevé et menacé d’exécution, semble-t-il par des policiers. Il a été libéré après que des organisations de défense des droits humains eurent alerté les médias et les autorités.

Peine de mort
Une proposition d’abolition de la peine capitale a été rejetée, la commission du Congrès chargée de cette question ayant émis un avis défavorable. Le Congrès examinait deux nouveaux projets de création d’un système de grâce pour les condamnés à mort. Dans une décision prise en 2005, la Cour interaméricaine des droits de l’homme avait en effet estimé qu’en l’absence de possibilité d’obtenir une grâce, aucune exécution ne pouvait avoir lieu.
À la suite d’arrêts de la Cour portant sur la définition des infractions passibles de la peine capitale, neuf condamnés à mort ont vu leur peine commuée en une peine de cinquante années d’emprisonnement. Vingt et un prisonniers restaient sous le coup d’une condamnation à mort. En 2006, aucune condamnation à la peine capitale n’a été prononcée et aucune exécution n’a eu lieu.

Visites d’Amnesty International
Une délégation d’Amnesty International s’est rendue dans le pays en mars afin d’y effectuer des recherches.

Autres documents d’Amnesty International

 Guatemala : Land of injustice ? (AMR 34/003/2006).

 Guatemala : A Summary of Amnesty International’s Concerns with regard to the Guatemalan Government’s implementation of the United Nations Convention against Torture and Other Cruel, Inhuman and Degrading Treatment or Punishment (AMR 34/013/2006).

 Guatemala : Human rights defenders at risk (AMR 34/016/2006).

 Guatemala : No protection, no justice : killings of women (an update) (AMR 34/019/2006).

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