Contrôlez les armes

« Ils avaient constamment leurs fusils. J’avais peur des fusils. En vérité, j’avais tout le temps peur. »

Ainsi témoigne Fereh Musu Conteh, enlevée par un groupe armé durant le conflit en Sierra Leone. Elle n’avait que treize ans.

« Quand il y a des armes à feu, ça fait plus de victimes », dit Malya, une habitante de Port-au-Prince (Haïti), en évoquant la violence dans son quartier.

La violence armée sévit partout dans le monde. Tous les jours, des hommes, des femmes et des enfants perdent la vie du fait de conflits armés et de crimes violents. Amnesty International appartient à une coalition mondiale pour l’adoption d’un traité international sur le commerce des armes. Un tel accord permettrait de prévenir la prolifération et le mauvais usage des armes, afin de réduire le nombre des victimes.

En 2006, des militants ont remporté une grande victoire avec l’approbation par l’ONU, à une majorité écrasante, d’une résolution de commencement de travaux sur un traité. Ce fut une victoire de taille pour Amnesty International et ses partenaires de la campagne Contrôlez les armes, Oxfam et le Réseau d’action international sur les armes légères (RAIAL). Après trois ans d’efforts dans le monde entier et trois semaines d’action concertée à New York, 139 pays membres de l’ONU ont enfin approuvé une résolution prévoyant d’entamer les travaux préalables à un traité sur le commerce des armes. En décembre, 153 États se sont prononcés en faveur de l’adoption formelle de cette résolution par l’Assemblée générale des Nations unies. Seul un pays, les États–Unis, a voté contre.

Aux termes de la résolution, l’ONU doit solliciter les vues des États membres sur la viabilité, le champ d’application et les paramètres généraux du futur traité. Dans un deuxième temps, en 2008, l’ONU chargera un groupe d’experts de jeter les bases d’un instrument global et juridiquement contraignant. Grâce à la campagne menée avant le vote, la résolution mentionne explicitement les obligations incombant aux gouvernements en vertu du droit relatif aux droits humains et du droit humanitaire. Amnesty International aurait souhaité que les choses avancent plus vite, mais cette progression, pour les Nations unies, est déjà extraordinairement rapide. La résolution pourrait constituer un premier pas vers une interdiction mondiale des transferts d’armes qui détruisent la vie de centaines de milliers de personnes.

Plus d’un million de personnes à travers le monde ont mis leur photo sur le site de la campagne Contrôlez les armes pour signer la pétition du million de visages. Parmi elles, on comptait notamment l’archevêque Desmond Tutu et tous les membres de l’équipe de France de football. Julius Arile, un athlète œuvrant pour la paix au Kenya, a été le millionième visage de cette action. En juin, à New York, il a remis la pétition à Kofi Annan, secrétaire général des Nations unies. Afin de convaincre les gouvernements avant les discussions à l’ONU, les organisations qui mènent cette campagne ont publié un rapport sur le commerce mondialisé de l’armement intitulé Armes sans frontières (POL 34/006/2006).

Dans le cadre du « compte à rebours de cent jours » lancé en mars dans la perspective du vote de l’Assemblée générale, des représentants de 70 sections d’Amnesty International se sont rendus à New York pour y faire campagne et intervenir auprès des participants à la conférence d’examen du Programme d’action des Nations unies sur les armes légères. Les militants se sont appuyés sur le rapport The AK-47 : The world’s favourite killing machine (ACT 30/011/2006), et sur la brochure Principes généraux régissant les transferts d’armes (POL 34/004/2006), publiés par Amnesty International et ses partenaires.

Dans le discours d’ouverture de la conférence, le secrétaire général des Nations unies, à l’instar de nombreux pays, a soutenu l’appel en faveur d’un traité sur le commerce des armes, mais un petit groupe de gouvernements emmené par les États-Unis a bloqué tout accord.

En 2006, d’autres initiatives ont mis l’accent sur le problème de l’exportation d’armes vers les zones de conflit, où sont perpétrés en grand nombre des crimes de guerre et d’autres atteintes aux droits humains. En janvier, Amnesty International a publié des témoignages de victimes de violences en Sierra Leone (AFR 51/001/2006) et Haïti (AMR 36/001/2006). En Sierra Leone et dans les États voisins d’Afrique de l’Ouest, l’approvisionnement en armes financé par la vente illégale de diamants a facilité les conflits et les massacres.

En Haïti, la violence armée s’est propagée des groupes politiques armés aux bandes criminelles, qui tuent et violent des centaines de personnes chaque année. Leur armement introduit en contrebande provient de pays voisins, y compris des États-Unis.

Les pays en développement absorbent désormais plus des deux tiers des importations mondiales de matériel de défense et se tournent de plus en plus vers des fournisseurs privés utilisant diverses chaînes logistiques. En mai, avant la conférence d’examen aux Nations unies, Amnesty International et TransArms, un centre de recherche sur la logistique des transferts d’armement, ont publié un rapport intitulé Dead on time : Arms transportation, brokering and the threat to human rights (ACT 30/008/2006, dont il existe une synthèse en français, Le rôle des intermédiaires dans le commerce des armes : une menace pour les droits humains, ACT 30/007/2006). Selon ce rapport, des transports d’armes aériens non répertoriés ont été organisés entre la Bosnie-Herzégovine et l’Irak sous les auspices du Département de la défense des États-Unis, et d’autres transferts ont été effectués depuis le Brésil vers l’Arabie saoudite et depuis la Chine vers le Libéria via des courtiers et transporteurs étrangers, alors que les destinataires commettaient de façon systématique des atteintes aux droits humains.

Les débats à l’échelle internationale se sont centrés sur les transferts de technologie en matière de nucléaire ou de missiles à longue portée vers des pays comme la Corée du Nord, l’Iran ou le Pakistan, mais on a accordé une attention bien moindre aux nombreuses exportations d’armes classiques et d’armes légères, qui favorisent les atteintes aux droits humains et la violence armée.

Lors du conflit qui a impliqué Israël et le Liban, en juillet et en août, les forces israéliennes ont utilisé des avions, des missiles, des munitions et des bombes, notamment à sous-munitions, fournis essentiellement par les États-Unis, tandis que le Hezbollah a tiré sur le nord d’Israël des roquettes Katioucha et autres, qui auraient été produites avec l’aide de la Syrie et de l’Iran. Dans un rapport intitulé Chine. Conflits et atteintes aux droits humains. Un commerce des armes en pleine expansion (ASA 17/030/2006), publié au mois de juin, Amnesty International a analysé le rôle joué par la Chine dans les ventes d’armes à des pays en conflit et dans la poursuite des atteintes aux droits humains dans des pays comme l’Afrique du Sud, le Myanmar, le Népal et le Soudan.

http://www.controlarms.org

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