Liban

Le Tribunal spécial pour le Liban, institué pour juger les responsables de l’assassinat, en 2005, de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri et d’autres homicides connexes, est entré en fonction en mars. Il a ordonné la remise en liberté de quatre généraux détenus de manière arbitraire dans le cadre des investigations. La discrimination dont les réfugiés palestiniens continuaient d’être victimes se traduisait par des restrictions dans le domaine de l’accès au travail, à la santé, à l’éducation et à un logement décent. D’autres réfugiés vivaient sous la menace de l’arrestation et de l’expulsion. Des avancées modestes ont été enregistrées dans la recherche de ce qu’étaient devenues certaines des personnes victimes de disparition forcée pendant la guerre civile de 1975-1990, dont le nombre se chiffrait par milliers. Quelques mesures ont également été prises pour améliorer les conditions de vie des employées de maison étrangères, qui continuaient toutefois d’être systématiquement exploitées et maltraitées. Au moins 41 prisonniers étaient sous le coup d’une sentence capitale à la fin de l’année.

République libanaise
CHEF DE L’ÉTAT : Michel Sleiman
CHEF DU GOUVERNEMENT : Fouad Siniora, remplacé par Saad Hariri le 9 novembre
PEINE DE MORT : maintenue
POPULATION : 4,2 millions
ESPÉRANCE DE VIE : 71,9 ans
MORTALITÉ DES MOINS DE CINQ ANS (M/F) : 31 / 21 ‰
TAUX D’ALPHABÉTISATION DES ADULTES : 89,6 %

Contexte

Les tensions politiques sont restées élevées à la suite des élections de juin, jusqu’à la formation, en novembre, d’un gouvernement d’unité nationale. Dirigée par Saad Hariri, fils de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri, la nouvelle équipe gouvernementale a été constituée à l’issue de cinq mois de négociations entre l’Alliance du 14 mars, présidée par Saad Hariri, et la Coalition du 8 mars, qui rassemblait le Hezbollah et d’autres partis.
Plusieurs civils auraient été tués, et un certain nombre d’autres blessés, à la suite de flambées locales de violences à motivation politique, pour l’essentiel des affrontements entre les communautés musulmanes alaouite et sunnite à Tripoli ainsi que dans les quartiers beyrouthins d’Aisha Bakkar et d’Ain al Rummaneh.
L’amélioration des relations entre le Liban et la Syrie s’est poursuivie et les deux pays ont désigné des ambassadeurs.
La tension avec Israël a persisté. Les forces israéliennes ont riposté à des tirs de roquettes effectués depuis le sud du Liban en direction d’Israël en janvier, septembre et octobre. L’aviation israélienne continuait de violer l’espace aérien libanais.
Selon le Centre d’action contre les mines du Liban, un organisme officiel, trois civils ont été tués et 25 autres (dont des enfants) ont été blessés par l’explosion de bombes à sous-munitions et de mines terrestres laissées par les forces israéliennes au cours des années précédentes. En mai, les autorités israéliennes ont remis à la Force intérimaire des Nations unies au Liban (FINUL) des informations et des cartes indiquant les secteurs où leurs forces avaient largué des bombes à sous-munitions durant le conflit de 2006.
 ?En mars, Mohammed Abd al Aal, âgé de 10 ans, a perdu la jambe gauche et la main droite à la suite de l’explosion d’une bombe à sous-munitions alors qu’il jouait à proximité de son domicile à Hilta, dans le sud du Liban.

Réfugiés palestiniens et autres réfugiés

La plupart des réfugiés palestiniens continuaient de vivre, dans des conditions souvent déplorables, dans 12 camps officiels surpeuplés. Les quelque 422 000 réfugiés palestiniens enregistrés étaient vic-times de lois et règlements discriminatoires qui les privaient, entre autres droits fondamentaux, du droit d’hériter des biens et de celui d’exercer certaines professions – une vingtaine au total.
Parce qu’ils étaient arrivés au Liban après l’expulsion de l’Organisation de libération de la Palestine de Jordanie, en 1971, au moins 3 000 réfugiés palestiniens étaient dépourvus des documents d’identité exigés pour prouver leur résidence au Liban et faire enregistrer les naissances, les mariages et les décès, entre autres démarches indispensables. Premier pas vers la régularisation de leur statut, les autorités avaient délivré en 2008 des cartes d’identité temporaires d’un an à quelque 800 d’entre eux, qui permettaient à leurs bénéficiaires de se déplacer librement au Liban. La Direction générale de la sécurité générale a toutefois interrompu en 2009 la délivrance de cartes d’identité, privant un certain nombre de réfugiés palestiniens de l’exercice de leurs droits fondamentaux.
Quelque 21 650 réfugiés palestiniens contraints de fuir le camp de Nahr el Bared, non loin de Tripoli, durant les affrontements qui, en 2007, ont opposé pendant 15 semaines l’armée libanaise et les membres du groupe armé Fateh el Islam, étaient toujours déplacés en raison de l’ampleur des dommages et du retard pris dans la reconstruction. Environ 4 450 personnes qui vivaient dans la zone adjacente au camp officiel ont pu rentrer chez elles.
Le Liban accueillait également d’autres réfugiés – irakiens, somaliens et soudanais, notamment –, qui risquaient constamment d’être arrêtés, placés en détention et expulsés, et ce qu’ils soient ou non enregistrés officiellement auprès du Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR). En 2008, la Direction générale de la sécurité générale avait accepté, de manière non officielle, d’accorder aux réfugiés une période de grâce de trois mois, renouvelable une fois, durant laquelle ils devaient trouver un employeur afin de pouvoir prétendre à la délivrance d’un permis de séjour et à la régularisation de leur statut. Cette politique n’a pas été poursuivie en 2009.

Violences et discrimination à l’égard des femmes

Comme les années précédentes, les employées de maison étrangères risquaient d’être exploitées par leur employeur et de subir des sévices psychologiques et physiques, notamment sexuels.
En janvier, le ministère du Travail a instauré un contrat unifié pour les employés de maison étrangers, en grande majorité des femmes. Ce document comprenait une description de l’emploi occupé et énonçait les droits et responsabilités de l’employeur et de l’employé, ainsi que le nombre maximum d’heures de travail. Aucun mécanisme de surveillance n’a toutefois été mis en place pour garantir le respect du contrat par l’employeur ; les changements introduits semblaient par ailleurs insuffisants pour garantir une protection effective aux employés de maison étrangers.
La loi sur la nationalité ne permettait pas aux femmes libanaises de transmettre leur nationalité à leur conjoint ni à leurs enfants, même si ceux-ci étaient nés au Liban.
 ?Le parquet et une commission juridique du ministère de la Justice ont interjeté appel, respectivement en juillet et en septembre, d’une décision par laquelle, en juin, trois juges avaient autorisé Samira Soueidan à transmettre sa nationalité à trois de ses enfants. Aucune audience n’avait eu lieu à la fin de l’année. Le père des enfants, de nationalité égyptienne, était décédé 15 ans plus tôt.

Tribunal spécial pour le Liban

Installé près de La Haye (Pays-Bas), le Tribunal spécial pour le Liban a commencé ses travaux le 1er mars. L’une de ses premières initiatives a été de demander aux autorités libanaises de lui transmettre le dossier de quatre généraux détenus sans inculpation au Liban depuis août 2005, dans le cadre de l’enquête sur l’assassinat de Rafic Hariri. Les autorités ont accédé à cette demande et Jamil al Sayyed, Mustapha Hamdan, Ali al Hajj et Raymond Azar ont été libérés sans inculpation le 29 avril, sur ordre du Tribunal spécial. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire avait estimé en 2008 que la détention de ces quatre hommes était arbitraire et injuste.
En février, les autorités libanaises avaient remis en liberté trois autres prisonniers – Ahmad Abd al Aal, Mahmoud Abd al Aal et Ibrahim Jarjoura –, détenus depuis trois ans au motif qu’ils avaient fait de fausses déclarations à l’organe des Nations unies chargé de l’enquête sur l’assassinat de Rafic Hariri et les attentats connexes.

Détention arbitraire

 ?Emprisonné depuis 15 ans pour le meurtre d’un diplomate jordanien, le réfugié palestinien Yusef Chaaban a été libéré le 13 juillet après que le président Michel Sleiman, reconnaissant le déni de justice grave qui avait entaché la procédure, lui eut accordé une grâce spéciale. Cet homme avait été maintenu en détention alors qu’un tribunal jordanien avait conclu en 2002 que d’autres personnes étaient respon¬sables du meurtre. Yusef Chaaban avait été condamné au Liban par le Conseil de justice, une juridiction dont les décisions ne sont pas susceptibles d’appel et ne peuvent pas être annulées. Le Groupe de travail des Nations unies sur la détention arbitraire avait estimé, en 2006, que sa détention était arbitraire.

Disparitions forcées et enlèvements

Des milliers de cas de disparition forcée et d’enlèvement survenus pendant la guerre civile n’avaient toujours pas été élucidés. Un tribunal a toutefois rendu des décisions préliminaires, en octobre et en novembre, ordonnant aux autorités de lui transmettre les conclusions confidentielles d’investigations menées en 2000 par la commission d’enquête officielle sur le sort des personnes disparues et enlevées, à propos de deux fosses communes à Beyrouth. À la fin de l’année, les autorités n’avaient fourni qu’un bref rapport médical concernant une seule fosse commune.
 ?En novembre, des tests ADN ont révélé que des restes humains trouvés à Aita al Foukhar, une localité de l’est du pays, comprenaient ceux d’Alec Collett, un journaliste britannique enlevé en 1985, apparemment par un groupe armé palestinien, et tué par la suite.

Collaborateurs présumés

Des dizaines d’hommes et de femmes soupçonnés d’espionnage au profit d’Israël ont été arrêtés par les autorités ou leur ont été remis après avoir été capturés et interrogés par des membres du Hezbollah. Au moins deux autres hommes, arrêtés en 2006, ont été jugés pour collaboration avec Israël.
 ?Le procès de Mahmoud Rafeh, membre des Forces de sécurité intérieure en retraite, s’est ouvert en août à Beyrouth, devant un tribunal militaire. Cet homme a affirmé qu’il avait été torturé durant sa détention provisoire et contraint par des agents du Renseignement militaire à faire des « aveux ». Son procès n’était pas terminé à la fin de l’année.
 ?Joseph Sader, un employé de la compagnie aérienne Middle East Airlines, a été enlevé en février. Il était maintenu au secret par un groupe non étatique qui le soupçonnait de fournir des informations à Israël.
Peine de mort
Au moins 40 hommes et une femme étaient sous le coup d’une sentence capitale à la fin de l’année. La dernière exécution a eu lieu en 2004.
Le projet de loi visant à abolir la peine de mort qui avait été élaboré par le ministre de la Justice Ibrahim Najjar et soumis au Conseil des ministres en 2008 n’avait pas été approuvé à la fin de l’année. Le ministre préconisait l’abrogation des articles du Code pénal qui permettaient aux tribunaux de prononcer des sentences capitales.

À lire

Liban. Le Tribunal spécial pour le Liban : une justice sélective ? (MDE 18/001/2009).
Liban. Élections au Liban : recommandations d’Amnesty International en matière de droits humains (MDE 18/003/2009).

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